Carmel

Billets à Mère Agnès

66 courts billets, de 1905 à 1943

1. Mai 1905.

Bienaimée petite Mère, j'ai trouvé le beau passage des Actes des apôtres où St Paul disait aux Athéniens « que l'homme cherche Dieu et s'efforce de le trouver comme à tâtons. » Act 17, 27 Alors j'ai pensé que nous étions de pauvres aveugles qui accomplissent comme à tâtons des oeuvres de lumière. Ah ! qu'estil surprenant qu'elles soient si défectueuses ! Je m'étonne même qu'on ne fasse pas plus de bêtises travaillant dans un corps si opaque !... Voilà bien la raison pourquoi le bon Dieu est si indulgent pour nous et qu'Il est même si touché de nos tâtonnements, de nos pauvres efforts pour le trouver. Soyez sûre qu'Il jugera nos actions comme ayant été faites par de pauvres aveugles, ce qui les fera passer pour des merveilles !...

Votre petite fille qui malgré son langage de poupée [On va souvent retrouver, dans cette série de billets, l'appellation de « poupée ·, surnom que Thérèse avait un jour donné à sa novice, à cause de sa figure d'enfant; cf. LT 236 et 249; CJ 22.9.4; CSM n° 56 (cité en VT n° 77)] sait se faire comprendre de la plus aimée des petites Mères.

2. 16 juin 1905

2 - Ma petite Mère [Mère Agnès a été réélue prieure le 6 mai précédent, et se trouve alors en grande retraite. Elle profite de ces jours de recueillement pour écrire son premier cahier autobiographique; elle le détruira en 1932, après n'en avoir recopié que quelques extraits (cf. DE, p.65). Marie de la Trinité, pour sa part, compte aujourd'hui 11 ans de Carmel (à Lisieux)],

il y a aujourd'hui onze ans que pour la première fois vous m'avez serrée dans vos bras, que vous m'avez reçue et adoptée avec tant de charité et d'amour. Depuis ce temps ma reconnaissance et mon affection pour vous ont grandi chaque jour, je finis par croire que si cela continue, j'atteindrai la même force d'aimer que le bon Dieu. Je me demande quelquefois comment Il peut vous aimer plus que moi, car après tout, s'Il vous donne plus de marques d'amour, c'est uniquement parce qu'Il en a les moyens et qu'Il est plus puissant...

Combien votre petit mot, Mère chérie, m'a fait du bien et surtout plaisir ! Oui, mais ... vous devez comprendre qu'il est plus facile de se gêner pour faire plaisir à sa petite Mère que l'on voit et que l'on aime, que de travailler à sa perfection, chose si ardue et si coûteuse; la preuve, c'est que depuis le temps que j'y travaille sérieusement et avec application, je n'y suis pas encore arrivée et même je ne vois pas que j'aie fait seulement quelques progrès. Non, transformer en un rien de temps une écritoire pour faire plaisir à ma petite Mère, c'est un jeu, une vraie jouissance; mais pour me trans­former moimême, je vois bien que je n'y arriverai jamais, ce sera l'oeuvre du bon Dieu tout seul aidé de petite Thérèse. Tout ce qui est en mon pouvoir c'est de me laisser faire, de lever toujours mon petit pied pour essayer de monter l'escalier, de jeter vers le bon Dieu mes cris impuissants, de lui tendre mes petits bras, jusqu'à ce que, pris de pitié, Il descende Luimême pour m'emporter à jamais avec Lui et me remette dans les bras de petite Thérèse, place que doit avoir sa poupée.

Violette m'annonce un petit boni pour ma fête et comme vous m'avez permis d'acheter un Crampon, j'ai dit à ma soeur Marie-Ange de me le faire apporter par son frère qui doit venir; cela évitera un port. Aije bien fait ? [Eclaircissements: Violette Castel, l'une des soeurs de Marie de la Trinité, lui propose un cadeau de fête (Sainte Trinité, 18 juin). La carmélite demande « un Crampon », sans doute un Nouveau Testament. L'abbé Burban, frère de la jeune soeur MarieAnge, servira d'intermédiaire à son prochain voyage à Lisieux]

Je vais tâcher de vous trouver encore de la bonne nourriture dans St J.Chrysostome, vous en avez besoin pour, après cela, nourrir tous vos enfants dont je suis une des plus gourmandes, mais tout de même pas autant que la grosse Geneviève qui dévorerait bien sa part et celle des autres si on la laissait faire. La « grosse Geneviève » (qui serait bien humiliée du qualificatif) essaie de « regagner un peu »  l'affection de sa soeur—qui n'en fut jamais très prodigue à son égard au Carmel—: ces données ressortent de la correspondance d'alors].

Votre petite fille Marie de la Trinité

3. 18 juin 1905.

Ma bienaimée petite Mère, Je n'ai pas de chance aujourd'hui pour ma fête. Ce matin, au lieu d'aller chanter avec vous la Ste Trinité, il m'a fallu être témoin des grimaces affreuses et des contor­sions de ma Sr St Stanislas « qu'on ne croit pas si malade qu'elle est, dont la décomposition du sang est très avancée, sa paralysie gagne même déjà le cerveau », et bien d'autres maux trop longs à énumérer... En fait, il est très probable que la bonne vieille soeur SaintStanislas (81 ans; vivra encore neuf ans) était ce « dia­mant si beau » dont Marie de la Trinité avait hérité l'année précédente en recevant l'emploi d'aideinfirmière; Puis il m'a fallu entendre les jérémiades de ma Sr Marie de l'Incarnation que j'ai trouvée à moitié morte d'exaspération auprès des loges de ses pigeons parce qu' « ils sont tous découplés et en désarroi; jamais il n'y a eu tant de désordres dans leurs familles, il y en a un qui a péri par la foudre, ça va être une couvée de perdue, parce que sa petite femme ne peut pas y suffire toute seule ! »   Bref, elle va être obligée de les enfermer tous demain dans leurs cases respectives pour rétablir l'ordre, ( à cette époque, la bassecour compte 120 bêtes: poules, lapins, pigeons).

Avec tout cela je n'ai pu trouver une minute pour vous dire, Mère chérie, tout le plaisir que m'a causé votre joli petit mot. Ah ! il m'a été plus droit au coeur que les belles phrases de la bonne soeur de la Providence...

On voit bien, ma petite Mère, que vous êtes faite à l'image du bon Dieu. Je crois même que sur toute la terre c'est vous qui lui res­semblez le plus; je vous trouve si miséricordieuse qu'il me semble que le bon Dieu ne peut l'être davantage. Ainsi, vous voulez bien me laisser dire toujours à propos de mes « balais de malice »   « Y'en a pu mais qu'un ! »

Monsieur l'Abbé (L'abbé Victor Chêné, alors aumônier du Carmel et très aimé des soeurs de Thérèse.) Sous leur allure cocasse, les phrases qui suivent laissent percevoir certaines souffrances de la vie cloîtrée: toutes les soeurs ne s'accommodaient pas également du confesseur habituel... (Thérèse en fit ellemême l'expérience); est loin d'adopter cette devise, il voudrait m'entendre dire: « Y'en a pu mais du tout ! » Oui mais, il mourra dans son désir, parce que c'est une chose qui n'arrivera jamais. Il est pourtant bien fait, lui aussi, à la ressemblance du bon Dieu, mais je ne sais pas, ce n'est pas tout à fait comme vous. Après tout, ce n'est pas étonnant: estce que les hommes s'y connaissent en poupées !...

Ce n'est pas parce que Thérèse me protège et prend ma défense qu'il faut vous trouver balayée, ma petite Mère. Non, non, ce qu'elle vous a dit n'était que l'écho de votre coeur . Ce qui est balayé, comme vous le dites si bien, c'est mon orgueil, mon amourpropre, mes vilains défauts. Eh bien, cela ne vautil pas bien la peine de se servir de balais de temps en temps pour une oeuvre aussi utile !...

Je compte bien avoir encore un petit mot de vous, celui de ma fête doit être en plus ? Je vous en prie, faitesmoi encore ce petit plaisirlà.

Votre petite fille.

4. 7 septembre 1905.

 Ma petite Mère chérie, Pour cadeau de votre Anniversaire je viens vous dire que ma dent est complètement guérie. Je n'en reviens pas moimême ! c'est comme si je n'y avais jamais eu mal. Eh bien, ce miracle (car c'en est un !) a été accordé à votre foi et non pas à la mienne qui était si imparfaite parce que je n'osais croire qu'une dent qui me faisait tant souffrir pût si subitement se guérir. Je ne peux pas vous dire le bienêtre que cela m'a fait éprouver. Parler, manger ne me gêne plus du tout, et même l'air qui m'était si douloureux je ne m'en aperçois plus maintenant. Qu'on dise tout ce qu'on voudra, mais il y a quelque chose de pas ordinaire làdedans. Tout simplement, petite Thérèse voulant faire plaisir à sa petite Mère a remis en bon état la dent de sa poupée ! Etesvous contente à présent, et direzvous encore qu'elle ne vous écoute jamais? Pour moi, elle a été vivement piquée de votre blasphème et a mis tout en oeuvre pour vous le faire rétracter au plus vite, ne pouvant souffrir qu'il y ait une dent contre elle...

