Carmel

Au Procès Apostolique : vérification de la tombe et reconnaissance des restes de la Servante de Dieu

Tombe et restes de Soeur Thérèse

[Vérification de la tombe et reconnaissance des restes de la Servante de Dieu]

Selon les normes du droit, avant de conclure le Procès Apostolique on dut procéder à la vérification de la tombe de la Servante de Dieu, à l'exhumation de sa dépouille mortelle et à la recon­naissance des reliques conservées au Carmel de Lisieux.

En ce qui concerne la vérification de la tombe, l'abbé Alexandre‑Charles Mau­pas, curé de Saint‑Jacques de Lisieux et supérieur du Carmel, qui avait été déjà quinzième témoin au Procès Apostolique inchoatif (p. 1543) et soeur Marie-­Elisabeth Hamard de Sainte Thérèse (1860‑1935), tourière du Carmel, furent appelés à déposer dans la chapelle du Carmel, au cours de la sessison 80, le 9 août 1917. Ils avaient assisté en 1897 à la sépulture de Thérèse et en 1910 à la première exhumation: c'est pourquoi ils étaient en mesure de parler avec certi­tude de la tombe de la Servante de Dieu.

Après ces dépositions de pure for­malité, le Tribunal dut s'occuper de l'exhumation. C'est pourquoi l'on a, dans notre Copie publique, toute la docamen­tation relative, précédée d'une descrip­tion très soignée du cimetière de Lisieux et de la partie réservée aux carmélites déchaussées, lieu de la tombe de Thé­rèse. Le texte comporte aussi un graphi­que (plan de la concession des carmé­lites dans le cimetière), avec une photo­graphie originale et deux cartes relatives à cette concession, et spécialement à la tombe de la Servante de Dieu (pp. 1546-1550). Dans l'après‑midi du 9 août, en présence du Tribunal et devant une vé­ritable foule accourue sans avoir été avertie ni invitée, la sépulture de Thé­rèse fut ouverte: le cercueil de 1910 en fut retiré, puis transporté, avec les for­malités juridiques requises, dans la cha­pelle centrale du cimetière, dont la porte fut ensuite fermée et scellée. Pendant toute la nuit quatre gardes et quelques hommes qui s'étaient offerts spontané­ment gardèrent l'entrée (pp. 1551‑1582).

Le 10 août—anniversaire de 1'ouver­ture du Procès Ordinaire (1910)—eut lieu la 81ème session, consacrée à 1'ou­verture du cercueil, à la reconnaissance des ossements et des autres restes, à la re­déposition de ces restes, enveloppés dans de la soie et du lin fin, dans un nouveau cercueil de chêne, enfermé à son tour dans deux autres cercueils de plomb et de palissandre. Dans le Procès il y a plu­sieurs photographies de ces cercueils, tandis que la narration des actes de la session descend jusqu'aux plus petits dé­tails. Il faut noter qu'à la reconnaissance étaient présentes deux religieuses du Carmel, autorisées par monseigneur l'évêque à sortir de la clôture pour dis­poser elles‑mêmes les ossements précieux, une fois reconnus. Les deux moniales étaient soeur Geneviève de Sainte Thé­rèse (Céline) et soeur Madeleine de Jésus (1875‑1940), qui était entrée au Carmel en 1898 et n'avait donc pas connu la Servante de Dieu (pp. 1555‑1563).

Après le transport triomphal de la cha­pelle du cimetière au premier sépulcre, en partie rénové et mieux protégé contre l'humidité, le Tribunal se transférait au Carmel de Lisieux (à qui fut remis le cercueil qui avait contenu les ossements de Thérèse depuis l'exhumation de 1910) pour l'examen des différentes reliques de la Servante de Dieu conservées au monastère. Fut appelée à déposer, com­me unique témoin, la prieure Agnès de Jésus, avec, pour confirmer son serment de vérité, soeur Geneviève de Sainte Thérèse et soeur Madeleine de Jésus. Huit reliquaires furent présentés au Tribunal —parmi ceux‑ci, d'une importance et d'une valeur particulières, le reliquaire contenant la chevelure complète de Thé­rèse, coupée à la Vêture—qui les scella.

Le 11 août le Tribunal se réunissait à nouveau dans la sacristie du Carmel pour les relations que devaient faire les deux médecins experts sur l'état du corps de Thérèse, comme résultat de la reconnais­sance du jour précédent. Les docteurs Alexandre Damase de Cornière (pp. 1567‑ 1571) et Paul Boisnel ( pp. 1571‑1584) déjà bien connus, déposèrent lon­guement.

Avec ceci, le Procès Apostolique de Bayeux‑Lisieux était pratiquement ter­miné. Les sessions successives (83‑90), qui eurent lieu les 10, 19, 20, 22, 24, 29 septembre et le 6 octobre 1917, furent consacrées aux dernières formalités juri­diques complétementaires et à la collation des deux exemplaires du Procès destinés à Rome (pp. 1586‑1694).

La dernière session, la 91ème, célébrée publiquement d'une façon très solennelle dans la merveilleuse cathédrale gothique de Bayeux le 30 octobre, fut la session de clôture du Procès (pp. 1694‑1705).

[Session 80: ‑ 9 août 1917, à 3h. de l'après‑midi]

 [1542] [Du lieu de la tombe de la Ser­vante de Dieu]:

Témoin 1: ALEXANDRE MAUPAS

[1543] [Réponse du premier témoin]:  Je m'appelle Alexandre Charles Mau­pas, né le 27 août 1850, à Mesnil‑Ozouf. Je suis prêtre, curé de Saint‑Jacques de Lisieux et supérieur du Carmel.    J'assistai à l'inhumation de soeur Thé­rèse de l'Enfant Jésus en 1897. Elle fut inhumée au cimetière de la ville, dans la

Tombe et restes de Soeur Thérèse

partie réservée aux carmélites, au fond, à droite.

