Carmel

Le pain d'autel

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Les soeurs fabriquaient du pain d'autel : ce pain sans levain, utilisé au cours de la messe pour devenir l'hostie. C'est une sorte de petite gaufre très plate dont voici la recette d'époque.

Recette de pain d'autel

On délaie peu à peu avec de l'eau la farine qui doit être belle, de blé nouveau et toute fraîche moulue. L'eau dont on doit se servir doit être la plus vive et la plus dure possible telle que l'eau de source, fontaine ou puis, l'eau de pluie ne peut servir. Quand la farine est bien délayée on en met une cuillérée environ dans le fer qu'on met ensuite sur le feu, le temps de la cuisson est d'un Ave Maria de chaque côté quand le feu est bien conditionné ; car si le feu n'était pas bien embrasé il faudrait plus de temps ; et s'il l'est trop il faut retirer son fer plus promptement sur le bord du fourneau et ne l'ouvrir que quand il ne fume plus. Pour le feu le charbon est préférable au bois la chaleur étant plus égale. Les pains sont plus beaux. Les temps de grande chaleur sont peu favorables pour la confection des pains on les fait de préférence et plus facilement au printemps et en hiver.

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Ce mélange est cuit sur le gaz entre deux plaques de fer qu'on appelle fer à hosties, comme celui qui est utilisé dans la photo de droite par Marie du Sacré-Coeur. Ces fers comportent des reliefs en creux qui s'impriment sur le pain au moment de la cuisson : monogrammes IHS et IHC ou des scènes de la Passion du Christ, comme on peut le voir d'un autre modèle de fer de l'époque sur la photo ci-dessous. On y distingue le relief pour des grandes et petites hosties. Les chutes lors de la découpe dont vendues comme rognures.

Manière de polir les fers neufs ou qui ont été travaillés

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Il est parfois difficile de bien faire le pain avec les fers neufs ou travaillés – quand cela arrive et qu'il ont quelque chose de brutes, il faut les frotter en tous sens avec du papier verré, puis prendre de la brique battue et tamisée et avec un chiffon de laine et un peu d'eau les bien frotter – ensuite on les frotte de nouveau avec du tripoli sec, quelques fois il faut y revenir 3 ou 4 heures en diverses fois et même plus – après qu'on les a frottés on les fait chauffer afin de voir comment ils font le pain (note d'époque)

Cuisson

Au Carmel de Lisieux une pièce sous le cloître était spécialement destinée à la fabrication et à la cuisson des hosties : l'office des pains d'autel.   Il y avait une arrivée d'eau et de gaz pour cela. Les sœurs s'y succédaient, au jour de cuisson, ce qui leur faisaient parfois manquer des moments où la communauté était réunie.
On écure le fer avec de la brique écrasée bien fine et passée au tamis en mettant aussi un peu d'huile d'olive sur le fer avec une plume. Quand la farine est bonne on peut quelquefois aller plusieurs jours sans écurer le fer ; mais quand elle se relâche il faut l'écurer tous les jours et souvent deux fois. Il est plus facile de l'écurer chaud que froid. Outre cela en travaillant quand le fer se blanchi, que le pain se fait noir et brouillé il faut le graisser avec un peu de suif. Les premiers pains que l'on fait après que le fer a été ainsi graissé ne sont bons que pour les petits veaux (note d'époque).

Découpe

Une fois cuit, le pain d'autel est séché puis découpé avec un petit outil nommé rondeau, qu'on voit sur la photo ci-dessous à gauche dans la main de Mère Agnès qui découpe de petites hosties destinées aux fidèles participant à la messe. Ci-dessous à droite, c'est la main de Céline qui découpe de grandes hosties destinées au prêtre célébrant la messe.

La découpe des hosties est une opération délicate qui, mal faite, peut ruiner tout le travail en effritant le pain. Comme le précise le manuel d'instruction du temps, les pains où il y a beaucoup de dessins sont bien plus difficiles à réussir parce que plus il y a de gravures plus ils sont susceptibles d'écorcher.

Vente à l'accueil et à l'extérieur

emballage hosties

Le pain d'autel une fois découpé est déposé dans des petites boîtes de carton pour la vente. Thérèse y prend des hosties pour remplir le ciboire en vue d'une prochaine messe. Cela fait partie de sa tâche de sacristine.

Le pain d'autel destiné à la vente est emballé et déposé au tour pour les personnes qui se présenteront à l'accueil du monastère. Malgré les dépenses de farine, de matériel de cuisson et de gaz, la vente de ce pain d'autel rapporte près de 1600 francs par an les dernières années de la vie de Thérèse.