Bien chère petite Mère, votre direction d'hier m'a fait beaucoup, beaucoup de bien. Je fais tous mes efforts pour avoir cet extérieur parfait que vous voudriez tant voir en moi. Ce matin en me réveillant je pensais à Anna qui avait tant de mal autour de sa petite Andrée, s'en occupant sans cesse jour et nuit sans compter avec la fatigue. Alors je me suis dit que je ne devais pas moins faire pour l'Enfant­-Jésus vivant dans mon âme et attendant de mes soins et de mon amour la vie et le développement. Lui aussi est un enfant exigeant, cons­tamment il veut qu'on s'occupe de lui, qu'on lui donne à manger, qu'on le fasse jouer, qu'on le fasse marcher. Je contenterai tous ses caprices par une vigilante attention à faire tout ce qu'il me demande, exécutant jusque dans les plus minutieux détails toutes les cérémonies du Choeur, toutes les petites choses qui nous sont recommandées.

Comme la petite Andrée, Il dort aussi très peu et ne veut pas me laisser de repos parce qu'Il ne peut marcher, faire des progrès sans mon concours. Aussi je Lui ai promis de bien m'occuper de Lui et désormais je ne veux plus être distraite par autre chose.

Votre petite fille Marie de la Trinité r.c.i.

5. 21   janvier 1906.

A ma Mère chérie.
« Un cheveu de sa bienaimée
Ravissait le coeur de l'époux. »
Ce souvenir m'a tant charmée
Que j'ai fait ce travail bien doux.
Ainsi les amis de Thérèse
Pourront s'orner de ses cheveux
Et par eux ravir à leur aise
Le coeur aimant du Roi des cieux.

[Marie de la Trinité — qui cite le Cantique des cantiques 4,9 — a confectionné des sachets ou reliquaires de cheveux de Thérèse comme cadeau de fête pour la SainteAgnès . Elle les présente avec un compliment en vers].

6 - avril 1906.

Ma petite Mère chérie, Mon âme est toute épanouie de vous avoir vue aujourd'hui (Marie de la Trinité est en grande retraite; Mère Agnès l'a reçue en direction.) il me semble que j'ai passé un petit moment dans le ciel, je ne vous ai pas dit grand chose car je suis impuissante à exprimer les sentiments de reconnaissance qui débordent de mon coeur envers les miséricordes infinies du Seigneur, mais je sens que vous me comprenez sans que j'aie besoin d'en dire long, en cela vous montrez bien que vous êtes faite à l'image du bon Dieu.

Pendant Complies j'avais devant moi au Chapitre la sentence: « Si vous ne faites pénitence, vous tomberez aux mains du Seigneur. « Ah ! j'ai dit: voilà mon affaire ! Je tomberai certainement dans les mains du Seigneur car je ne fais pas pénitence ! Je n'appelle pas faire pénitence de souffrir pour Jésus que j'aime tant. Je trouve au contraire qu'il n'y a pas de délices comparables à cela...

La poupée de Thérèse et de petite Mère.

7.   13 avril 1906.   Extraits.

Vendredi saint 1906.

Ma petite Mère chérie, J'ai le coeur si plein de votre beau chapitre que je ne peux pas m'empêcher de vous l'écrire. Oh ! que je voudrais donc aimer Jésus comme Il m'a aimée, lui amener toutes les âmes qu'Il a achetées au prix de tant d'amour et me tenir toujours debout devant lui pour le défendre au prix de mon sang de la haine de tous ses persécuteurs. Nous le garderons, nous aussi, mais nous nous lèverons pour le garder, nous serons debout pour le défendre, lui faisant comme un rempart de nos corps, c'estàdire immolant nos vies avec la sienne (...). Plus nous le verrons persécuté, serré de près par ses ennemis, de plus près nous le serrerons nousmêmes par une union chaque jour plus intime avec Lui, de sorte qu'il n'arrive jamais qu'une flèche puisse l'atteindre sans nous atteindre d'abord et s'être comme émoussée à notre propre coeur ». (1er carnet des Exhortations de Mère Agnès de Jésus, au Chapitre 19021908, p. 106; copie faite de la main de soeur Marie de la Trinité.). Mère Agnès, alors très affectée d'un écrit blasphématoire: « Ce que Dieu fait et ce qu'il ne fait pas », s'appliquera à le réfuter pendant sa retraite par un long poème « Que notre Dieu est bon pour ceux qui ont le coeur droit » (14 juin 1906)].

Je veux redoubler de fidélité pour qu'il en soit ainsi et mettre toute ma joie à profiter des occasions multiples qui se présenteront afin de prouver à Jésus que mon amour pour lui est bien réel...

Hier, pendant que je chantais les Ténèbres de tout mon coeur, Je me suis rappelé avec grande consolation ce que notre petite soeur Th. de l'Enfant Jésus me disait quelques jours après mon entrée (Suit ici le trait cité en VT, n. 77: CSM n° 32] (...)

Ce souvenir m'a été très doux, aussi j'ai redoublé de ferveur dans mon chant disant à ma petite Thérèse: « C'est pour nous deux que je chante encore, je veux que ce soit une chose convenue pour tou­jours; donnemoi ton amour pour que mon chant plaise à Jésus et moi je t'abandonne les mérites de mes fatigues à l'Office divin. » Vous comprenez maintenant, ma petite Mère, pourquoi je n'épargne pas ma voix au Choeur: c'est qu'ayant à chanter pour deux, il faut aussi que je double mes efforts. Hélas! je réussis si mal que plusieurs m'ont dit que je chantais trop fort, que ma voix était forcée. Ceci est une vérité qui me fait rager intérieurement et me donne presque des impa­tiences de voir que ma voix ne peut répondre à mon ardeur. Car c'est jusqu'aux extrémités de la terre que je voudrais avoir la puissance de faire entendre les louanges du bon Dieu !

Ma petite Mère chérie, vous devez reconnaître là mon ardente nature qui fait souvent contraste avec mon caractère enfant. Eh bien oui, ces deux extrêmes se trouvent en moi. Tenez, pour en prendre une preuve dans l'Office même d'hier où des pensées si sérieuses occupaient mon âme, figurezvous que c'était pour moi un vrai plaisir quand je devais aller éteindre un cierge à la fin des Psaumes. Cela m'amusait, et je n'aurais pas cédé ma place à une autre sans sacri­fice (L'office solennel des Jours Saints, dit des Ténèbres (célébré vers 16 h). s'accompagnait alors d'un rite particulier: on disposait dans le choeur un grand chandelier triangulaire de 15 cierges. Une soeur allait en éteindre un après chaque psaume: neuf pour Matines, cinq pour Landes, et celui du Cantique Benedictus.)

Cela me rappelle un souvenir d'intimité avec ma petite soeur Th. de l'EnfantJ. (Suit ici l'histoire du ballon rouge, publiée en DE, 782 s. Voir également CSM. n° 57, cité en VT, n. 77])(...) Pour le coup, ma petite Mère, c'est une vraie lettre de poupée que je vous écris, il n'y a que vous qui me connaissez à fond qui pouvez la lire et la comprendre. Je compte bien que vous allez venir m'embrasser pour ma peine de vous avoir distraite quelques minutes ou sans cela vous aurez besoin de la magique échelle pour remonter la poupée..

8. Juin 1906.

Ma petite Mère chérie, je suis bien privée que vous soyez en Retraite, j'aurais été si contente de vous raconter en détails les Noces d'Or (Noces d'or de ses parents, mariés le 29 mai 1856; cf. VT, n° 72, p. 296.— « Gab » dont il va être question est sa soeur Gabrielle, religieuse à la Providence de Lisieux, soeur SainteScholastique).

C'est trop long pour vous les écrire tous; enfin, le peu que j'ai pu vous en dire a pu vous en donner une petite idée. Gab. m'a dit que Papa aimait de plus en plus son cher Carmel. Quand elle lui a dit qu'elle nous avait acheté des gâteaux en son nom afin qu'on participe à la fête, aussitôt ses yeux se sont remplis de larmes et la remerciant avec effusion il lui a dit: « Tu ne pouvais pas nous offrir de cadeau qui nous fît plus de plaisir ! Ah ! ces chères carmélites, comme je les porte dans mon coeur !... » Le bon vieillard à barbe blanche que vous avez vu sur la photo est un ancien et saint Frère directeur de la Maîtrise, de l'âge de Papa. Au dessert, il a pris Papa par le bras en lui disant: « Allons, vieil ami du bon Dieu, mettons­-nous à chanter tous les deux », et ils entonnèrent avec élan:
           Heureux qui dès son enfance
           Soumis aux lois du Seigneur
           N'a pas avec l'innocence
           Perdu la paix de son coeur.

L'élan avec lequel ils chantèrent ce beau cantique si bien approprié fut tel que personne ne put retenir ses larmes.

Ma petite Mère chérie je n'ai pas le temps de vous intéresser davantage, mais ce simple petit trait vous dira le cachet pieux, intime de la fête dont Gabrielle est revenue si embaumée, tout comme si elle avait goûté un avantgoût des joies qui nous attendent dans notre belle Patrie.

Ah! ma petite Mère, avec quelle douceur votre petite fille savoure tous les jours cet avantgoût des joies célestes en s'appliquant dans toutes ses actions à aimer Jésus et à le faire aimer des âmes ! Et dire que c'est à vous que je dois d'être si heureuse !...

Votre petite poupée chérie

9. 10 juin 1906.
Fête de la Ste Trinité, 10 juin 1906

Ma petite Mère chérie,

Dire la joie et le bien que m'a faits votre petite lettre est impossible ! Ah ! quel écho ravissant vos douces paroles font résonner dans mon coeur, elles en touchent toutes les cordes et les font vibrer en chant délicieux d'amour et de reconnaissance envers Jésus ! Oui, plus que jamais, je veux que ma vie soit un chant de louange et d'amour à l'adorable Trinité qui a bien voulu me choisir si particulièrement pour une si belle destinée. St Jean Chrysostome ne ditil pas que ce n'est pas au hasard que nos noms nous sont donnés, mais que dans les desseins éternels de Dieu, ils sont le résumé de ce que nous ferons dans la vie, ils signifient le rôle que nous avons à y remplir.