J'ai aussi assisté à l'exhumation qui fut faite par ordre de monseigneur de Bayeux, le 6 septembre 1910. Le corps de soeur Thérèse fut alors transféré dans une autre tombe, située à gauche en entrant, dans le même terrain des carmélites. C'est là que son corps repose maintenant.

Signatum: ALEXANDRE MAUPAS, supé­rieur, j'ai juré comme ci‑dessus.

Témoin 2: SOEUR MARIE‑ELISABETH

 [Réponse du deuxième témoin]:

[1545] Je m'appelle Marie Hamard , née à ­Couternes, diocèse de Séez, le 13 octobre 1860. Je suis religieuse tourière au Carmel de Lisieux depuis 27 ans.

J'étais présente à l'inhumation de soeur Thérèse de l'Enfant Jésus, au commence­ment d'octobre 1897. On l'a enterrée dans notre cimetière, c'est‑à‑dire dans la partie qui nous est réservée au cimetière de la [1544] ville. Sa tombe était à droite en entrant, au fond, dans l'angle contre la grille.

On l'a exhumée le 6 septembre 1910, pour la mettre dans le caveau où elle est actuellement. J'assistai à cette trans­lation. La nouvelle tombe se trouve à l'entrée du cimetière des religieuses à gauche. Je viens souvent en pèlerinage au cimetière. Le pèlerinage est d'ailleurs très fréquenté, et il est notoire que le corps n'a plus été sorti de cette tombe.

Signatum: Soeur MARIE‑ELISABETH.

[Les juges, sous‑promoteurs et témoins se rendent au cimetière].

[Jeanne Bonnelle, gardienne du cimetière de Lisieux, est priée d'indiquer l'endroit de la sépulture].

Témoignage de JEANNE

BONNELLE

[Interrogé sur son état‑civil, le témoin répond]:

Je m'appelle Jeanne Bonnelle, femme Bonhoure, née à Lisieux, le 26 juillet 1877. Je suis gardienne du cimetière public de la ville de Lisieux depuis l'année 1912.

[Où la Servante de Dieu, Thérèse de l'FnfantJésus a‑t‑elle été ensevelie?]:

Je n'ai assisté ni à la première inhumation de soeur Thérèse, ni à la translation. Les gardiens qui ont fait le service avant moi m'ont dit qu'ils avaient assisté à ces cérémonies, que la première tombe était dans la partie de droite, au fond de la concession des carmélites. Je suis témoin qu'il y a un pèlerinage ininterrompu au second caveau qui se trouve à gauche en entrant.

[Prié de le faire par qui de droit, le notaire a rédigé la relation que voici]:

[1546] Le grand cimetière, commun aux diverses paroisses de Lisieux, se trouve en dehors de la ville, à une distance d'environ un kilomètre des dernières maisons, du côté du sud, sur le territoire de la paroisse de Saint‑Jacques. Il s'étend en forme de rectangle allongé de l'ouest à l'est sur une longueur d'environ 300 mètres et une largeur de 100 à 150 mètres.

Vers l'extrémité est, et dans l'angle sud‑est, se trouve un espace rectangulaire limité par un petit mur de briques surmonté d'une grille en fer. Cet espace est affecté à la sépulture des carmélites: il mesure environ 10 mètres en longueur (ouest‑est) et 5 mètres 50 en largeur (nord‑sud). L'entrée de l'enclos est formée par une marche ascendante et une petite porte dans la grille de fer, au milieu du côté sud.

Dans ce terrain il y a d'abord, le long du côté nord, une rangée de sept tombes. La dernière à droite, de ces sept tombes, dans l'angle nord‑est de la concession, ne porte plus de croix: c'est un simple monticule irrégulier de terre remuée. C'est l'emplacement de la première sépulture de la Servante de Dieu.

En avant de cette rangée de sept tombes, il y a une deuxième rangée en formation, donc plus au sud et vers l'entrée. A droite de l'entrée, il y a trois tombes. A gauche de l'entrée, une seule tombe qui occupe à peu près le milieu de l'espace entre la porte d'entrée et le [1547] mur de l'ouest. Cette tombe est la sépulture actuelle de la Servante de Dieu; elle y repose depuis le 6 septembre 1910. On a consolidé par un dallage en briques l'espace qui environne cette tombe, à la distance d'environ 0,80 m. tout autour. Sur la tombe est fixée une croix de fer, peinte en blanc, sans ornements mais un peu plus grande que les croix de bois qui sont sur les autres tombes contenues dans l'enclos. Seulement, au nom de la religieuse défunte, que comportent seul les autres croix, on a ajouté ici une parole dite par la Servante de Dieu. On lit donc: «1873‑1897. ‑ Soeur Thérèse de l'Enfant Jésus et de la Sainte Face. ‑ ' Je veux passer mon ciel à faire du bien sur la terre'.» Cette croix est littéralement couverte de « graffiti.» Le tertre est tout couvert de fleurs.

Près de l'entrée de l'enceinte, à gauche de la porte d'entrée, une plaque de tôle est suspendue à la grille, portant cette inscription: « Par prudence et pour obéir aux prescriptions de l'Église, il est expressément défendu d'allumer des cierges sur le tombeau de soeur Thérèse de l'Enfant Jésus.»

Enfin, il est bon de noter qu'il existe, dans le cimetière de Lisieux, un autre terrain également limité par une grille et un petit mur, et affecté autrefois à la sépulture des carmélites, mais cette concession plus ancienne se trouve vers le centre du cimetière, tandis que celle qui renferme le tombeau de la Servante de Dieu est à l'extrémité est.

 [1551]

Tombe et restes de Soeur Thérèse

[Session 81: ‑ 10 août 1917, à 9h. et à 2h. de 1'après‑midi]

[1555] [1556]

~ Lecture est donnée de l'excommunication à encourir « ipso facto » par quiconque présumerait de prendre ou déposer quoi que ce soit au cours de l'ouverture de la tombe.

