Carmel

Les miracles de la Béatification

Les deux miraculés

Séminariste Charles ANNE, atteint de tuberculose – FRANCE 1906

Sœur Louise de SAINT‑GERMAIN, atteinte d'un ulcère à l'estomac – FRANCE 1916

Les récits

Premier miracle

Guérison de M. l'Abbé Charles Anne.

Lisieux (Normandie), 29 janvier 1907.

Je suis un séminariste de 23 ans. Après de nombreux crachements de sang et hémorragies violentes, j'étais arrivé à un tel degré d'affaiblissement que je dus m'aliter, le 23 août 1906. Deux médecins jugèrent mon état très grave : une caverne profonde s'était formée au poumon droit, les bronches étaient très endommagées et l'analyse des crachats révéla la présence du bacille de la tuberculose. Les médecins s'avouèrent impuissants et me condamnèrent.

Alors, mes parents, éplorés, sollicitèrent ma guérison de Notre Dame de Lourdes par l'intercession de Soeur Thérèse de l'Enfant-Jésus, et je passai à mon cou un sachet des cheveux de cette petite Sainte. Les premiers jours de cette neuvaine, mon état s'aggrava : j'eus une hémorragie si violente que je pensai mourir; on appela en toute hâte un prêtre; mais, bien que l'on m'engageât à faire le sacrifice de ma vie, je ne pouvais m'y résoudre, et j'attendais avec confiance la fin de la neuvaine. Le dernier jour, aucun mieux ne s'était produit. Alors le souvenir de Thérèse se présenta à mon coeur, la parole qui a si nettement esquissé sa grande âme me pénétra d'une confiance indicible : « Je veux passer mon ciel à faire du bien sur la terre. » Je pris au mot la jeune Carmélite. Elle était au ciel, oh ! oui, j'en étais sûr; j'étais sur la terre, je souffrais, j'allais mourir : il y avait du bien à faire, il fallait qu'elle le fît. Serrant donc fortement contre ma poitrine la chère relique, je priai la Sainte avec tant de force, qu'à la vérité, les efforts mêmes, faits en vue de la vie, eussent dû me donner la mort. 

Nous recommençâmes une neuvaine, demandant cette fois ma guérison à Soeur Thérèse de l'Enfant‑Jésus elle‑même, avec promesse, si elle nous exauçait, d'en publier la relation. Dès le lendemain la fièvre baissa subitement, et, les jours suivants, après l'auscultation, le médecin conclut au rétablissement d'une façon aussi catégorique qu'il avait affirmé la fin. De la caverne du poumon, il n'y avait plus trace, l'oppression avait cessé et l'appétit revenait sensiblement. J'étais guéri.  Mais en même temps qu'elle renouvelait mes forces physiques, Thérèse accomplissait aussi en mon âme une transformation merveilleuse. En un jour, elle a fait en moi le travail de toute une vie.

Je m'arrête, ma Révérende Mère. Dieu m'a mis au coeur une telle reconnaissance que je ne saurai jamais l'exprimer. Aidez‑moi à lui rendre grâce.

Charles ANNE

M. l'abbé Anne, devenu prêtre, jouit d'une santé parfaite et exerce aujourd'hui un ministère des plus actifs, en qualité d'aumônier de l'Hospice, à Lisieux.

 

Documents relatifs aux miracles attribués à l'intercession de soeur Thérèse de l'Enfant‑Jésus

(extrait du Procès Apostolique)

Pour le cas de l'abbé Charles Anne, nous trouvons l'abbé lui‑même, vicaire à Pont‑l'Evêque ; ses parents, Prosper‑Alexandre Anne et Joséphine‑Reine Hare ; son médecin, le doc­teur Paul Loisnel; la Soeur Marie Saint‑Ignace (Clémence François), des religieuses de l'Immaculée-Conception de Nogent‑le‑Rotrou, à qui est due l'initiative de la neuvaine de prières à Thérèse pour obtenir la gué­rison. Enfin, comme co­-témoin ex officia, nous avons l'abbé Polydore Morel, curé‑doyen de Pont­-l'Evêque où l'abbé Anne était vicaire.  Sur la demande du sous‑promoteur Mgr T. Dubosq dans la session 74, le 3 août 1917, deux médecins ex­perts, les docteurs Adolphe‑Jean Lepré­vost et Alexandre‑Damase de Cornière —médecin du Carmel qui soigna Thé­rèse pendant sa maladie—firent une visite de contrôle à l'abbé Anne, at­testant ensuite—session 76, du 4 août suivant —que le bon état de santé du prêtre se maintenait.