Oh ! ma petite Mère, malgré mon indignité, je n'ai pas peur de n'être pas à la hauteur d'une si sublime mission, la Ste Trinité ne descendelle pas en mon coeur tous les matins, c'est donc Elle­-Même qui se louera en moi, je n'aurai qu'à veiller à ne pas mettre de discordance dans ce chant divin; tant que j'accomplirai avec amour sa Volonté exprimée par tout ce qui nous est demandé, je serai sûre d'être en accord parfait avec elle. Qu'elle est donc belle, notre vie !...

Ma petite Mère, cela m'a fait bien plaisir de voir que, comme moi, vous étiez touchée des récompenses anticipées que le bon Dieu accorde à ma famille tant aimée pour les consoler de leurs épreuves passées. Dans son amour impatient il les comble de consolations de tout genre. Oh! oui, il y aurait de quoi se fondre de reconnaissance et d'amour pour un si bon bon Dieu. Tout cela me donne un élan nouveau pour l'aimer à la folie et « provoquer par mes actes de vertu son Amour miséricordieux ». Je sens le besoin de lui rendre amour pour amour, et je ne suis pas fâchée qu'Il me laisse encore dans cet exil pour avoir la consolation de souffrir un peu pour Lui... Oh ! bien sûr ! je me garderai de me couvrir de mes ailes quand j'irai Le contempler face à face. Ne serace pas assez d'être restée tant d'années privée de la vue de Celui qui ne se révèle à moi que par sa bonté !...

Oh ! ma petite Mère, je me sens aujourd'hui le coeur tout plein, tout débordant, cela m'a fait du bien de le répandre un peu dans le vôtre, je puis même dire que je l'ai vidé dans le vôtre ! Vous me connaissez si bien, que par le peu que je viens de vous dire vous avez certainement pénétré jusqu'au fond de mon âme si exilée et qui a tant soif d'amour !...

Votre petite fille, Marie de la Trinité r.c.i.

10. 12 août 1906.

J'avais espéré que ma "petite Mère » me ferait la surprise d'un tout petit boni pour mon anniversaire ([Marie de la Trinité entre dans sa trentetroisième année, « âge parfait ») jusqu'à présent j'ai vécu d'espérance...Oh ! ma petite Mère, quoi que vous en disiez, si vous saviez le bien que m'a fait votre petit Chapitre (« Exhortation à une fidélité et une régularité plus parfaites »), à l'appro­che de l'Adoration Perpétuelle (du 14 août). Mère Agnès parle également de soeur SaintJean de la Croix, qui mourra le 3 septembre suivant ; le désir qu'il a augmenté dans mon âme de ne rendre les armes qu'après avoir vaillamment combattu ! C'est cette grâce que j'ai demandée au bon Dieu pour mon anniversaire. En commençant mon âge parfait, je suis dans la dis­position de faire une année parfaite ou du moins d'y tendre de tous mes efforts.

Oh! que je voudrais donc tomber sur le champ de bataille les armes à la main ! (PN 48, Mes Armes) C'est la mort que j'ambitionne, celle qui m'effraie le moins, et vraiment je ne comprends pas qu'elle soit si peu enviée des âmes qui sont, comme nous, toutes au bon Dieu.

Je ne vois pas ce qu'a de si attrayant de mourir de maladie ? On est abrutie plusieurs mois d'avance sans pouvoir prier ni souffler, entourée de soeurs aux airs navrés psalmodiant des prières sur des tons lugubres à vous faire mourir de tristesse et de peur !...

Moi j'aime mieux me trouver tout d'un coup sans savoir comment, dans les bras du bon Dieu, prise par lui au dépourvu dans n'importe quel acte de ma vie religieuse. Toutes les actions que je fais ne sontelles pas pour le bon Dieu ? Je travaille à chaque instant à mieux faire pour son amour, eh bien, j'ai confiance qu'il aura pitié de ma bonne volonté et m'emportera avec lui au moment où il me trouvera le mieux disposée; Lui, qui m'aime infiniment plus encore que je l'aime ne me jouera jamais le tour de me prendre dans une imper­fection, encore moins dans un péché ! Oh ! non, son Amour miséri­cordieux auquel je me suis livrée n'en est pas capable ! Puis sa petite reine est là pour guetter... et, dans sa fierté maternelle, elle lancera bien vite sur sa poupée toute sa provision de roses qui couvrira à jamais tous ses travers et la rendra magnifique.

Il m'est arrivé quelquefois, après un bon acte de vertu, de dire à mon ange Thérèse: « Qu'attendstu donc pour m'emporter ? Faut pas te mettre dans le toupet (rappel d'une réflexion de Thérèse enfant, citée par Mme Martin dans sa lettre du 22101876) que je ferai jamais mieux, tu rates une fameuse occasion ! »

Faut croire qu'elle espère tirer encore mieux de sa poupée puis­qu'elle fait la sourde oreille ! En attendant je m'abandonne au bon Dieu pleine de confiance, ne gardant d'autre souci que celui de lui faire plaisir en toutes choses ainsi qu'à ma petite Mère, mon Jésus visible icibas.

11. 24 décembre 1910.

Jésus ! Veillée de Noël 1910

Ma petite Maman chérie,

Matines vont sonner bientôt et je veux profiter de ce dernier moment de la veillée pour me rappeler avec vous le joli rêve que j'ai fait et dont le souvenir m'est une vraie consolation.

Je venais de mourir, et tout à coup je me trouve, avec d'autres personnes, devant une grande porte par où chacun devait passer pour se rendre soit au Ciel, au purgatoire, aux limbes ou en enfer. A l'entrée de cette porte, il y avait des casiers différents où chaque particulier devait prendre son lot de bonnes et mauvaises actions pour le faire réviser par les gardiens de la porte et, d'après l'examen, ils leur indiquaient la voie qu'ils devaient prendre pour se rendre soit au Ciel, en purgatoire ou en enfer.

Toute tremblante j'ouvris mon casier et je restai un moment surprise de le trouver vide. Soudain je me rappelle le désir que j'avais eu sur la terre de me présenter devant le bon Dieu les mains vides pour éviter tout jugement et avoir place au Ciel parmi les Sts Innocents qui reçoivent tout gratuitement de l'Amour miséricordieux. Pleine d'assurance en voyant là le gage de ma prière exaucée je me présente à cette porte qui me faisait l'effet d'une douane.

Les gardiens me regardent étonnés et, prévenant leurs interrogations, je leur dis: « Voulezvous m'indiquer la voie des petits? » — « Par ici », me dit l'un d'eux en m'indiquant une très belle allée. Apres avoir marché quelque temps, je me trouvai en face de jardins splendides: c'était le Ciel. Parmi les nombreux élus, j'aperçus un groupe de vierges qui s'entretenaient ensemble en se promenant; elles étaient resplendissantes de beauté et jouissaient d'un bonheur incomparable. L'une d'elles, m'ayant vue, accourut vers moi et m'embrassa en me souhaitant la bienvenue. Aussitôt je la reconnus, c'était une sainte religieuse que j'avais connue dans le monde: « Ah ! lui disje, cela ne m'étonne pas de vous voir ici, vous étiez si bonne sur la terre ! » — « Oh ! quelle joie de vous revoir, me ditelle, nous vivrons heureuses ensemble toujours ! — « Oui, répliquaije, je reviendrai vous voir souvent mais je ne reste pas avec vous, je ne suis pas pour la même demeure, vous le voyez, j'ai les mains vides et c'est la voie des petits que je cherche. » — « La voie des petits ! repritelle avec admiration en m'indiquant le chemin, oh! c'est bien plus haut !... » Je la quittai et poursuivis ma route en montant toujours, et voilà qu'au détour d'une colline j'aperçus une grande clarté et quelqu'un dit: « Ici c'est la voie des petits. » Immédiatement, hélas, je m'éveillai !

Vous devinez, petite Mère chérie, la consolation que ce rêve laisse dans mon âme et quel encouragement à suivre la petite voie de Thérèse ! Je me rappelle que trois mois seulement avant sa mort elle m'écrivait: « Le bon Dieu vous appelle à devenir une grande sainte tout en restant petite et en le devenant chaque jour davan­tage. » (LT 242)

Ah ! petite maman que j'aime à la folie, demandez au Petit Jésus que je devienne aussi petite que Lui et sa petite Reine: c'est là toute l'ambition de votre petite fille

Marie de la Trinité

12. 21 Janvier 1911.

Bonne Fête à ma Mère chérie. 21 janvier l911.

Pour notre petite Thérèse
Je me dévoue avec amour
En travaillant ainsi sans cesse
Ah ! que le temps me paraît court !
Si bien que ma Petite Mère
N'aura de moi que mon baiser
Je sais que loin de lui déplaire
Ma pauvreté va la charmer.
Travailler pour « Petite Reine »
O Mère ! c'est vous réjouir
Aussi j'aime ma douce chaîne
Qui me procure un tel plaisir. 

13.  21 janvier 1912.