L'évêque donne alors l'ordre d'ouvrir la tombe. On trouve le 'loculus' à deux mètres de profondeur. Il est parfaitement ferré et mesure deux mètres vingt sur un mètre.

Le cercueil de chêne en est retiré et porté dans la chapelle funèbre du cimetière. Il mesure deux mètres 08 de longueur 60 centimètres de hauteur du côté de la tête et 52 du côté des pieds. 86 centimètres de largeur du côté de la tête. et 66 du côté des pieds.

On lit l'inscription suivante sur une plaque métalique que porte le cercueil: "Soeur Thérèse de l'Enfant Jésus et de la Sainte Face, Marie‑Françoise‑Therèse Martin, 1873‑1897."

Tout est reconnu conforme aux actes de la précédente reconnaissance et déposition du corps de la Servante de Dieu.

[1557]

Sur l'ordre de l'évêque. le cercueil de chêne est ouvert, et un cercueil de plomb en est retiré. Il mesure environ deux mètres 02 de longueur, 80 centimètres de largeur du côté de la tête et 60 du côté des pieds, 64 centimètres de hauteur du côté de la tête et 46 du côté des pieds. Les quatre sceaux de Thomas‑Paul‑Henri Lemonnier, évêque de Bayeux et Lisieux, et Roger de Teil, vice‑postulateur, étaient intacts aux quatre angles du cercueil. Description en est donnée.

Le cercueil de plomb portait la même inscription que le cercueil de chêne.

Sur l'ordre de l'évêque. on ouvre le cercueil de plomb. On trouve alors un autre cercueil de bois. mais sans ‘couverture' et pour une part, endommagé.

Ce cercueil contenait: 1) des ossements de la Servante de Dieu; 2) des vêtements de la même, les uns plus anciens, les autres plus récents 3) beaucoup de poussière et de sciure 4) un tube de plomb scellé du sceau de l'évêque. Ce tube fut ouvert. Il contenait un Parchemin dont voici la teneur:

« L'an du Seigneur 1910, le 6 septembre, en présence de sa grandeur monseigneur Lemonnier, évêque de Bayeux et Lisieux, de monsieur A. Quirié, vicaire général, de monsieur le chanoine Dubosq, supérieur du grand séminaire, de monsieur le chanoine Deslandes, archiviste du diocèse, de messieurs les curés des trois paroisses de Lisieux, de monseigneur R. de Teil, de plusieurs chanoines et de prêtres, de messieurs les docteurs de Cornière et La Néele, de quelques autres personnes et de monsieur le commissaire de police de Lisieux, les restes de la Servante de Dieu soeur Thérèse de l'Enfant Jésus et de la Sainte Face, Marie‑Francoise‑Thérèse Martin, ont été exhumés, sur l'ordre de monseigneur l'évêque de Bayeux, désireux de mieux assurer leur conservation. Le corps, revêtu du cos‑[1558]tume des carmélites et placé dans un cercueil de sapin avait été inhumé le 4 octobre 1897, devant plusieurs des personnes ci‑dessus désignées, à 3 mètres de profondeur.

La fosse, qui n'a pas été fouillée depuis lors, était située en première place à l'angle sud‑est d'un terrain rectangulaire, clos de murs, affecté à la sépulture des carmélites, dans le cimetière de la ville de Lisieux, section J.A.3.

Tombe et restes de Soeur Thérèse

Le cercueil reposait à la place et à la profondeur indiquées; il a été remonté, avec grandes précautions, par les fossoyeurs attitrés du cimetière, dans un état d'altération presque complète à la partie inférieure. Retiré avec un religieux respect, avant d'être déposé dans une bière de plomb, il est reçu à la psalmodie du psaume « Laudate pueri Dominum.» A l`ouverture du cercueil, on ne trouve que les ossements enveloppés dans la bure du Carmel. Alors les témoins présents ont signé le présent procès‑verbal pour être déposé dans le cercueil de plomb, enfermé dans un tube de métal.

Fait à Lisieux les jour et an que dessus.

+ THOMAS, évêque de Bayeux et Lisieux. Quirié ‑ Dubosq ‑ Deslandes ‑ Docteur de Cornière ‑ Docteur La Néele ‑ Pour le commissaire de police Fourquemin ‑ Ducellier‑ Chachelou ‑ Pitrou ‑ Mau­pas ‑ R. de Teil ‑ Bisson ‑ Durel.

[1561]

 Les docteurs Alexandre de Cornière, chirurgien, et Paul Loisnel, médecin, procèdent à un examen minutieux des ossements de la Servante de Dieu.

Dans l'après‑midi ces ossements sont placés dans un nouveau cercueil de chêne. soigneusement préparé à cet effet: longueur, un mètre 24; largeur. 40 centimètres; hauteur, 30 centimètres. Sont présentes comme aides et témoins appelées par l'évêque, soeur Geneviève de la Sainte‑Face et soeur Madeleine de Jésus. Les ossements nommément reconnus sont enveloppés de lin et de soie par les médecins‑experts et replacés ainsi par ordre dans le cercueil. Les petits morceaux d'ossements sont recueillis dans trois petits vases de verre, placés de même dans le cercueil et portant respectivement les inscriptions suivantes: « 1° Nombreux ossements des pieds; 2° des ossements des mains; 3° fragments de la peau de la tête et cheveux.»

Est, en outre. déposée au bas de ce cercueil une petite plaque de plomb qui avait déjà été mise dans le cercueil du premier ensevelissement en 1897.

Moi, notaire, j'ai alors écrit sur parchemin une épigraphe témoignant brièvement de ce qui venait d'être effectué ce 10 août 1917 par l'autorité apostolique. Cette épigraphe dûment signée, je l'ai mise et fermée dans un cylindre d'étain, alors déposé dans le cercueil. Ce cercueil fut alors fermé et puis placé sous scellés, puis déposé à son tour dans un cercueil de plomb un peu plus grand.

