Carmel
De Mme Martin à Louis Martin CF 179 – 24 décembre 1876.

DE  
GUÉRIN Zélie, Madame Louis Martin
À 
MARTIN Louis

24/12/1876

 
Lettre de Mme Martin CF 179
 A  Monsieur Martin
24 décembre 1876.
Mon cher Louis,
Je suis arrivée hier soir à Lisieux, à quatre heures et demie.  Mon frère m'attendait avec une voiture, où j'ai trouvé une bonne chaufferette. En arrivant chez lui, j'ai vu Mme Fournet, M. et Mme Maudelonde, qui m'ont fait le meilleur accueil.
Après le dîner, j'ai fait tout mon possible pour dérider mon frère et lui rendre un peu de courage; il m'a beaucoup parlé de M. Vital, qui lui avait écrit, le même jour, lui racontant la consultation du docteur X. et le conjurant d'agir énergiquement et de me conduire à Paris. J'aurais bien voulu voir cette lettre, on me l'a refusée.
Enfin, cette nuit, j'ai parfaitement dormi, contre mon attente, mais j'étais fatiguée du voyage. Le médecin est arrivé ce matin, à huit heures et demie; il a bien examiné le mal et a dit qu'il était tout à fait de l'avis du docteur X., que l'opération n'était pas nécessaire, que ce serait une grande maladresse de l'essayer. Il a ordonné des pilules et je ne sais quoi encore. Maintenant, mon frère est bien fixé et ne veut plus m'emmener à Paris.
Le docteur Notta trouve très regrettable que, dès le début, on n'ait pas fait l'opération, mais à présent il est trop tard.
| Cependant, il a l'air de dire que je puis aller très longtemps comme cela. Ainsi, remettons‑nous entre les mains du bon Dieu, il sait bien mieux que nous ce qu'il nous faut: « C'est lui qui fait la plaie et qui la bande. » J'irai à Lourdes, au premier pèlerinage, et j'espère que la Sainte Vierge me guérira, si cela est nécessaire. En attendant, tranquillisons-­nous.
Je me réjouis beaucoup de vous revoir tous; que le temps me paraît long ! Que j'aurais bien voulu revenir aujourd'hui ! Je ne me plais qu'avec toi, mon cher Louis.
Il faut que je termine, car voilà l'heure du souper, et M. et Mme Fournet vont y prendre part. Je viens de passer avec toi le meilleur moment de ma journée, car je m'ennuie un peu d'aller faire des visites et d'en recevoir, mais cela  ne va pas durer longtemps.
 Je vais aller à la Messe de minuit avec mon frère; Mme Maudelonde y vient aussi, pour la première fois de sa vie.
I1 faut pourtant que je finisse, mais je regrette bien le papier qui me reste en blanc, qu'est‑ce que je te dirais donc bien encore ?
Je pars mardi matin, à neuf heures et demie, pour arriver à Alençon à une heure quarante.
Je vous embrasse tous. Adieu.

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