Carmel
Sr Geneviève (Céline) à Sr Françoise Thérèse – 12 avril 1941

DE  
MARTIN Céline, Soeur Geneviève de la Sainte Face
À 
MARTIN Léonie, Soeur Françoise-Thérèse

12/04/1941

Sr Geneviève de la Ste Face à sa soeur Françoise Thérèse
J. M.J.T.
P.C.                                                                                                                           Carmel de Lisieux
                                                                                                                                     le 12 Avril 1941
 
Ma Léonie chérie,
 
Il n'y a pas de fête sans lendemain, et comme c'était hier la St Léon je t'offre mes voeux bien affectueux. Tu sais que jamais je n'oublie cette fête de notre jeunesse...Ah quand prendrons-nous part à la fête éternelle, l'exil est si long ! Je désirais déjà beaucoup le Ciel, mais depuis que notre Marie est partie ce désir a encore considérablement augmenté.
Pourtant je sens bien qu'il est nécessaire que nous restions encore un peu sur la terre pour surveiller la publication des lettres de notre Mère chérie et fournir les illustrations utiles à l'intérêt du texte. A ce propos, te souviens-tu avoir vu chez mon oncle une photo encadrée où il était photographié debout à côté de ma tante, après son mariage. Pour moi je n'ai aucun souvenir et je dis à notre Mère que ce qu'elle se rappelle doit être la photo, non pas de mon oncle et de ma tante, mais de Mr et Mme Fournet jeunes. (la dame était assise, le Mr debout) Si cette photo avait été celle de mon oncle nous l'aurions eue certainement à la maison.
J'ai fait photographier deux "morceaux" de Point d'Alençon, cela donne très bien. Ils ne seront pas pour le prochain N°. Dans ce prochain N° tu verras un portrait de Maman que tu ne connais pas. Je me suis servie de la photo où elle avait posé avec le petit Marie-Joseph-Louis. J'ai eu beaucoup de mal pour rendre gais la bouche et les yeux, car cette pauvre petite Mère avait été prise avec un sanglot...Ne dis jamais à personne l'origine de cette photo. (Excepté à ta Mère chérie qui est tellement, tellement de la famille. Oh ! comme nous l'aimons.)
Si tu savais comme elle est bonne pour moi, ta Mère chérie. Elle m'a procuré du beau coton pour faire des cordons d'aube. Ce travail est simple et facile quand on est vieux. Et toi, qu'est-ce que tu peux faire encore ? Moi dans la journée, je m'occupe autant qu'autrefois, je me raccommode aux récréations, et quand j'ai moins d'ouvrage, je travaille à mes cordons d'aube. Cependant le travail n'a plus pour moi le même attrait qu'autrefois et je suis forcée de me prier et supplier pour m'y mettre. Le moindre travail me coûte beaucoup. Mais je suis heureuse d'avoir cela à offrir au bon Dieu en union avec les actions qui lui ont coûté à Lui aussi. Quand je pense qu'Il est venu sur la terre pour nous instruire et nous sauver et que Lui, la perfection infinie, a été mis à mort, je ne m'étonne plus de tout ce qui arrive à ses amis qui veulent le suivre de si près. Et nous en sommes et des plus acharnés à mettre nos pas dans ses pas. Il est vrai que cette place est celle des enfants qui suivent leurs parents et sont protégés par eux, nos souffrances ne nous atteignent qu'après l'avoir atteint Lui-même...et c'est Lui qui en amortit toujours le coup.
Ma Léonie, bonne fêtes de Pâques, je t'embrasse de tout mon coeur. Embrasse pour moi ta Mère chérie.
Sr Geneviève de la Ste Face
c.d.i.
Au sujet de mes travaux, une dame américaine m'a donné une petite machine à écrire. Je fais des copies, cela m'amuse beaucoup, mais j'y suis bien inhabile.
P.S. Nous avons une Prise d'Habit mercredi d'une gentille postulante. Jeudi 17 c'est à Paris le mariage de Jean Leriche, il nous a dit de t'en faire part, prie pour lui afin que son foyer soit digne de la famille de notre saint bon-papa Martin.

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