Des fragments de vêtements sont alors mis dans de petits sacs de soie munis des inscriptions suivantes: « 1° Fragments des vêtements avec lesquels la Servante de Dieu fut d'abord inhumée (en 1897).» «2° Fragments des vêtements apportés à l'occasion de l'exhumation du 6 septembre 1910.»

Ces petits sacs furent placés dans le cercueil de plomb au pied du cercueil de bois, avec aussi l'inscription sur plombs de la précédente exhumation (1910).

 Dûment fermé et mis sous scellés, le cercueil de plomb contenant le cercueil de chêne fut placé à son tour dans un cercueil de palissandre d'un mètre 56 de longueur, de 65 centimètres et demi de largeur, et de 55 centimètres de hauteur, orné d'une croix du même bois sur la partie supérieure et portant, sur une plaque métallique, l'inscription suivante: Hic ossa..., etc.

Tombe et restes de Soeur Thérèse

 Le cercueil fut reporté dans la tombe où avait jusque‑là reposé le corps de la Servante de Dieu, des précautions y ayant été prises contre l'humidité. La croix de fer fut replacée là où elle se trouvait précédemment avec la même inscription, à savoir:

1873‑1897 ‑ Soeur Thérèse de l'Enfant Jésus et de la Sainte Face. « Je veux passer mon ciel à faire du bien sur la terre.»

 Enveloppés de drap de lin blanc et placés sous scellés. les cercueils précédents furent remis à la soeur sacristine du Carmel de Lisieux pour être conservés avec les reliques des vêtements de la Servante de Dieu.

 Furent alors apportés. sur l'ordre de l'évoque, les huit reliquaires contenant respectivement: I ) la chevelure complète; 2) des fleurs composées avec cheveux; 3) une petite dent, et, dans les cinq autres, des cheveux. Chacun des reliquaires fut muni du sceau de l'évêque.

[Déposition de la révérende mère prieure, Agnès de Jésus,

au sujet des reliques de la Servante de Dieu conservées dans le monastère].

[1563] [Y a‑t‑il en clôture quelque chose du corps de la Servante de Dieu, outre les reliques qui sont dans la tombe du cimetière; et, si oui, qu'y a‑t‑il? ‑‑ Réponse]:

Nous conservons au Carmel:

1° Une chevelure complète de la Servante de Dieu.

2° Des réserves de cheveux coupés à différentes reprises.

3° Un reliquaire ouvragé avec des cheveux de la Servante de Dieu.

4° Une dent conservée depuis l'année 1884.

[1564] 5° Avant la reconnaissance des restes faite à cette présente date, un grand nombre de petits sachets, contenant quelques fragments de cheveux ont été distribués par manière de souvenir un peu partout.

Signatum. SOEUR AGNÈS DE JÉSUS, j'ai déposé comme ci‑dessus.

[Session 82: ‑ 11 août 1917, à 9h.]

 [Examen des médecins].

[Examen du docteur Alexandre de Cornière].

[1567] [Nom et situation]:

Je m'appelle Alexandre Damase de Cornière, médecin chirurgien en chef honoraire de l'hôpital de Lisieux, né à Bonnebosq, le 26 octobre 1841.

II. [Interrogé sur le constat de l'exhumation, le docteur donne lecture de la relation suivante qu'il remettra au tribunal]:

Nous soussigné de Cornière Alexandre, docteur en médecine, ex~interne provisoire des Hôpitaux de Paris, chirurgien en chef honoraire de l'hôpital de Lisieux, sur la réquisition du tribunal ecclésiastique avons procédé à l'examen du cercueil de soeur Thérèse de l'Enfant Jésus et de la Sainte Face.

A l'ouverture du cercueil, le contenu se présente sous la forme d'une poussière brune, couleur de tan de laquelle émerge l'extrémité de quelques ossements importants. En explorant avec la main cette espèce de terreau, nous avons trouvé dans la partie supérieure du cercueil une certaine quantité d'os complètement isolés les uns des autres; les plus importants se trouvent à l'autre extrémité du cercueil. Nous avons trouvé beaucoup de débris d'étoffe dont quelques‑uns étaient à peine reconnaissables: il n'y avait aucune apparence de robe ou de tunique. Toutefois un ruban de soie avec inscription était assez bien conservé. Une grande partie de la poussière était formée par de la sciure.

[1568] Voici maintenant en détail la description des os tels que nous les avons trouvés.

Crâne

Le crâne est complètement dénudé; quelques cheveux sont encore trouvés dans son voisinage. Les sutures sont complètes. Le temporal commence à se désunir.

Le maxillaire supérieur porte dix dents; la dent de sagesse gauche y sort de l'alvéole. Les deux os unguis se détachent. Le frontal et le pariétal sont intacts. L'ethmoïde est en place: son extrémité inférieure ainsi que le cornet supérieur du nez sont intacts. Le sphénoïde et l'occipital sont normaux: ce dernier est lisse. A gauche de l'atlas on trouve une petite cavité, commencement de destruction. Le temporal droit est normal et l'apophyse styloïde n'existe plus. Le temporal gauche est normal et les pariétaux sont intacts tous les deux: structure et rapports.

Tombe et restes de Soeur Thérèse

Le maxillaire supérieur droit est détaché en deux fragments; le maxillaire supérieur gauche adhérent est intact, Les deux incisives supérieures manquent. L'os malaire gauche est intact ainsi que l'arcade zygomatique. Les os propres du nez sont, le droit fracturé au milieu, et le gauche intact. Les os palatins sont très friables, le droit surtout. On ne retrouve pas le vomer. Pas d'os hyoïde. Le maxillaire inférieur est bien conservé. L'avant dernière molaire droite manque et l'avant dernière gauche est carrée. Il existe une inclinaison des deux canines sur les incisives. En général les dents sont bien implantées dans les alvéoles.