Je suis de ma Mère chérie
Le pauvre et fidèle oiseau bleu.
De ma fonction je suis ravie
Et j'en remercie le bon Dieu
Chez St Paul, Braun et Cie...
A voler chez tant d'éditeurs
J'use mes plumes et ma vie.
Y atil plus doux labeur ?
Oui j'ai volé à perdre haleine
Pour vous fêter en ce beau jour.
Vous verrez de « Petite Reine »
Tous les portraits avec amour.
Voyant que mon cadeau de fête
N'arriverait jamais à temps
J'invoquais la chère estafette
Des saints petits Innocents.
Et les mignons, doux stratagème !
Me dépêchèrent hier matin
D'Auteuil l'administrateur même
Pour m'apporter ce beau butin.
Mon bien humble présent j'espère
Va vous faire un petit plaisir.
Dépliez bien vite, ma Mère,
Mes petits albumssouvenir.

[Outre l'Imprimerie SaintPaul (BarleDuc), la maison Braun et autres éditeurs, soeur Marie de la Trinité fait travailler d'autant plus volontiers l'Impri­merie des Orphelins d'Auteuil que son père avait été l'un des collaborateurs les plus assidus du Fondateur, M. l'abbé Roussel et c'est ainsi que notre Petite Sainte entendit parler de cette chère Maison de la charité pour l'enfance malheu­reuse et pria pour son développement. Elle ne se doutait pas qu'elle en devien­drait, dans la suite, la Patronne providentielle » cf. Circulaire de soeur Marie de la Trinité, p. 18].

14.   21 janvier 1915.

Bonne Fête
à ma Petite Mère chérie.
Je ne sais pas faire de compliment
La vérité je la dis sans tournure
J'aime beaucoup ma petite Maman
Et mon amour pour elle est sans mesure.
Sr Marie de la Trinité et de la Ste Face r.c.ind.

15.       Mai 1915.

Ma petite Maman chérie

Si vous saviez comme votre « grand mot » m'a fait de bien, j'y pense sans cesse, il me donne plus de courage pour supporter la nuit de l'exil; d'ailleurs tout ce qui vient de vous porte une grâce mer­veilleuse pour mon âme. Je reconnais que le bon Dieu a mis dans « ma nuit » bien des étoiles scintillantes, mais la plus belle, celle qui me cause le plus de joie, c'est ma petite Maman si aimée ! Oh ! que je suis reconnaissante au bon Dieu de m'avoir fait un tel don ! Je sens aussi qu'il est en mon pouvoir d'agrandir la joie que me donne ma belle et préférée petite « étoile », c'est de l'aimer toujours plus, et moins je me recherche en cet amour et plus je sens cet amour grandir... alors la nuit pour moi se change en clarté, (Ps138, 11) c'est comme un ciel anticipé.

Votre petite fille que vous rendez si si heureuse !
Sr Marie de la Trinité r.c.i.

16. 21 janvier 1916.

Il n'est pas sur la terre
Des gens aussi heureux
Que dans le Monastère
Du Carmel de Lisieux.
           Notre « Petite Mère »
           Fait tout notre bonheur
           Et sa houlette chère
           Nous conduit au Seigneur.
Aujourd'hui je suis fière
De lui offrir gaiement
L'électrique lumière
Son symbole frappant.
           Quand vers nous, ô Bergère
           Projètent (sic) vos rayons
           La joie est tout entière
           En vos petits moutons.
Pourquoi ? C'est un mystère
De l'amour de Jésus
Qui vous donna, ma Mère,
Sa grâce et ses vertus.
           Voici notre prière
           En ce bienheureux jour,
           Notre voeu bien sincère:
           Brillez sur nous toujours !

Sr Marie de la Trinité r.c.ind.

[On ignore de quel cadeau il s'agit].

17.   21 mai 1917.

Ma petite Mère chérie,

Je suis encore toute pénétrée du joli rêve fait ce matin... Il y avait plus d'une heure que je ne dormais plus, quand peu d'instants avant le réveil je m'assoupis. Je vis alors Mère MarieAnge accom­pagnée de Mère Isabelle et de Mère Thérèse de l'Eucharistie ( Il s'agit des « trois petites saintes », conquêtes de Thérèse peu après sa mort et enlevées jeunes encore, après une vie exemplaire: Mère MarieAnge (1909), Mère Isabelle du SacréCoeur (1914), Mère Thérèse de l'Eucharistie (1915). Leurs circulaires furent éditées sous forme de plaquette. On a retrouvé dans les papiers de Marie de la Trinité un second récit du même songe, amalgamant les billets 17 et 18, et portant la date du 21 mai 1917. On sait que MarieLouise Castel avait fait sa première communion le 21 mai 1885, jour où Thérèse Martin renouvelait la sienne).

Toutes les trois me regardèrent en souriant et avec une affection que je ne saurais exprimer. J'en éprouvai tant de bonheur que, ne pouvant supporter une si grande consolation, je me mis à sangloter, et elles me regardaient avec plus d'amour encore. Elles étaient d'une beauté que rien ne saurait rendre, surtout Mère Thérèse de l'Eucharistie qui avait un éclat particulier. Elles ne me dirent rien, ni moi non plus, mais leurs regards me faisaient comprendre que leurs souffrances d'icibas avaient été bien peu de chose en comparaison de la joie infinie qui était leur partage.—Sous la pression trop forte de cette consolation je m'éveillai...

Toute ma vie, ma petite Maman, je garderai le souvenir de cette visite du Ciel, qui fait tant de bien à mon âme. En reconnaissance j'ai offert ma Communion de ce matin pour augmenter leur gloire au Ciel.

Sr Marie de la Trinité r.c.i.   21 Mai 1917

32e anniversaire de ma 1re Communion et de ma Confirmation.

18.   25 Juin 1917.

Ma petite Mère chérie,

Je vous rends le récit de mon rêve avec les quelques détails que vous m'avez demandés:

La veille du jour où je reçus cette visite céleste, je constatai à l'oraison du soir que depuis que j'avais accepté la perspective de rester imparfaite toute ma vie,(MSA 74,1) j'étais beaucoup plus humble et je jouissais d'une grande paix intérieure. Ce n'est pas que je renonçais à la perfection, au contraire, j'étais dans la disposition de « lever toujours mon petit pied » malgré l'inutilité de mes efforts et je me disais: « Que je voudrais que Thérèse me donne un signe que je suis bien dans sa petite voie, sans aucune illusion ! » J'ai pensé le lendemain que ce rêve était sa réponse...

Oh ! quel moment indescriptible j'ai passé ! En les voyant me regarder si affectueusement, j'étais pour leur demander le pourquoi elles étaient venues (sic) et si bientôt j'irais avec elles; mais aussitôt je me suis rappelé cette parole de Petite Thérèse dans un autre rêve que vous savez: « Si vous saviez le prix d'une vie de foi !... » Et alors je n'ai plus eu envie de rien demander. Quant à elles, comme si elles avaient lu dans ma pensée, elles me regardaient avec plus d'amour encore.

Voilà plus d'un mois que cette grâce m'a été faite mais elle me laisse une impression aussi vive que si c'était hier. Depuis que j'ai vu, comme dans un éclair, la béatitude dont elles jouissent, j'appré­hende moins la souffrance, sachant qu'elle doit aboutir à cette félicité sans pareille.

Un autre bien que j'en retire, c'est plus de charité envers nos Soeurs, je les regarde avec un certain respect... aujourd'hui, elles sont ternes et dans l'obscurité et désordre du combat, mais malgré tout il me semble les voir déjà dans la gloire revêtues de l'éclat de nos trois petites saintes et je trouve le bon Dieu si miséricordieux d'avoir marqué ma place parmi elles ! C'est parfois un sentiment si vif que j'en pleurerais bien.

Je me dis aussi: si les petites âmes sont si belles au Ciel, que doit être la beauté de Thérèse, la Reine des petites âmes ? Et la beauté du bon Dieu Créateur de tant de merveilles ? ...

Ah ! les jouissances qui nous attendent méritent bien que nous pâtissions un brin dans la nuit de la foi; avec sa Petite Mère avec soi, ce n'est pas encore bien rude !

Oh ! que j'ai hâte de voir relevé votre lugubre voile (Mère Agnès a son voile noir baissé sur le visage pendant sa retraite, selon la coutume.), bien propre à jeter des idées noires dans la tête de vos « petits ».

Sr Marie de la Trinité r.c.ind.

19.   9 juin 1918.

Ma petite Maman chérie, ce matin je me suis réveillée en mar­mottant machinalement: « Je fais beaucoup de petits sacrifices. » Aussitôt, je me suis rappelé que c'était Petite Thérèse qui vous disait cela à l'infirmerie quelques jours avant sa mort et j'ai été heureuse de penser qu'elle m'apportait ellemême ce bouquet spirituel en ce bel anniversaire pour me rappeler qu'une petite victime d'amour doit toujours lutter et se vaincre. La grâce qui accompagnait cette parole a été si grande que je me sens toute renouvelée et disposée à laisser passer le moins possible ces mille petits sacrifices quotidiens « qui laissent tant de paix et de force à l'âme » (MSC 31,1). J'ai pensé aussi que lorsque Thérèse vous disait cela elle était bien malade et souffrait un vrai martyre; il semble que ces souffrances auraient dû lui suffire grandement et la dispenser de se mortifier par ailleurs. Eh bien, c'est tout le contraire qu'elle faisait ! Quel exemple et quel stimulant pour moi dont toute l'ambition est de l'imiter coûte que coûte. — Ma petite Maman chérie, je sens que je mourrai dans mon désir, sans jamais parvenir à l'accomplir, je lève toujours mon petit pied qui retombe impuissant, mais je ne me décourage pas, conservant dans mon coeur la belle promesse que vous savez, de Petite Thérèse, m'assu­rant que c'est au bas de l'escalier de la perfection que Jésus viendra me prendre pour m'emporter au Ciel.

