Carmel

01 août 1888 – Montauban

Ma Révérende et très honorée Mère,

Paix et très humble salut en Notre-Seigneur !
Nous nous empressons de solliciter de votre charité les suffrages de notre saint Ordre en faveur de l'âme de notre chère Soeur Marie-Thérèse-Caroline de Saint-Joseph, qui vient d'être enlevée à notre religieuse affection, hier, 30 juillet, dans la 34e année de son âge et la 12e de sa vie religieuse.
Notre regrettée Soeur nous ayant instamment suppliée de ne pas lui faire de circulaire, nous croyons devoir nous conformer à son humble désir. Cependant, nous ne pouvons garder le silence sur l'impression douce et consolante que sa sainte mort a laissée parmi nous.

Notre chère Soeur Saint-Joseph a succombé à la maladie de poitrine dont les symptômes s'étaient manifestés depuis plusieurs années. Sa patience, dans ses souffrances, a été admirable, et c'est même avec joie qu'elle a bu au calice amer de la douleur. Nous n'essaierons pas de vous dépeindre sa force d'âme en constatant les progrès de sa maladie, et son calme en voyant arriver ses derniers moments. Si, par intervalles, un retour sur elle-même, une préoccupation causée par ses souffrances se laissaient entrevoir, ces sentiments étaient au plus tôt désavoués et suivis d'un acte de complet et filial abandon à la sainte volonté de Dieu. Il était beau de la voir alors, calme et souriante, saluer la mort qui approchait, car jusqu'à la dernière heure, elle a joui de la plénitude de ses facultés.

Depuis plusieurs semaines, nous ne l'entendions parler que de Dieu et de sa fin avec une générosité et un abandon comme la grâce du divin Rédempteur peut seule en inspirer à notre faible nature. C'est dans ces sentiments d'amour généreux qu'elle a fait à Dieu le sacrifice de sa vie, appelant l'heure qui devait briser le dernier lien qui l'attachait à la terre. Il n'y avait qu'un instant qu'elle venait de renouveler l'expression de ce saint désir, quand son âme s'envola doucement vers le divin Objet des aspirations de son coeur, la Communauté et nous présentes.

Notre chère Soeur avait reçu, l'avant-veille, les derniers Sacrements ; elle venait de recevoir une dernière absolution, et l'Hôte divin du tabernacle, répondant au voeu suprême de son épouse, s'était encore une seconde fois donné à elle.
Malgré la douce confiance que nous inspire une mort si édifiante, sachant que le souverain Juge trouve des taches même dans ses Anges, nous vous prions d'unir vos prières aux nôtres en faveur de notre regrettée défunte.
Par grâce, une communion de votre fervente Communauté, l'indulgence du Via Crucis et des six Pater. Elle vous en sera reconnaissante, ainsi que nous, qui avons la grâce de nous dire en Notre-Seigneur, ma Révérende Mère,
Votre très humble Soeur et servante,
Soeur MARGUERITE-MARIE du Coeur de Jésus. R. C. J.

De notre Monastère du Saint-Enfant-Jésus et de notre Mère Sainte-Thérèse
des Car mélites de Montauban le ler août 1888.

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