Carmel

Le Ciel en est le prix - PS 04

1
Le Ciel en est le prix
La matraque sonore
Qui devance l'aurore
Me fait sauter du lit.

2
Le ciel en est le prix
Aussitôt qu'on s'éveille
On voit d'autres merveilles
Que celles de Paris.

3
Le ciel en est le prix
Dans ma pauvre cellule
Point de rideaux de tulle
Ni glaces ni tapis.

4
Le ciel en est le prix
Rien, ni table ni chaise
N'être pas à son aise
C'est le bonheur ici.

5

Le ciel en est le prix
J'aperçois sans alarmes
Mes scintillantes armes
J'aime leur cliquetis.

6
Le ciel en est le prix
A moi le sacrifice
Croix, chaînes et cilice
Mes armes, les voici.

7
Le ciel en est le prix
Après une prière
Il faut baiser la terre
La règle le prescrit.

8
Le ciel en est le prix
Je cache mon armure
Sous ma robe de bure
Et mon voile béni.

9
Le ciel en est le prix
Si madame Nature
Fait entendre un murmure
En riant je lui dis :

10
Le ciel en est le prix
Jeûner est bien facile
Cela rend très agile
Si l'on a faim, tant pis !

11
Le ciel en est le prix
Nous ne respectons guère
Navets, pommes de terre
Choux, carottes, radis.

12
Le ciel en est le prix
Jamais on ne s'étonne
Que le soir on ne donne
Que du pain et des fruits.

13
Le ciel en est le prix
Souvent avec justesse
Le pain passe, et je laisse
Dans l'assiette les fruits.

14
Le ciel en est le prix
De terre est mon assiette
Ma main sert de fourchette
La cuillère est de buis.

15
Le ciel en est le prix
Enfin l'on se rassemble
On peut parler ensemble
Des joies du Paradis.

16
Le ciel en est le prix
En parlant on travaille
L'une coud, l'autre taille
Des ornements bénis.

17
Le ciel en est le prix
On voit la gaîté sainte
Marquer de son empreinte
Les fronts épanouis.

18
Le ciel en est le prix
Une heure passe vite
Je redeviens ermite
Sans froncer les sourcils.

19
Le ciel en est le prix
Le bruit des pénitences
Interrompt le silence
On en est assourdi.

20
Le ciel en est le prix
Des coups que je défile
Par an soixante-six mille
C'est le nombre précis.

21
Le ciel en est le prix
Pour les missionnaires
Nous nous faisons des guerres
Sans trêve, sans merci.

Datation: été 1896
Destinataire: sans doute les jeunes du noviciat.

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