Carmel
Sr Geneviève (Céline) à Sr Françoise Thérèse – 25 novembre 1939

DE  
MARTIN Céline, Soeur Geneviève de la Sainte Face
À 
MARTIN Léonie, Soeur Françoise-Thérèse

25/11/1939

Sr Geneviève de la Ste Face à sa soeur Françoise Thérèse
J. + M.
P.C.                                                                                                  Carmel de Lisieux
le 25 Novembre 1939

Ma bien chère petite soeur,

Voilà donc notre adieu annuel avant l'Avent qui sonne. Je t'assure que je me fais l'effet d'être éternelle, la mort n'est pas faite pour moi ! Mais, toi, que devrais-tu dire ? et notre Mère et notre aînée qui prendra 80 ans dans 3 mois ? C'est vraiment extraordinaire de nous voir ainsi toutes les quatre atteindre l'extrême vieillesse.
Notre chère aînée ne va pas plus mal, sa congestion pulmonaire a cédé en partie, elle se sauve au petit trot, ou au pas, enfin elle part. C'est sa petite infirmière, Sr Marie de l'Incarnation qui nous donne de l'inquiétude....? Elle avait des crises aiguës qui nous faisaient craindre une occlusion intestinale, mais ce matin, le docteur a dépisté le mal, c'est un commencement d'ulcère à l'estomac, facile à guérir, dit-il. Espérons que le bon Dieu va nous la conserver, c'est un ange de douceur et de bonté, elle fait les quatre volontés de "Marraine" ne témoigne jamais aucune fatigue, aucun ennui, se lève la nuit sans se plaindre jamais. Enfin, notre chère Marie dit qu'"elle l'aime d'amour"...Ah ! cette petite soeur sera bien de la famille au Ciel ! Elle m'avait promis de me soigner à mon tour, plus tard, mais je crains bien que sa couronne soit prête avec celle de "Marraine".
J'ai toujours des rhumatismes, un peu à la main droite et beaucoup aux genoux qui sont tout à fait récalcitrants, mais je fais ma petite affaire quand même je suis encore "dans le mouvement "comme on dit sauf pour Matines. Et dire que notre Mère n'y manque jamais ! C'est un prodige notre Mère ! Mais elle mange très vite, très peu et n'a pas bonne mine. Elle entend un peu dur, mais elle est extraordinaire quand même, elle court, elle est leste, aucune dent ne lui manque comme à une jeunesse !
Tu vois, ma Léonie chérie, d'où en sont tes trois petites soeurs, tu devrais bien nous donner des nouvelles aussi détaillées de toi et de ta santé. Si ce que je t'ai dit t'intéresse, ce que tu nous dirais dans le même sens nous intéresserait aussi, si non, restons-en là.
Pendant cette guerre étrange, j'écris à 6 militaires : Paul Maudelonde, commandant, au capitaine Bruneau, au Capitaine Lajoie, nos cousins qui ont épousé les demoiselles Hénault, à Roger Hénault, notre cousin, au petit abbé Leriche et à Roger Schneider, frère de Solange. J'ai constaté que tous étaient bien pensant, droits et si tous ne pratiquent pas, cela viendra, prie pour eux, ma Léonie, adopte-les.
Notre cousin l'Abbé Leriche est un bon prêtre, très bon même, Mgr Germain l'estime beaucoup. Nous lui avons envoyé plusieurs douceurs en habits chauds, car il n'a personne pour le gâter. Nous pouvons vraiment en être fières. Nous venons d'avoir notre visite canonique et nos élections, rien n'est changé. Voilà une lettre où je ne t'ai pas trop parlé du bon Dieu tu ne m'en voudras pas. Veux-tu dire à ta bonne Mère combien nous l'apprécions et sommes heureuses que tu sois l'une de ses petites brebis. Embrasse-la pour moi et qu'elle te le rende pour moi, encore ! Ta petite soeur qui t'embrasse de tout son coeur
Sr Geneviève de la Ste Face c.d.i.

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