Je prie bien pour vous, ma Petite Mère chérie, j'ai du chagrin de vous savoir si fatiguée mais j'offre ma peine au bon Dieu pour que cette retraite vous soit un vrai repos physique et moral

Votre petite fille qui vous aime autant qu'il est possible d'aimer

Sr Marie de la Trinité

20.   15 juin 1918. 

+ Ma petite Maman chérie, vous êtes venue dans notre cellule m'apporter le [mot gratté : il doit s'agir du courrier] et je n'étais pas là !... Que je l'ai regretté ! Demain, il y aura 24 ans que vous m'avez ouvert les portes de ce Carmel béni. Quelle joie pour moi de penser que je suis votre 1re petite fille ! Oh ! que le bon Dieu m'a gâtée de toutes façons ! il est impossible qu'Il ait pu faire davantage pour moi qu'Il n'a fait. Demandezlui, Maman chérie, que je L'aime icibas autant que sa Petite Thérèse l'a aimé, afin que je sois comme elle votre gloire au Ciel. En attendant je veux être votre petite joie [comme Thérèse LT 229] sur la terre, vous faire toujours plaisir, comme à mon Jésus visible. Oh ! comme Il m'est transparent en vous ! Quelle douceur pour moi de peiner à vos côtés sur cette terre d'exil...

Votre petite

Marie de la Trinité

21.   8 mai 1919. 

Ma petite Maman si chérie,

Pour votre anniversaire du 8 Mai [trentecinq ans de profession] j'ai voulu essayer de mettre en vers un de mes entretiens avec petite Thérèse, celui dont le souvenir me fait le plus de bien. Il y a sans doute des fautes mais je n'ai pas su mieux faire...

Votre petite fille qui vous aime tant, tant, qu'elle ne saurait vous aimer plus !

Sr Marie de la Trinité

Si mes petits vers ne sont pas de votre goût il faut les déchirer, je n'en aurai pas du tout de peine.

(Suit le poème reproduit dans VT n° 77, sous la référence CSM n° 43)

22.   14 mai 1919.

Ma petite Maman chérie;

Je suis heureuse. d'avoir tant d'ouvrage en ce moment, cela m'aide à passer moins tristement le temps de votre retraite. Mon Dieu, que les âmes du purgatoire doivent souffrir d'être privées de la vue du bon Dieu ! Etre privée de la vue de ma Petite Mère me fait tout pareil ! Mais j'offre cette souffrance de bon coeur au bon Dieu afin qu'Il exauce tous les désirs de votre coeur.

J'ai préparé aujourd'hui une commande de 900 Fr pour Grente - « la Miss » me passe son carnet tous les jours, les commandes abon­dent de plus en plus... 2 mandatscarte de 500 f d'offrande chacun aujourd'hui ! Vous voyez si la poupée de Thérèse a besoin d'être articulée !

Bonsoir Maman si tendrement chérie

Sr Marie de la Trinité

( «La Miss » aidait Maryelle de la Tour d'Auvergne (soeur de Mère Thérèse de l'Eucharistie) à tenir la petite procure ouverte en face du Carmel en août 1912. « Grente » est sans doute un (bon) client d'alors, plutôt que Mrs Grant, gardienne de la maison natale à Alençon).

23.   29 avril 1920. 

Ma petite Maman chérie

Votre 1re petite fille compte tout à fait sur vos prières demain 24e anniversaire de sa Profession. J'ai dit au P. Pitrou (Père de La Délivrande, alors aumônier du Carmel (+ 1932 ) que j'offrais la Messe qu'il dirait à toutes les intentions de notre Petite Thérèse. Et comme je sais que sa plus chère intention est le bonheur de sa Petite Mère qu'elle aime tant, vous bénéficierez largement des mérites infinis de cette Messe. Oh ! que je vous aime ma petite Maman chérie, mon amour pour vous et ma petite Thérèse sont pareils, ce n'est pas peu dire ! ! Ce double amour qui n'en fait qu'un fait toute la joie de mon exil et me fait vivre dans une action de grâces perpétuelle envers le bon Dieu qui se révèle à moi par vous avec tant de douceur.

Vous auriez joui ce soir à la récréation à la lecture de vos vers ravissants Oh ! oui vous êtes aimée profondément par toutes, cela se sent et se voit, tous les coeurs vibrent au moindre mot de leur « MamanJésus ». Je ne pensais pas vous écrire tout cela ! c'est un jet du coeur spontané de « bobonne »

(Le surnom, attribué primitivement à soeur Geneviève par Thérèse (cf. DE, 532 et 871), passera occasionnellement à telle ou telle soeur, parmi les plus dévouées de la Communauté).

24. 8 mars 1925.

Je profite que c'est dimanche pour vous écrire cette petite lettre [Mère Agnès de Jésus fait sa retraite annuelle (11 jours). Ce sera le cas encore pour les billets n. 25, 26, 27, 28, 33, 38, 40, 47, 48 (ainsi que 31, 32, 37, non cités ici)]parce qu'en semaine, je n'ai pas le temps « de la respire ».

Je veux vous dire que je prie avec tout mon coeur pour vous afin que votre retraite soit vraiment pour vous un temps de repos, vous avez un grand besoin de nouvelles forces pour subir le choc formidable de la Canonisation et toute sa suite, sans parler de ses antécédents actuels !

Car enfin ce n'est pas un rêve... notre petite Thérèse va bel et bien être canonisée et c'est nous qui voyons une chose pareille ! Oh ! ma petite Mère, quel modèle de sainteté le bon Dieu présente au monde ! Il n'a jamais rien fait qui Lui ressemble autant et qui en même temps soit si accessible.

L'autre jour que vous m'avez grondée et où je vous ai montré mon orgueil en m'excusant, vous ne sauriez croire le bien que m'a fait la vue de mon imperfection » (...).

25. 10 mars 1926.

«Ce n'est pas pour moi que je m'assujettis à le gagner (un Jubilé), pour nous l'amour nous purifie à chaque instant, mais je suis heureuse de faire ce cadeau à notre petite Thérèse pour qu'elle en dispose comme elle le voudra.

Oh ! ma petite Mère, si vous saviez comme j'ai envie d'aimer le bon Dieu comme notre petite Thérèse l'a aimé, d'être comme elle la joie de son Coeur ! A l'oraison c'est la sécheresse la plus grande, mais j'enflamme mon coeur en répétant lentement les strophes de Vivre d'Amour ou Rappelletoi, alors le bon Dieu a l'illusion d'enten­dre encore sa petite Thérèse et je sens qu'Il est content.

Je suis captivée par les lettres de votre sainte Maman, elles font rire et pleurer en même temps. Elle trace tellement votre portrait au vif que j'en éclate de rire ! Toute la gloire de ses enfants doit mainte­nant rejaillir sur elle et elle ne doit pas regretter d'avoir tant peiné et souffert. (...)

26. 13 mars 1927. 

(...) Priez aussi pour moi, ma petite Maman chérie, je voudrais tant aimer le bon Dieu comme il le désire ! Quelle douceur je goûte dans les lumières qu'il me donne sur mon petit néant... cela ne peut s'exprimer, il faut l'expérimenter. L'autre jour, pendant mon action de grâces, cette parole: « Les extrêmes se touchent » me combla de joie. Oui, l'extrême petitesse atteint le bon Dieu et s'unit à Lui, Il est notre Tout dans la proportion où nous ne sommes rien. Oh ! quelle doctrine de vérité que celle de notre Sainte chérie, toutes ses paroles sont lumière et vie, et si consolantes !

Ce matin je pensais à la mort ou plutôt aux souffrances qui la précèdent. Je voyais Jésus sur la croix aux prises avec la douleur aiguë et abandonné de son Père. Peutêtre, me disaisje, en seratil de même pour moi... Alors je dis, avec notre petite Thérèse: « Eh ! bien, s'il plaît au bon Dieu de me voir à terre, de porter mes souffrances faiblement, peu importe. ! » J'ai accepté d'avance cette humiliation pour son amour et j'en ai recueilli une grande paix. Ne vautil pas mieux en effet être faible et humble que fort et orgueilleux ?

27. 19 mars 1927.

J'attendais ce jour chômé pour revenir à vous, le temps me manquant les autres jours. Je suis encore sous l'impression de votre jolie, céleste composition pour Soeur Thérèse de SaintAugustin ( La poésie « Ce que j'ai vu » 17 couplets, pour son jubilé d'or) ,elle touche les fibres les plus sensibles du coeur, surtout nous qui avons tant connu et aimé notre Sainte chérie, et en repassant les gloires vécues, je me demande comment nous avons pu en jouir sans mourir. Ah ! c'est aussi que le bon Dieu a su les mélanger de salutaires amer­tumes; en exil on ne saurait goûter de joies sans mélange. Plus tard, au Ciel, ils seront bien surpris ceux qui croient que nous n'avons eu qu'à jouir du triomphe de notre sainte petite Thérèse...

28. 13 mars 1928.

(...) Il m'est doux de vous rabâcher mon affection si sentie, il m'est doux de pressentir que nous touchons le terme ensemble, après avoir fait ensemble une heureuse traversée, malgré les quelques bour­rasques essuyées. Je sens déjà dans mon âme comme un air de fête éternelle, comme si elle était toute proche, c'est une paix si délicieuse que j'en chanterais bien du matin au soir. Ce n'est pas une paix de passage, mais la possession d'une joie durable qui fait dire à tout ce qui arrive, heureux ou pénible: «  Vous me comblez de joie, Seigneur, par tout ce que vous faites » ; ou bien encore avec notre sainte chérie: « Je ne puis plus souffrir parce que toute souffrance m'est douce, dans la volonté de Jésus ». Oh ! quand on a foi en l'amour de Celui qui fait ou permet tout pour notre bonheur, qu'on est heureux !