Colonne vertébrale

La colonne cervicale est complète. L'atlas et l'axis [1569] ne présentent rien de particulier. A part quelques apophyses transversales, les autres sont intactes. Il n'y a que onze vertèbres dorsales. Il y a cinq vertèbres lombaires; une partie de l'apophyse transverse de la dernière manque.

Le sacrum est intact et les deux parties supérieures sont soudées. Le coccyx n'est représenté que par une seule pièce; on ne trouve pas les autres.

Il n'y a que vingt‑trois côtes. Le sternum est soudé dans ses trois pièces supérieures: l'appendice xiphoïde n'a pas été retrouvé. Les deux clavicules sont intactes. L'omoplate droite a sa cavité glénoïde en bon état, L'omoplate gauche est fracturée.

Membres supérieurs

L'humérus droit porte 0,30 cm. de longueur. Les sutures et les ossifications sont normales et les surfaces articulaires sont intactes. Une petite partie de l'épicondyle manque.

Le cubitus droit est normal sauf une petite partie vers la surface articulaire inférieure.

Le cubitus gauche donne comme le droit 0,23 cm. de longueur. Les ossifications et les sutures sont complètes.

Le radius droit n'a pas sa tête; il existe une fracture au niveau du col.

Le radius gauche présente une longueur de 0,21 cm.: ossification et sutures complètes. Il est normal.

Bassin

Le diamètre transverse porte 0,13cm.1/2.Le diamètre antéro‑postérieure porte 0,13 cm. Le diamètre oblique 0 m. 14 cm. l/2

Les os iliaques sont bien conservés et les cavités cotyloïdes normales. Les trous sont triangulaires. Les épines ilia‑[1570] ques sont normales. Pubis: lignes de suture et ossification normales.

Membres inférieurs

Le fémur droit porte 0,46 cm. de longueur: son ossification est complète et l'on voit très distinctement la ligne âpre.

Pour le fémur gauche même longueur et même ossification.

Rotules normales complètement ossifiées. Le tibia droit porte 0,34 cm. de longueur; il est normal.

Le péroné droit porte 0,34 cm. l/2 de longueur; état normal.

Le tibia gauche porte 0,34 cm. l/2 de longueur; il est normal.

Il existe une petite érosion au niveau de la tête du péroné gauche qui est normal d'ailleurs et présente la même longueur que le péroné droit.

Le calcaneum droit est normal ainsi que l'astragale.

On ne trouve qu'un scaphoïde et un cuboïde qui ont un peu perdu de leur forme.

Nous ne voyons que quatre os cunéiformes en tout. Tous les métatarsiens sont intacts.

Pour les deux pieds, le gros orteil droit présente une phalange intacte; le gros orteil gauche, deux.

Mains

Cinq métacarpiens gauches et droits sont intacts. Pour le carpe droit on ne trouve que le scaphoïde et le similunaire; le reste manque. Pour le carpe gauche nous ne trouvons que l'os crochu, le scaphoïde et le pyramidal; le reste manque.

Quatorze phalanges, phalangines ou phalangettes [1571] sont conservées.

Côtes

Il n'y a que onze côtes à gauche dont sept sont fracturées vers la partie externe.

Il y a douze côtes à droite dont deux sont fracturées.

En résumé, d'après les données du squelette et principalement d'après la forme du bassin nous pouvons déduire qu'il s'agit en l'espèce d'un squelette de femme dans l'âge peut‑être de vingt‑trois à vingt-cinq ans et dont la taille devait être environ de un mètre soixante centimètres.

En foi de quoi nous avons signé le présent rapport que nous déclarons exact et conforme à la vérité.

Lisieux, le 11 août 1917.

Signatum: DE CORNIÈRE.

 [Examen du docteur Paul Loisnel].

I. [Nom et situation]:

[1572] Je m'appelle Paul Loisnel, né à Lisieux le 23 mai 1862, de Alexandre Loisnel et de Justine Ménard. Je suis docteur en médecine, résidant à Lisieux, 11 boulevard Duchesne‑Fournet; je suis chirurgien adjoint de l'hôpital de la ville.

II. [Interrogé sur le constat de l'exhumation, le docteur donne lecture de la relation suivante qu'il remettra au tribunal]:

Je soussigné Loisnel Paul, docteur en médecine de la Faculté de Paris, chirurgien adjoint de l'hôpital de Lisieux, médecin‑légiste, serment préalablement prêté sur les saints évangiles, en présence de monseigneur l'évêque de Bayeux et de messieurs les membres du tribunal ecclésiastique aux fins d'examiner les restes mortels de la soeur Thérèse de l'Enfant Jésus, me suis acquitté de la mission qui m'était confiée le 10 août 1917.

Le cercueil déposé dans la chapelle du cimetière, est ouvert. Il contient des os n'ayant conservé aucun rapport anatomique, mélangés à de la sciure de bois, des débris de planches, des morceaux d'étoffe noire (vestige du voile), d'une étoffe en drap brun et d'une autre en drap blanc. Avec soin et après examen minutieux de tout le contenu du cercueil, nous déposons les os sur une table spéciale, les nettoyons à l'alcool, puis procédons à la reconstitution du squelette en constituant des groupes anatomiques. Il est impossible de retrouver trace des parties molles

Tombe et restes de Soeur Thérèse

du cadavre (peau, tissu cellulo‑graisseux, [1573] aponévroses, muscles, nerfs, tendons, viscères et organes intra thoraciques et intra abdominaux). Les cheveux entourés de l'étoffe noire du voile sont agglutinés autour du crâne. De couleur châtain clair, presque blonds, ils mesurent de 8 à 10 centimètres de longueur Au milieu d'eux se trouvent un insecte coléoptère vivant, et le débris d'un autre insecte, puis une petite masse verte, brisée en plusieurs fragments auxquels adhèrent les cheveux, et qui est constituée par une épingle en cuivre oxydé.

