Carmel

22 Mars 1896 – Moissac

 

Ma Très-Révérende Mère,

Exaltons la Croix !

Nous venons de conduire à sa dernière demeure notre chérie Soeur Dorothée Marguerite-Marie-Térèse de Saint Michel, professe de notre Monastère, âgée de 62 ans 8 mois et de religion 40 ans 4 mois.

La mort inopinée de cette bien-aimée Soeur (car cinq jours ont suffi pour nous la ravir), a plongé nos coeurs dans une bien vive affliction. Le vide immense qu'elle laisse parmi nous se fera longtemps sentir.

Elle a été si éminemment religieuse, dès le début de son entrée au Carmel, qu'elle parais­sait plutôt une professe parfaite, qu'une novice à former. Son application assidue à tout ce qui concerne le service de Dieu, était ce qui la caractérisait. La récitation de l'Office canonial surtout, avait pour son âme un attrait irrésisti­ble: il nl'était jamais assez long, au gré de ses désirs.

Son obéissance passive, son respect envers ses Supérieurs dans lesquels elle n'envisageait jamais que Dieu seul, la trouvaient toujours souple et docile en présence de leurs moindres désirs.

Nous sommes toutes inclinées à croire, ma digne Mère, que notre chère fille a porté au Tribunal du Souverain juge la robe blanche de son Baptême, embellie de la pratique fidèle de ses voeux de religion et de toutes nos observances régulières. Malgré la faiblesse de sa constitution, son amour pour Dieu et le salut des âmes lui rendait assez facile les austérités du Cloître. Pour elle, le moindre en toutes choses, était toujours le meilleur.

Notre chère Soeur a pu recevoir les derniers sacrements, avec sa pleine connaissance, le jour de la fête de notre Père Saint Joseph et a rendu sa belle âme à Dieu la nuit suivante, à 2 heures.

Nous avons la douce confiance, ma Révérende Mère, que notre chère Soeur est peut-être déjà en possession du grand bien qu'elle a uniquement cherché pendant sa vie. Cependant, comme pour paraître devant Dieu, il faut être dégagé des plus légères poussières de la fragilité humaine, nous vous prions de vouloir bien lui faire rendre au plus tôt les suffrages de notre Saint Ordre. Par grâce, une Communion de votre Sainte-Communauté ; l'indul­gence des six Pater et tout ce que votre charité vous suggérera.

Avec notre reconnaissance, daignez agréer l'expression du religieux respect avec lequel je suis au pied de la croix, Ma Révérende Mère,

Votre humble soeur et servante,

Sr TÉRÈSE DE JÉSUS.

R. C. I.

De notre monastère de Jésus Réparateur des Carmélites de Moissac, le 22 Mars 1896.

Retour à la liste