Carmel

29 juillet 1888 – Bethléem

J. M. J. T.
Ma très Révérende Mère,
Paix et salut en Notre Seigneur, dont la Volonté, toujours adorable vient encore de rappeler à lui une autre de nos soeurs, la Soeur Thérèse de Jésus, dans la 41e année de son âge, et la 12e de sa profession de religieuse de choeur.    

Notre chère Soeur naquit d'une famille honnête et chrétienne de Pau.
Elle entra au Carmel de sa ville natale, y prit le S' Habit et y fit profession.
Lorsqu'en 1879 notre vénérée et bien-aimée Mère Fondatrice vint habiter parmi nous, elle emmena notre chère Soeur Thérèse dans son Carmel de Bethléem ; cette faveur fut pour elle la source de grâces plus spéciales, dont elle lui sera éternellement, reconnaissante.
Ici, notre chère Soeur édifia tout le monde par son esprit de prière et par son assiduité au travail manuel, ce qui la rendit très utile à la communauté. Nous l'avons souvent entendue, depuis quelques mois, remercier le bon Dieu de cette application et de cette assiduité au travail, comme d'une grâce qui l'avait préservée de nombreuse fautes où son penchant naturel l'aurait trop souvent entraînée.
Une maladie de poitrine, qui paraissait devoir se prolonger, l'a conduite en peu de temps au terme de la- vie, car il y a, à peine quelques jours, qu'elle suivait encore la plupart de nos exercices.
Lundi dernier elle se rendit au parloir avec la Communauté, pour recevoir la Paternelle Bénédiction de Mgr le Patriarche de Jérusalem qui, à son retour de Rome, vint faire une visite au Carmel. Le lendemain elle descendit au confessionnal, et passa à son tour pour se confesser. Mercredi elle assista à la Messe et y fit la Ste Communion. Le Jeudi elle se sentit plus fatiguée, mais elle resta levée une partie de la journée. Dans la nuit elle prit un court sommeil puis on l'entendit prier continuellement.
Vendredi matin, vers sept heures, elle parut se recueillir davantage et pria assez haut pour être entendue. Elle fit spontané ment le sacrifice de sa vie pour l'expiation de ses péchés1, en y joignant l'offrande du Précieux Sang de Notre Seigneur. Elle prononça lentement et distinctement les actes d'humilité, de confiance, d'abandon à la volonté de Dieu, les invocations à Jésus, Marie, Joseph etc. Elle récita, ensuite, en entier le Salve Regina avec le verset et l'oraison, et tout cela avec un calme,
une présence d'esprit qu'elle aurait à peine pu avoir en aidant une de ses Soeurs à mourir.
Nous nous hâtâmes de lui procurer la grâce d'une dernière absolution et de l'Extrême-onction ; et elle s'éteignit doucement, sans secousse, à 7 heures et demie du matin, le Vendredi 27 Juillet.
Nous avons la douce confiance que le bon Dieu l'aura reçue dans sa miséricorde, et nous vous prions, ma Révérende Mère, de lui accorder au plus tôt les suffrages de notre St Ordre et tout ce que votre charité voudra bien y ajouter. Elle vous en sera très reconnaissante, ainsi que nous, ma Révérende Mère, qui avons l'honneur d'être auprès de la crèche du St Enfant Jésus.

Votre très humble petite Soeur et servante
Soeur Euphrasie du S1 Enfant Jésus Carm. déch. i.
De notre Monastère du S' Enfant Jésus de la Colline de David.
Bethléem, ce 29 Juillet 1888.

Jérusalem.—Imprimerie des  PP.  Franciscains

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