L'autre jour, à la vaisselle, parlant de ce bonheur avec Soeur Louise de Jésus (Dernier témoin d'une époque, soeur Louise est retournée à Dieu le 16 août 1982, laissant le souvenir d'une foi rayonnante et d'un rare zèle apostolique. Dans la petite démonstration qui suit, elle rapproche l'un contre l'autre les deux bois parallèles, puis les dispose en croix), elle me dit: « Ma petite soeur, voici deux bois, rapprochez comme ceci ces 2 bois, c'est l'union, la fusion. Mais si vous les contrariez, si votre volonté n'est pas en harmonie avec celle du bon Dieu, par exemple si vous voulez la santé alors qu'Il veut pour vous la maladie, vous croisez les 2 bois, c'est la +, c'estàdire la souffrance ".

29. 25 janvier 1929.

Je viens vous raconter une grâce que notre sainte petite Thérèse m'a accordée cette nuit: Vers minuit et demi je fus prise d'une grande faiblesse, la sueur m'inondait, je crus me trouver mal. Dans mon angoisse—à cause de l'heure qui m'empêchait de rien prendre pour ne pas manquer la Communion — j'invoquai notre petite Thérèse, lui disant que puisqu'elle s'établissait souvent infirmière auprès des malades, elle eût pitié de moi et me secourût. Je ne la vis pas, mais presque aussitôt ma faiblesse disparut et je pus me rendormir.

Ah ! que de grâces je lui dois, ma petite Mère chérie ! surtout celle de mettre mon âme dans la pleine vérité de sa petite voie de confiance et d'abandon.

30. 10 mars 1929.

Quelle profonde joie vous avez dû avoir hier soir au reçu de la lettre de M. l'Aumônier et combien nous avons été fières de la vôtre au chef de l'A.F. [« Le chef de l'Action Française » Ch. Maurras. C'est en février 1929 que Pie XI avait confié à sainte Thérèse de Lisieux le dénouement de cette affaire; cf. les Annales, aoûtseptembre 1939. DanielRops, « Un combat pour Dieu · (Fayard, 1963), p. 502] ! J'en ai été touchée aux larmes. Oh ! oui, nous les aurons et le bon Dieu se servira de sa petite Thérèse et des petites petites âmes de sa légion pour remporter cette belle victoire. C'est toujours dans les petits qu'Il va chercher ses instruments de miséri­corde, afin que toute gloire lui revienne. Voyez dans l'Évangile d'aujourd'hui, Jésus se sert de quelques pains d'un enfant pour nourrir toute une multitude... Les toutpetits n'ont pas d'autre expédient que leur amour pour obtenir ce qu'ils veulent, aussi je m'exerce unique­ment à faire plaisir au bon Dieu en toutes choses et je suis sûre de la réussite.

33. 22 février 1931.

« La 4 s'en va, ça ira ! La 5 s'en vient ça va bien ! » (Refrain humoristique familier à Marie de la Trinité: La quatrième journée est passée, la cinquième s'avance... » ) Malgré tout, ça passe lentement au gré de mon coeur et bien que vous restiez parmi nous, c'est un voile de deuil jeté sur ces 11 jours. Que nous serons donc heureuses dans le Ciel où nous n'aurons pas besoin de nous cacher à ceux que nous aimons pour mieux nous unir au bon Dieu !

Dans cette prison qu'est l'exil, notre pauvre corps déchu est un bien lourd boulet pour notre âme faite à l'image de Dieu et dont les aspirations divines sont constamment entravées. Et pourtant le bon Dieu en nous donnant si particulièrement notre Petite Thérèse a mis un beau coin de ciel bleu dans notre nuit obscure, elle est vraiment la radieuse étoile de notre vie, la joie de notre coeur. Et quel encouragement de vivre aux côtés de sa «  Petite Mère », de partager avec elle les mêmes peines et les mêmes joies ! (...) Pour moi, comme pour la Petite Thérèse, vous êtes l'image de la miséri­corde, de la douceur du bon Dieu.

34.   14 avril 1931.

Samedi, après la séance du Docteur, le bon Dieu m'a fait sentir vivement que c'est Lui qui me soutenait, tandis que je subissais les pointes de feu. Je pensais avec douceur que c'était sa main divine qui conduisait celle du médecin et qu'il mesurait l'intensité de la douleur à la force qu'Il me donnait pour la supporter... C'était un sentiment si ineffable que j'en étais émue jusqu'aux larmes, mais je les essuyais bien vite car Soeur Madeleine (Soeur Madeleine de Jésus (+1940), l'infirmière d'alors) rentrait pour me panser et elle aurait pu croire que c'était la douleur qui me faisait pleurer.

Oh ! ma petite Mère chérie, non, il ne faut pas appréhender la souffrance car « Il donne toujours la force », disait en mourant (il y a aujourd'hui 26 ans) notre petite soeur Marie de l'Eucharistie (La mort de soeur Marie de l'Eucharistie (14 avril 1905) fut parti­culièrement belle et sereine; cf. Marie Guérin, par le P. Piat (OCL, 1953), p. 119.) Et que notre petite Thérèse avait raison, quand on la louait de sa patience, de dire que c'était celle de Jésus et non pas la sienne. Oui, quand on reconnaît humblement son impuissance et qu'on attend tout du bon Dieu on peut dire avec assurance: « Je puis tout en Celui qui me fortifie » et voler au martyre comme à une fête. Mais c'est d'ordinaire aux plus faibles que le bon Dieu donne cet enthousiasme pour les soutenir, et ceux qui ne l'ont pas sont plus vertueux encore: c'est notre Sainte qui l'a dit.

35.   3 mai 1931.

(...) Vous savez que j'ai toujours apprécié notre Sainte chérie, eh! bien, le croiriezvous ! cela me fait l'effet de l'apprécier chaque jour davantage. Ses vertus m'apparaissent de plus en plus divines, sa doctrine m'est chaque jour plus lumineuse...

Je voulais vous raconter aussi, ma Petite Mère chérie, à quelle occasion notre Sainte a écrit dans l'histoire de son Ame que de même que Salomon se tournant vers les ouvrages de ses mains, elle comprit mieux que jamais que « tout était vanité et affliction d'esprit ». C'était le jour de votre fête, 21 janvier 1895; la 2e partie de sa composition « Jeanne d'Arc » qu'elle avait jouée avec le noviciat lui avait attiré l'admiration de la Communauté. (...)

36.   20 novembre 1931.

Notre petite Thérèse me répétait souvent que le bon Dieu se plaisait à tirer le bien du mal. Dans la grande peine qui nous abat, cette pensée me réconforte. A son heure, le bon Dieu saura bien sus­citer quelqu'un qui sera même mieux que le P. Léonard, et nous, nous ferons « jabot » d'avoir souffert pour notre belle oeuvre mondiale. Il est certain que deux ennemis ne peuvent marcher ensemble, c'eût été des tiraillements perpétuels et très pénibles. Le bon Dieu veut sans doute se servir d'un faible instrument comme il a fait de notre Petite Thérèse qui renouvelle le monde, et des petites paysannes Bernadette et Jeanne d'Arc... Le Père MarieBernard avait de magnifiques concep­tions de décoration, ce faible instrument ne porterait pas ombrage à Cordonnier et peutêtre suivraitil ses conseils pour les faire exécuter ? (Le Père Léonard, s.j., avait été sollicité par l'abbé Germain, avec l'agré­ment du Carmel de Lisieux, pour la décoration intérieure de la Basilique. L'ar­chitecte, autoritaire et versatile à ses heures, fit avorter le projet de collabo­ration. Les mosaïques furent confiées à un autre décorateur)

Je vous écris, ma petite Mère, ce qui me passe par la tête et qui me sort du coeur pour adoucir votre peine. Le mieux pour le moment est d'écarter tout travail de décoration définitive tant que le bon Dieu n'aura pas manifesté sa volonté.

38.   6 mars 1932.

J'aurais voulu pouvoir vous écrire aujourd'hui et voilà que toutes les épreuves du bloc calendrier 1933 me sont arrivées, (Pendant de longues années, Marie de la Trinité assura la composition du calendrier à effeuiller chaque jour, et en corrigeait les épreuves) alors je n'ai pas fait autre chose. En relisant la sentence: « Le bon Dieu me destinait à devenir l'apôtre des apôtres ... », (Ms A, 56 r°; Thérèse fut proclamée patronne des Missions le 14 décembre 1927) je pensais que vraiment elle avait prophétisé, puisque le Saint Père l'a déclarée Patronne de tous les Missionnaires du monde entier. Oh ! qu'elle est grande notre Petite Thérèse ! (...)

40.   5 mars 1933.

Heureusement que je suis tout occupée au rangement des archi­ves, cela me fait paraître moins long votre retraite, mais cela ne m'empêche pas de penser à vous, au contraire ! Votre souvenir est tellement lié à celui de notre Sainte chérie que cela ne fait qu'un. Sa gloire est la vôtre, et quelle gloire !... Bien qu'on y soit habituées, en rangeant ses archives, on reste dans l'étonnement.

Le premier Journal qui a parlé d'elle, en 1899, s'appelle « L'Es­pérance du Peuple », (Journal de la LoireInférieure (à l'époque...), du jeudi 31 août 1899, n° 204. Il s'agit d'une recension anonyme de l'Histoire d'une Ame) n'étaitce pas significatif ? Je vous assure, ma Petite Mère, que je n'ai pas de peine à faire ce travail « de bon coeur » comme vous nous le disiez dans votre dernier Chapitre: « Faites tout de bon coeur »; malgré la fatigue inévitable, je me trouve bien privi­légiée d'en être chargée.