Examen des os du squelette

A. ‑ Tous les os du crâne ont conservé leurs rapports anatomiques. Les sutures sont intactes, ne sont pas disjointes.

1° L'os frontal n'a subi aucune déformation, n'est le siège d'aucun trait de fracture; l'arcade orbitaire est particulièrement mince et presque tranchante. Le front est peu élevé.

2° L'ethmoïde, très friable, est relativement bien conservé. On observe intactes la partie antérieure de sa lame perpendiculaire, la lame criblée, les cellules ethmoïdales; les masses latérales seules ont subi la désagrégation de leur partie antérieure.

3° Le sphénoïde adhère bien aux os voisins. Les grandes ailes sont intactes, la face antérieure ou orbitaire de la grande aile très friable, présente à son centre une solution de continuité, avec perte d'un petit fragment de substance osseuse; l'extrémité inférieure de l'apophyse ptérygoïde, fracturée est absente.

4° L'occipital, en connexion parfaite avec les os voisins [1574] n'est le siège d'aucune fracture; sa table externe sur une étendue d'un centimètre carré environ, près de l'articulation occipito‑atloïdienne, a disparu. La bosse occipitale externe est peu saillante, les crêtes osseuses servant aux insertions musculaires sont peu accentuées.

5° Les deux temporaux sont intacts. Le gauche a la partie supérieure de sa portion écailleuse, détachée du pariétal sur une étendue de 5 à 6 centimètres. L'apophyse mastoïde est peu volumineuse. L'apophyse styloïde droite n'existe plus; le tiers inférieur de l'apophyse gauche a disparu, ses deux tiers supérieurs sont remarquables par leur faible épaisseur. L'intégrité des autres portions des temporaux est complète.

6° Les deux pariétaux sont intacts, en connexions parfaites avec les autres os.

B. ‑ Os de la face.

1° Le maxillaire supérieur gauche est intact. Le maxillaire supérieur droit est détaché, fracturé en son milieu, le sinus maxillaire séparé en deux parties, deux molaires sont sorties de leurs alvéoles mais retrouvées intactes; deux incisives supérieures sont détachées.

2° L'os malaire gauche est intact, adhérent à l'arcade zygomatique et à l'orbite. Le droit présente un trait de disjonction près de l'arcade zygomatique.

3° Les deux unguis, très minces, très friables, s'effritent sous la pression, de petites esquilles leur appartenant sont tombées dans l'orbite.

4° Os propres du nez: le gauche est intact. Le droit, perforé en son milieu, se détache facilement des os voisins.

5° Les os palatins, très amincis, ne résistent pas à une faible pression; ils sont disjoints sur la ligne médiane, [1575] leur bord postérieur a perdu de petits fragments.

6° Le vomer a été brisé en son milieu; ses deux tiers supérieurs ont disparu.

7° Dans les fosses nasales quelques lamelles osseuses, très minces, ramollies, mélangées à de la sciure bois, sont les vestiges des cornets.

8° Le maxillaire inférieur est bien conservé. Son ossification est complète et la ligne mentonnière solide. Les condyles articulaires sont intacts; les branches montantes sont normales; les saillies osseuses d'insertion musculaire sont peu développées. L'avant dernière molaire droite est absente: je n'ai pu la retrouver. Les deux canines s'inclinent en dedans et chevauchent légèrement sur les incisives. L'avant‑dernière molaire gauche a sa couronne cariée. Toutes les dents ont conservé leur fixité dans les alvéoles et n'ont aucune mobilité.

C. ‑ Région du cou.

Le seul os de la région, I'hyoïde, a disparu et n'a pu être retrouvé.

D. ‑ Thorax.

1° Le sternum a ses trois pièces ossifiées et en parfaite connexion. Au niveau de la poignée je constate l'intégrité des articulations sterno‑claviculaires droite et gauche, et des articulations costo‑sternales. L'appendice xiphoïde détaché du sternum n'a pu être retrouvé.

2° 23 côtes sur 24 ont été reconnues: 12 pour le côté droit et 11 pour le côté gauche. A droite deux d'entre elles sont fracturées au niveau de leur tiers antérieur; à gauche 7 côtes sont fracturées, 3 d'entre elles ne possèdent plus leur extrémi‑[1576]té antérieure.

Tous les cartilages costaux ont disparu.

E. ‑ Colonne vertébrale.

1° Région cervicale. Les 7 vertèbres composant la colonne cervicale s'offrent à notre examen. L'atlas, l'axis, sont absolument intacts, de même les 5e, 6e et 7e; les apophyses épineuses et transverses, les facettes articulaires ne sont le siège d'aucune fracture ou perte de substance osseuse; seule la 3e cervicale présente un trait de fracture, au niveau de son apophyse transverse gauche.

2° Région dorsale. Onze vertèbres, sur douze, composant la colonne dorsale, sont sous nos yeux. Ces onze os sont remarquables par leur état de conservation. Les corps vertébraux, les apophyses transverses épineuses, les facettes articulaires ne présentent aucune déformation ou solution de continuité. La vertèbre absente est la deuxième dorsale.

3° Région lombaire. La colonne lombaire qui se compose de cinq pièces est complète. A part la disparition de l'extrémité de l'apophyse transverse gauche de la 4e, je ne constate aucune perte de substance ou fracture des corps vertébraux ou apophyses. Caractère commun à toutes les vertèbres: l'ossification est complète.