Second miracle

Guérison de Soeur Louise de Saint‑Germain

Récit de la miraculée

Couvent des Filles de la Croix, à Ustaritz (Basses‑Pyrénées).

Pendant mon noviciat 1911 et 1912, j'avais éprouvé assez souvent des maux d'estomac et de tête, accompagnés de vomissements pénibles; toutefois, ma santé n'en fut pas altérée au point de m'empêcher d'être admise à la Profession religieuse, après laquelle je partis pour l'Espagne.  Mais, dès les premiers mois de 1913, les douleurs d'estomac re­parurent plus fréquentes, et des vomissements, mêlés de sang, prouvèrent qu'un ulcère s'était formé à l'intérieur. Rentrée à Usta­ritz, on me soumit d'abord à un régime alimentaire aux oeufs et au lait, avec quelques cachets de bismuth. Une crise plus aiguë que toutes les précédentes, survenue dans la nuit du 14 novembre, m'o­bligea à vingt‑cinq jours de diète hydrique et au repos complet. Le docteur déclarait que la plaie interne de l'estomac se continuait par le pylore, jusqu'à la partie supérieure du duodénum.

Après huit mois de soins à l'infirmerie, je me crus assez bien pour demander à reprendre ma classe, et j'obtins l'autorisation de revenir en Espagne. Hélas ! le mal n'était qu'endormi. Les mêmes symptômes se reproduisirent, avec une recrudescence inouïe accompagnés d'hémorragies abondantes. On jugea une opération indispensable, et je fus de nouveau renvoyée à notre Maison provinciale d'Ustaritz. Après un voyage extrêmement pénible, j'y arrivai dans un tel état de faiblesse qu'on crut devoir m'administrer les derniers Sacrements.

C'était au début de l'été de 1915. Je restai dans cet épuisement total . Pendant trente‑deux jours, prenant pour toute nourriture quelques gorgées d'eau glacée que je rejetais ensuite au prix de cruelles souffrances.  C'est alors que la Communauté commença une neuvaine à Soeur Thérèse de l'Enfant‑Jésus. Je m'y unis avec joie, car j'aimais beaucoup la petite Sainte, qui daigna même, au cours de cette neuvaine, me faire sentir sa présence. J'eus, en effet, l'impression très douce de sa main se posant sur ma tête comme pour me rassurer, et, pendant trois jours, un parfum mystérieux que les Soeurs ne s'expliquaient pas, se répandit dans la chambre que j'occupais. Cette grâce avait pour but de soutenir mon courage, car je devais souffrir longtemps encore. Voyant que les prières restaient sans effet, je ne demandai plus ma guérison à Soeur Thérèse, je l'invoquais seulement pour obtenir son assistance.

Sur ces entrefaites, au début de septembre 1916, une de nos Soeurs, de passage ici, m'inspira de renouveler mes instances auprès de la chère Sainte. Cédant à son invitation, je joignis le sacrifice à la prière, et redoublai de confiance. Or, quel ne fut pas mon étonnement quand, dans la nuit du 10 septembre, Soeur Thérèse de l'Enfant-Jésus elle‑même vint à moi et me dit : « Soyez généreuse, bientôt vous guérirez, je vous le promets. » Puis elle disparut. Et au matin, les trois religieuses qui couchaient dans mon infirmerie furent bien surprises de trouver des pétales de roses de toutes couleurs autour de mon lit. C'était le présage de ma guérison; mais elle allait tarder encore de quelques jours, pendant lesquels j'endurai un vrai martyre et fus réduite à toute extrémité. C'est seulement le 21 septembre au soir, après un accès des plus violents, que je m'endormis soudain contre toute attente, pour m'éveiller le lendemain parfaitement guérie. Plus aucune souffrance, mais une sensation de bien‑être général. J'avais grand'faim et je me levai joyeuse pour demander la permission d'assister à la Sainte Messe. Par une sage prudence, ma digne Supérieure m'obligea à me remettre au lit où l'on m'apporta un copieux déjeuner; et bientôt, devant l'évidence de ma complète guérison, je pus reprendre la vie régulière. Je jouis depuis cette époque, c'est‑à‑dire depuis un an, d'une santé parfaite, et il garde une profonde gratitude à Soeur Thérèse de l'Enfant‑Jésus, que je voudrais faire connaître à tous.

Ustaritz, octobre 1917
Sr Louise de Saint-Germain
Fille de la Croix.