Quant à la copie de votre déposition [mettant au propre les nom­breuses feuilles volantes écrites par Mère Agnès en vue du Procès Apostolique], si cela devait vous faire le moindre petit plaisir je n'hésiterais pas à m'y remettre. C'est parce que vous m'aviez dit que ce travail ne vous intéressait pas, que mon courage avait été coupé net. Je n'ai du coeur au travail que selon le plaisir qu'il peut vous faire, car je suis sûre de plaire au bon Dieu dans la même proportion. (...)

41.   12 août 1933.

Aujourd'hui, anniversaire de ma naissance, me rappelle un autre bien touchant souvenir à ce même jour, il y a 23 ans.

Devant la grille ouverte de l'Oratoire (Pour les dépositions des carmélites aux deux Procès, Mère Agnès avait fait ouvrir une fenêtre (à grille ouvrante) dans le mur mitoyen de l'Oratoire et de la sacristie extérieure. Le tribunal ecclésiastique siégeait dans la sacristie, et les carmélites restaient ainsi en clôture) où devaient avoir lieu les séances du premier grand Procès Informatif de notre Sainte petite soeur, après que vous eûtes, d'une voix bien émue, prêté le serment solennel, M. Dubosq se pencha vers vous avec un sourire ineffable en appelant: « Mère Agnès de Jésus ». Son air, son ton semblaient dire: « Approchez sans crainte, n'ayez pas peur. »

Oh ! ce premier appel, au premier Témoin, la petite Mère de Thérèse, comme il a dû faire tressaillir le Ciel !

Il m'est doux de revivre aujourd'hui avec vous, ma petite Mère, ce simple mais si profond souvenir. Que nous avons vu de grandes choses !... Vraiment, comme disait Sainte chérie, « il y aurait de quoi mourir d'amour et de reconnaissance » (LT 230)

42.   29 avril 1934.

(...) Demain il y aura 38 ans que j'ai fait Profession. Et le 16 juin il y aura 40 ans que vous m'avez ouvert les portes de ce Carmel béni. Donc 40 ans que j'ai la grâce de vivre dans votre intimité, que nous avons partagé nos joies et nos peines... Comme le bon Dieu nous a unies ! Je ne Le remercierai jamais assez de m'avoir ainsi donné sa Petite Thérèse et sa Petite Mère. Je suis heureuse qu'il m'ait fait « demeurer avec vous dans vos travaux » et vos souffrances pour l'aimer et le faire aimer par notre petite Thérèse !

L'autre jour en pensant à notre Sainte chérie se faisant si ineffa­blement « jabot » de toutes les humiliations de sa vie, [CJ 27-5-6 et note DE p. 426] je me disais que moi aussi j'en étais plus fière que si on avait mis en valeur les parchemins, titres de noblesse de ma grand-mère. Ah ! que le bon Dieu est bon de ne nous avoir pas épargnées afin de nous mettre en plein dans la vérité ! Cette parole du Prophète: « Le Seigneur ne blesse que pour guérir » (Jb 5, 18) me fait aussi beaucoup de bien, au sujet de mon lupus. Oui, toutes nos blessures physiques ou morales, unies à celles de Jésus, servent à guérir les âmes et quelle grâce d'être ainsi associées à sa rédemption !

46.   2 avril 1935.

(...) J'ai profité du grand ménage de notre cellule pour reprendre avec plaisir notre paillasse. Tout ce qui, malgré mon état d'infirmité, me rapproche un peu plus de la règle me plaît, parce que je pense que le bon Dieu y attache une grâce particulière, étant le genre de vie à laquelle Il nous a appelées. Il me fait aussi la grâce d'accepter volon­tiers les soulagements qu'il m'impose par ma si compatissante Petite Maman, alors que sa Volonté divine est de changer la souffrance de règle en une autre à son goût à Lui et que je veux aimer malgré tout.

47.   24 mars 1936.

Voici ma tête de ces joursci avec mon loup enragé ! (Billet illustré par la réclame du Vermifuge Lune: un bébé qui fait la lippe... Marie de la Trinité éprouve, et de plus en plus, d'intolérables déman­geaisons dans son mal)   Effet du printemps probablement... ou plutôt effet que le bon Dieu a besoin de nos petites souffrances changées en amour, pour compenser l'indiffé­rence et la haine des pécheurs. Je n'ai pas le temps de vous écrire long, ma petite Mère si aimée, je suis avare jusqu'à une minute de mon temps pour terminer mon intéressante copie. Quel encouragement pour moi de savoir qu'elle vous fait tant plaisir ! Alors ma fatigue ne compte plus.

48.   29 mars 1936.

J'arrive heureusement à la fin de ma longue copie Fondation, (Pas moins de 462 pages, format écolier, reliées en un gros cahier. Cette copie reproduit (à quelques coupures près) le récit du fondateur, l'abbé Pierre­-Nicolas Sauvage pour les années 18381846 (l'original, transcrit par un ami du monastère, M. Caval, existant toujours) ; elle y ajoute la transcription par­tielle du récit de la fondatrice, Mère Geneviève, pour les années 18441877 et termine par la liste des professes de Lisieux en 18381938 (81 religieuses, sainte Thérèse de l'EnfantJésus étant la 48e professe du monastère). Ce long travail fut demandé à soeur Marie de la Trinité en prévision du centenaire du monastère) mais malgré ma presse je tiens quand même à vous raconter mon rêve, dont ma copie est probablement la cause.

Je m'étais endormie sur le matin, il y a environ un mois (c'était le 22 février). Dans mon rêve, vous me présentiez à notre sainte Mère Geneviève, (Entrée en 1894, Marie de la Trinité n'avait pas connu Mère Geneviève, morte en 1891) son regard se porta sur moi avec une infinie ten­dresse, je l'admirais le coeur ému et plein de joie. Alors, me pressant sur son coeur, elle me dit: « Mon enfant, voulezvous bien accepter toute la volonté du bon Dieu ? » Je lui répondis avec enthousiasme: « Oh ! oui, ma Mère, je la veux entièrement, quelle qu'elle soit... » Elle m'embrassa avec effusion et sous son baiser maternel je m'éveillai, le coeur rempli de consolation.

Ma petite Mère, je suis bien payée par ce rêve du mal que je me suis donné à ma copie de plus de 400 pages ! Je suis également si heureuse de vous faire plaisir par ce petit travail; j'y retourne promptement en vous redisant ma si profonde affection.

49.   13 décembre 1936.

J'ai eu cette nuit un rêve bien consolant. Le Monastère était tout enguirlandé comme pour un grand jour de fête. J'examinais les décors, ayant à mes côtés Sainte Thérèse de l'EnfantJésus. Sur le premier panneau se détachait un tableau de la Sainte Face et je le baisai avec amour; le deuxième panneau représentait aussi la Sainte Face, le troisième idem ! Je ne voyais partout que des représentations de la Sainte Face. Mon coeur exultait de joie et je dis à ma petite soeur Thérèse de l'EnfantJésus ! « C'est donc une fête en l'honneur de la Sainte Face » ! Et je me suis mise à lui réciter tous les couplets qu'elle avait composés en son honneur. (PN 20)

Elle m'écoutait ravie, .... Je suis heureuse, lui disje, que ce soit pour moi que vous ayez composé votre beau cantique à la Sainte Face ! » 

Làdessus je m'éveillai, il était 2 h du matin.  Bien que ce soit un rêve, ma Petite Mère chérie, il me laisse une grâce de force pour porter mon mal qui me donne un petit trait de ressemblance avec la Face douloureuse de mon bienaimé Jésus. Je compte sur notre Sainte chérie pour m'aider à le porter jusqu'au bout dans la sérénité d'âme qu'elle m'obtient.

51.   6 Juin 1939.

La neuvaine est finie et je ne suis pas guérie. Humainement parlant j'aurais été contente de la guérison pour bien des raisons, dont la principale aurait été de soulager mon infirmière de ce long et fati­gant pansement journalier. Mais en constatant les dispositions dans lesquelles le bon Dieu mettait mon âme je n'espérais pas guérir... Je disais: « Mon Dieu, si je devais vous être un petit peu moins agréable sans mon lupus, je préfère de beaucoup le garder pour vous être tout à fait agréable ». Et il me semblait qu'il me regardait avec plus de complaisance telle que je suis à cause des traits de ressemblance avec la Face douloureuse de son divin Fils.

Non, je ne suis pas un sujet propice aux miracles de guérisons, aussi qu'on en reste là avec les neuvaines ! Le bon Dieu m'aidera jusqu'au bout à supporter mon mal, comme Il l'a fait jusqu'à présent. Je compte sur Lui et je ne serai pas trompée. Je Le remercie de m'associer pour une petite part à la passion de Jésus pour le salut des âmes. En réalité, je ne fais pas grand chose car c'est Lui qui, par derrière, soutient la croix de son petit enfant... RemerciezLe avec moi, ma petite Mère chérie, en attendant que nous Le fassions en­semble toute l'éternité.

52.   19 Janvier 1940.