F. ‑ 1° Sacrum. ‑ Cet os se compose de cinq fausses vertèbres soudées entre elles. Ces cinq pièces sont intactes. Leur ossification est complète. Sur sa face antérieure je constate que la ligne de suture de la l° et de la 2° pièce n'est pas complète, un sillon peu profond d'ailleurs les sépare. Les quatre trous sacrés antérieurs

Tombe et restes de Soeur Thérèse

sont normaux. Aucune solution [1577] de continuité résultant soit d'une fracture soit d'une perte de substance, n'existe à la surface de cet os. La crète sacrée postérieure est intacte, mais la saillie formée par la réunion des apophyses épineuses est peu développée. Les apophyses articulaires du sacrum sont bien conservées, même constatation relative aux facettes articulaires sacro‑iliaques.

2° Coccyx. ‑ Un fragment de la première pièce adhère seule au sacrum; les 3 autres pièces n'ont pu être retrouvées; la première pièce se détache facilement.

3° Os iliaques. ‑ Chaque os iliaque se compose de la réunion du pubis, de l'ilion, de l'ischion, leur point de jonction centrale est le fond de la cavité cotyloïde. Les deux os iliaques que nous examinons sont intacts et leurs lignes de suture, bien apparentes, se réunissent en Y au fond de la cavité ci‑dessus nommée. L'ossification est complète. Je ne constate aucune perte de substance ou fracture de ces os. Pour reconstituer le bassin osseux, nous réunissons le sacrum aux os iliaques, et nous remarquons que les fosses iliaques sont larges, plus étalées, moins concaves que celles présentées par les pièces d'un sujet masculin, que le trou obturateur a une forme triangulaire, enfin la mensuration des différents diamètres du bassin nous donne les chiffres suivants:

Diamètre antéro‑postérieur 12 cm. 8. Diamètre transverse 13 cm. 5. Diamètre oblique 14 cm. 5.

Cette mensuration, jointe à la conformation générale du grand et du petit bassin, constitue un élément précieux de diagnostic pour la détermination du sexe.

G. ‑ Membres supérieurs.

[1578] 1° Les deux clavicules dont l'ossification est complète sont grêles, et ne présentent aucune déformation ou solution de continuité.

2° Omoplates. ‑ Ces deux os ont un caractère commun: leur très faible épaisseur au niveau des fosses sur et sous‑épineuses.

L'épine ‑ I'acromion ‑ l'apophyse coracoïde ‑ la cavité glénoïde sont normales, de même leurs bords interne et externe sont intacts.

Au niveau du tiers inférieur de la fosse sous‑épineuse, existe sur l'omoplate droite une solution de continuité, une perte de substance complète formant un trou à bords irréguliers mesurant deux centimètres de hauteur, et 1cm. à 1 cm.1/2 de largeur. A gauche, la même perte de substance se présente à 1 centimètre et demi au‑dessus de la pointe de l'os, mais est de dimensions un peu plus restreintes

3° Humérus. ‑ Les humérus droit et gauche ont leur ossification complète. Les lignes de suture des épiphyses sont apparentes, mais l'union est solide; il est impossible d'obtenir de force la disjonction éphiphysaire. Si ces os sont peu volumineux (ils mesurent à la partie médiane de la diaphyse 18 millimètres), ils ont une structure normale et ne présentent aucune malformation, déformation, fracture, à part une petite perte de substance osseuse au niveau de la face postérieure de l'épicondyle (humérus droit). Au niveau du col anatomique, partie supérieure, la ligne de suture de la tête de l'os gauche, présente un petit sillon; en ce point (1 cm. 1/2) la suture est incomplète. La longueur des deux humérus est de 30 centimètres, 5 mm.

 [1579] 4° Cubitus. ‑ Cubitus droit: ossification complète, lignes épiphysaires apparentes, sutures solides; l'olécrane, l'apophyse coronoïde, la diaphyse sont intactes. L'extrémité inférieure de l'os s'est détachée à 1 cm. 1/2 environ de 1'ex­trémité de l'apophyse styloïde et n'a pu être retrouvée; la surface de section est inégale et siège au dessous de la ligne épiphysaire; la perte de substance est due à la mortification du tissu osseux.

Le cubitus gauche, bien conformé, est intact; il mesure 22 centimètres et demi de longueur.

Caractère commun aux deux cubitus: ces os sont grêles.

5° Radius. ‑ Ossification complète, et soudures épiphysaires complètes sur les deux os. Ils mesurent 21 centimètres de longueur. Le radius droit, au niveau de son col présente une section irrégulière,   la tête a disparu; sa diaphyse et son ex­trémité inférieure (apophyse styloïde) sont normales et intactes. Le radius gauche ne présente aucune déformation ou perte de substance.

6° Os du carpe. ‑ Deux rangées de petits os, au nombre de 8, constituent le carpe.           Pour le poignet droit nous ne pouvons retrouver et reconnaître que quatre os: le scaphoïde, le semilunaire, le grand os, I'os crochu. Deux os carpiens (le scaphoïde et le pyramidal) sont seuls retrouvés et reconnus comme appartenant au poignet gauche.

7° Métacarpiens. ‑ Cinq métacarpiens constituent la première partie du squelette de la main. Nous retrouvons intacts les cinq métacarpiens de la main droite et de la main gauche.

8° Le squelette des doigts est constitué par 5 phalanges, [1580] 4 phalangines et 5 phalangettes (le pouce n'a qu'une phalange et une phalangette).

Nous n'avons pu trouver et reconnaître que 7 premières phalanges, 4 pour la main droite, et 3 pour la main gauche. Quatorze autres petits os plus ou moins altérés ont été classés comme appartenant au squelette des doigts, mais n'ont pu être identifiés séparément.

H. ‑ Membres inférieurs.

1° Les deux fémurs mesurent 44 centimètres de longueur; le diamètre de leur dyaphyse à la partie moyenne est de 26 millimètres. Normalement conformés, ces os présentent les caractères communs suivants: tête fémorale intacte avec la fossette d'insertion du ligament rond, col intact, oblique, ossification complète, lignes épiphysaires apparentes, soudure complète, grand et petit trochanter peu volumineux; la ligne âpre de la face postérieure est bien apparente, mais peu saillante et non rugueuse.

