Lettre de Mme Martin CF 74 A son frère Isidore Guérin 26 novembre 1871. Je prendrai le train pour Lisieux, dimanche, à trois heures et demie du matin. J'ai cherché à m'arranger d'une autre manière, mais je n'en vois pas de meilleure. Il m'est impossible, cette fois, de partir samedi, et le dimanche, je ne puis voyager toute une matinée, ce serait contraire à mes principes, car je trouve qu'on doit faire une grande attention à ne pas coopérer au travail du dimanche. Il faudra cependant que je revienne le mardi matin; je ne pourrai rester davantage. J'ai toujours des commandes pressées, je ne puis m'en tirer. Je ne voulais plus continuer les affaires actuellement, et j'y suis forcée tant on me fait d'instances. Enfin, le principal est que nous nous voyions. On a encore le temps de se parler pendant deux jours. Aussi vais‑je terminer ma lettre de suite, je veux garder tout ce que j'ai à vous dire pour la semaine prochaine. J'ai encore de la peine à croire que je partirai, il se trouvera peut‑être de nouveaux empêchements, je ne me croirai en route que lorsque je serai dans le train. Je désire pourtant qu'il ne se présente pas d'obstacles, parce que, si je ne profite pas de ce moment de répit, la partie sera remise je ne sais à quand. Afin d'arriver à partir dimanche, je travaille depuis huit jours jusqu'à minuit, aussi, je compte expédier ma pièce de Point d'Alençon vendredi soir. Je te recommande de ne pas faire de folies pour les étrennes, j'en aurais tant de peine ! Ne le feriez‑vous que pour me plaire, le motif serait suffisant, car je sais que vous êtes trop généreux d'habitude. Cela me contrarie de t'avoir fait porter sept mille francs sur le billet, tu as déjà trop de rentes à servir. Aussi, je suis bien décidée à ne pas accepter d'intérêts pour cette somme‑là.