Tout à l'heure pendant Vêpres, le coeur plein de notre chère petite soeur Marie du Sacré-Coeur (Soeur Marie du Sacré Coeur était morte la nuit précédente, après de longues années d'infirmités), je récitais avec ferveur ces 2 vers de l'hymne des Martyrs: «  Quae vox, quae poterit lingua retexere / Quae tu Martyribus munera praeparas? » (Quelle voix, quelle langue pourra chanter / Les récompenses que tu prépares à tes martyrs ?) et je me disais: « Notre chère et si douce Marraine a subi son martyre avec fidélité jusqu'au bout, certes je veux en faire autant et ce n'est pas moi qui lui demanderai de me guérir ! La grâce du bon Dieu l'a soutenue, j'ai confiance qu'elle me soutiendra de même. Ici­-bas, son bon coeur cherchait à soulager tout le monde, mais maintenant qu'elle voit le prix de la souffrance, elle ne nous enlèvera pas nos difficultés, elle nous aidera à les vaincre pour remporter la palme comme elle.

Votre petite fille qui voudrait pourtant bien ne pas vous donner l'ennui de sa vilaine maladie et de ses infirmités,

T.

54.   9 avril 1940.

J'avais fait tous mes plans pour faire ma retraite à l'époque de ma Profession 2030 avril. Mais voilà que vous êtes venue tout déran­ger en me demandant de l'avancer de 12 jours pour donner ma place à une autre de nos Soeurs. Immédiatement, faisant taire tous les raisonnements de ma nature, j'acceptai la proposition et cette parole de notre Sainte petite Thérèse me revenait avec douceur: « Regardez-­vous comme une petite esclave que tout le monde a le droit de com­mander" (CSG ). Quelques instants après, passant sous le cloître près de la porte du Choeur, je dis à Jésus: « Je suis contente de faire plaisir à vos épouses, à mes dépens, parce que c'est vous faire plaisir à vous-­même ». Aussitôt je fus embaumée d'un tel parfum de violettes que c'était à croire que le préau en était couvert... Mais rien ! et je compris que le bon Dieu voulait me manifester par là son contentement de mon acte d'abnégation et d'effacement.

Ma petite Mère, j'ai encore l'âme tout embaumée de cette grâce (non pas du parfum qui n'a duré qu'une seconde !)

Votre pauvre petit T.

55.   6 août 1940.

Je veux vous faire part d'une grâce pour ma fête de la Sainte Face [Soeur Geneviève et ellemême avaient choisi la Transfiguration comme fête de la Sainte Face. Et c'est le 6 août 1896 que Thérèse avait récité, avec ces deux mêmes jeunes soeurs, sa « Consécration à la Sainte Face » (HA 1953, pp. 259 ). Hier j'étais comme découragée de toujours souffrir dans mon mal et surtout je me reprochais de si peu ressembler moralement à notre Sainte chérie dans son amour de la souffrance et je lui deman­dais instamment de m'obtenir cet amour. Ce matin, pendant la Messe, j'ai senti nettement que ce désir me faisait sortir de sa petite voie et qu'il valait mieux accepter d'être toujours « pauvre et sans force » dans la douleur. Peuton demander à un petit enfant d'aimer la souf­france ? Il pleure, il est malheureux pendant qu'il souffre...

Je com­prends qu'il fallait à notre petite Thérèse la pratique des vertus héroïques pour être canonisée, mais pour les petites âmes qui devaient marcher à sa suite elle a tracé une petite voie tout ordinaire qui les maintient dans l'humilité. Si le bon Dieu se plaît à nous entendre dire avec son Jésus: « Père, éloignez de moi ce calice »...(Lc 22 42, cité en LT 197) car il sait que néanmoins nous nous abandonnons à sa volonté !

Ma petite Mère, je vous redis bien mal cette grâce profonde qui m'a fait tant de bien ! Il n'y a rien de nouveau dans ce que je vous dis, mais quand le bon Dieu met sa grâce, c'est lumineux et transformant.

Me voilà donc « gros Jean comme devant » avec mon mal, mais avec une paix inexprimable...

56.   17 septembre 1940.

Pour la fête de la Sainte Croix, le bon Dieu m'a donné une grâce de lumière et de force qui me fait un bien immense. — Je m'attristais en pensant que je n'arriverais jamais à l'union divine, en constatant le vide de mes oraisons et ma lassitude des longues prières. Or, tout à coup, j'ai senti que j'étais dans l'erreur en faisant consister l'union d'amour dans les consolations spirituelles et que cette union affective peut même porter à l'orgueil. J'ai compris fortement que la véritable union consiste tout simplement dans l'acceptation amoureuse de nos souffrances, unies à celles de Jésus, pour le salut du monde. C'est vraiment là l'union effective qui nous fait communier à chaque instant à sa douloureuse Passion, union qui s'opère dans les délais­sements et la nuit de la foi.

57.   7 février 1941.

Quelle exagération dans ce bon Docteur ! [Le Dr Maffei, homéopathe, « médecin réputé, ami de sa famille », dit la circulaire]

S'il jugeait les choses dans la vérité, il verrait que le bon Dieu seul mérite les louanges, car c'est sa grâce qui opère en nous et nous donne la force de souffrir ce qu'il nous demande.

58.   23 mars 1941.

Quand vous êtes entrée hier soir dans notre cellule, cela m'a fait l'effet de la visite du bon Dieu qui venait m'encourager à porter mon mal en patience. Bien que je n'aie pas de consolations spirituelles sensibles, je ne puis pas dire que je suis délaissée du bon Dieu car je sens à chaque instant le secours de sa grâce pour marcher dans la petite voie d'amour et d'abandon de notre Thérèse, voie obscure mais si lumineuse de vérité ! Ainsi ce matin je me réveillai en chantant (intérieurement)

           Seigneur, pour votre amour j'accepte le martyre...

           ...Je veux prendre ma croix, doux Jésus et vous suivre...

           (Prière de Jeanne d'Arc en prison, RP 3, 20 v°/21 r°)

Et que d'autres couplets, du même genre, me ravigotent ! Quelle force je puise dans les moindres paroles de notre Ange ! Elles sont divines pour imprégner l'âme ainsi de la grâce du bon Dieu !...  (...) Je vous assure que ma montée du Calvaire est bien adoucie par votre chère présence, et vous m'accompagnerez ainsi jusqu'au Ciel. Voilà déjà 47 ans que nous partageons nos joies et nos peines, ce sont des liens qui ne peuvent se briser et dont je rendrai grâce éternellement au bon Dieu.

Votre pauvre petit T. devenu lépreux...

59.   Vendredi Saint 1941 (11 avril).

Jésus a passé le plus creux ; (C'estàdire: Il a fini de souffrir... Billet écrit le soir du Vendredi ­Saint, de même le n. 61) pour nous il nous reste encore peutêtre bien des creux à passer... et pour moi, il m'arrive souvent que « j'seyis dret dans le mitan ». (En patois normand: « Je saute en plein milieu »; une locution dont on s'amusait aux Buissonnets; cf. déjà LD 703, de Marie du SacréCoeur à son père, le 23 juillet 1888 (VT n. 56) Mais mon effort impuissant pour sauter le creux plaît à Jésus, je le sens, et c'est du creux de ma misère qu'il m'élèvera jusqu'à Lui.

60.    8 juin 1941.

Je veux rectifier bien vite ce que je vous ai dit tout à l'heure qu'il n'y avait plus de fêtes pour moi... Je voulais dire plus de joies naturelles à cause de mon état d'infirmité. Mais la vérité c'est que je vis dans une fête spirituelle perpétuelle à cause de mon abandon à la volonté du bon Dieu. Je dirais volontiers comme notre petite Thérèse: « Le bon Dieu m'a prise et m'a posée là ! » Il m'a donc donné le meilleur des biens et je n'échangerais pas ma place pour celle du plus heureux mortel. J'aime ma part telle qu'elle est parce que c'est celle que le bon Dieu m'a faite et qu'elle lui plaît ainsi.

Votre petite fille qui vous est si reconnaissante de la douceur que vous mettez dans ses souffrances.

61.     3 avril 1942 (Vendredi Saint).

Jésus a passé le plus creux... mais pas nous !...

63.   23 août 1942.

Hier soir en faisant mon pansement avant de me coucher (Les derniers temps, Marie de la Trinité refaisait seule son pansement du soir, l'infirmière (soeur Germaine du SacréCoeur, morte en 1953) assurant celui du matin. Et les soeurs converses lavaient chaque semaine des seaux de ce linge souillé) — pansement assez douloureux à cause d'une hémorragie survenue dans la nuque — je me sentis tout à coup enveloppée d'une odeur d'encens, chose qui ne m'arrive jamais. Alors j'ai pensé que Sainte petite Thérèse venait me dire: « Je ne t'abandonne pas, je veille sur toi ! » Je vous assure, ma petite Mère, que j'ai été bien consolée de cette visite céleste et fortifiée pour continuer à souffrir selon les desseins du bon Dieu.

66.   26 septembre 1943.

Je vous remercie de m'avoir fait aider pour les mandats. Au pre­mier moment j'ai senti que je vous mettais dans l'embarras, j'en étais toute mélancolisée, me disant: « Depuis plus de 3 ans que je me dévoue sans compter, on ne pense qu'à l'ennui et l'embarras que je donne ». Mais soudain ces paroles de l'Évangile m'ont remise dans un état surnaturel: « Quand vous aurez fait tout ce que vous avez pu, dites: Nous sommes des serviteurs inutiles » Lc 17,1. Oh ! combien ces paroles m'ont remise dans la vérité et une douce paix. En raison­nant autrement on s'illusionne, on tombe dans la tristesse, bref on s'égare. Que le bon Dieu est bon de m'avoir mise dans la vérité à l'aide de notre Sainte petite Thérèse. RemerciezLe avec moi, ma petite Maman chérie, qui m'aidez si surnaturellement à porter mon épreuve de santé.

Votre aimante et reconnaissante petite fille,
Soeur Marie de la Trinité c.d.i.