2° Les deux rotules sont intactes, leur ossification est complète.

3° Tibias. ‑ Le tibia droit mesure 35 centimètres de longueur; le gauche 34 cm., 8. Ces deux os, bien ossifiés, à soudures épiphysaires apparentes mais solides, se présentent avec une conformation des surfaces articulaires normales; ils ne sont le siège d'aucune fracture, mais leur face antérieure et externe est rugueuse, inégale par suite de la destruction de  couches de lamelles osseuses, superficielles.

4° Péroné. ‑ Le péroné droit mesure 34 cm., 5; le gauche 34 cm., 3. Ces deux

Tombe et restes de Soeur Thérèse

os sont complets, bien ossifiés, sans déformation, sans solution de continuité; leur caractè‑[1581]res anatomiques sont conservés. Ils sont grêles, mais la faiblesse de leur épaisseur est due à la destruction, sur toutes leurs faces, de lamelles osseuses superficielles

5° Os du tarse. ‑ Sept os constituent le massif osseux du tarse.

Nous retrouvons intacts, sans solution de continuité, bien conformés et ossifiés, exempts de fracture, de perte de substance, pour le pied droit: le calcaneum, l'astragale, le scaphoïde, le cuboïde; pour le pied gauche: le calcaneum, I'astragale, le scaphoïde, le cuboïde. Pour les deux pieds il nous faudrait être en présence de six os cunéiformes, nous n'avons pu retrouver que quatre de ces os; les légères déformations de leurs parties saillantes, quelques pertes de substance au niveau des surfaces articulaires ont fait perdre à ces os leur aspect normal; nous n'avons pu les classer et en désigner la situation topographique précise.

6° Les cinq métartasiens du pied droit et du pied gauche sont trouvés et reconnus. A part une légère perte de substance au niveau de leur surface articulaire métatarso‑phalangienne, ces os sont intacts.

7° Les phalanges et les phalangines n'ont pu être déterminées.

En résumé, les pièces anatomiques du squelette qui font défaut sont en petit nombre, et la conservation des os est presque intégrale.

Les constatations faites vont nous permettre de déterminer: le sexe, l'âge, la taille approximative du sujet examiné.

[1582] A. ‑ Détermination du sexe

Sur le sujet entier, squelette et parties molles intacts, la détermination est facile; lorsqu'il n'existe plus qu'un squelette dénudé, la solution présente des difficultés, et ses éléments doivent être tirés de l'examen du bassin, du crâne, du thorax.

L'examen des os du bassin nous a montré des os osiliaques étalés, larges, un petit bassin dont la mensuration nous a donné les diamètres et démontré l'amplitude, des trous obturateurs triangulaires, des os bien conformés sans doute, mais peu volumineux, peu épais. Le bassin est la partie du squelette qui nous fournit le signe le plus précieux du diagnostic, et celui que nous avons sous les yeux présente les caractères du bassin féminin. Au cours de la rédaction de ce rapport, j'ai signalé: l'apparence plus grêle des os, les crètes d'insertion musculaire peu accentuées, les apophyses mastoïdes peu développées, la minceur extrême de l'apophyse styloïde gauche, les arcades orbitaires minces et presque tranchantes, etc., etc. Sans doute, chaque constatation ne constitue qu'une nuance, mais l'union de ces caractères constitue des signes de présomption encore favorables au diagnostic.

La conformation du thorax, lorsque les côtes adhèrent aux vertèbres, constituent encore un signe précieux; chez l'homme le thorax a une forme conoïde, chez la femme la forme est plutôt ovoïde; dans sa partie supérieure le thorax est plus large chez les femmes. Nos constatations anatomiques ne nous autorisent pas, dans le cas présent, à poser des conclusions s'appuyant sur les caractères de la cage thoracique.

[1583] B. ‑ Détermination de l'âge

Nous devons encore emprunter au squelette les éléments d'évaluation approximative. Nous avons parlé de l'ossification de chaque os, de ses lignes épiphysaires, de ses sutures. Sans rappeler les caractères propres à chacun d'eux, nous disons qu'en général le développement du squelette est celui de la période qui s'écoule de la 20e à la 25e année.

C. ‑ Détermination de la taille

Le squelette doit encore seul nous fournir les éléments de la solution du problème.

Nous savons que pour avoir la taille approximative d'un sujet, il faut multiplier la longueur des os longs du membre supérieur par un des coëfficients indiqués par Rollet et Manouvrier; on obtient la taille moyenne. On cherche ensuite la taille moyenne par les os du membre inférieur; on additionne ces deux résultats et on prend la moyenne.. Nous dressons donc le tableau suivant44 35 34,5 30,5 21 22,5

Longueur de os               Coëfficients de Rollet

Fémur  Tibia  Péroné  Humerus  Radius Cubitus

et

Manouvrier    

3,71

4,61

4,66    

5,22    

7,16    

6,66

Après avoir fait les opérations relatives à chaque os des membres supérieurs et inférieurs, pris les moyennes de chaque résultat, et pris la moyenne de ces derniers, nous trouvons: 1 m., 59 à 1 m., 60. Cette moyenne générale de 1 m., 59 que nous trouvons comme étant la taille du sujet examiné, ne constitue pas une mesure rigoureusement exacte, elle n'indique qu'une moyenne approximative.

[1584] Conclusions

1° Le squelette examiné est celui d'un être humain, du sexe féminin.

2° L'âge exact du sujet ne peut être très exactement déterminé: les caractères anatomiques des pièces observées sont ceux d'un être dont l'âge est compris entre la 20e et la 25e année.

3° La taille approximative est de 1 m., 59 à 1 m., 60.

En foi de quoi j'ai rédigé le présent rapport dont j'affirme le contenu sincère et véritable.

Signatum: Docteur PAUL Loisnel

Lisieux, le 10 août mil neuf cent dix sept.