Carmel

12 novembre 1892 – Aurillac

 

Ma Révérende et très Honorée Mère,

Paix et très humble salut en Notre-Seigneur, qui vient d'affliger sensi­blement nos coeurs en enlevant à notre religieuse affection, après une maladie de quelques heures seulement, notre très chère et bien-aimée Soeur Joséphine Marie de Jésus, née à Bruxelles, âgée de 66 ans, 11 mois et 8 jours, et de religion 23 ans, 9 mois et 9 jours.

Je n'essayerai pas, ma révérende Mère, de louer ici, comme il convient, notre si regrettée Soeur, car elle avait manifesté souvent et avec instance le désir qu'on ne fît pas de circulaire après sa mort.

 

Je ne puis toutefois m'empêcher de vous dire combien notre chère Soeur nous a édifiées par la grande sainteté de sa vie, durant les 23 ans qu'elle a passés au milieu de nous. Humilité, douceur, renoncement, morti­fication, esprit de recueillement et d'union avec Dieu, zèle des âmes, toutes les vertus en un mot qui constituent la vie religieuse, elle les a pratiquées au plus haut degré !

Mais c'est surtout par son ardent amour de l'Eucharistie, ma révé­rende Mère, que notre bien-aimée Soeur faisait l'admiration de la Commu­nauté.

Le désir qu'elle ressentait de la sainte Communion était devenu irré­sistible. A ses yeux, la Communion était le but de toutes les aspirations, la satisfaction de tous les besoins, le céleste remède à tous les maux, le suprême adoucissement de toutes les douleurs.

Aussi Dieu, comme pour la récompenser, a-t-Il voulu permettre que le jour de sa mort elle eut le bonheur de communier deux fois, le matin, à la Messe et le soir, en Viatique, quelques instants avant de rendre le dernier soupir, vendredi 11 novembre, à 8 heures du soir.

Je m'arrête, ma révérende Mère, dans la crainte de transgresser les volontés si formellement exprimées de notre chère soeur Marie de Jésus, et avec le regret de ne pouvoir vous faire connaître en détail les traits édifiants de sa sainte vie et de sa pieuse et douce mort.

L'air de béatitude empreint sur les traits de notre chère défunte nous fait espérer qu'elle jouit déjà de la récompense promise. Cependant comme les jugements de Dieu sont impénétrables, et qu'il pourrait manquer quel­que chose à cette âme d'élite pour être admise à la béatitude éternelle, nous vous prions, ma révérende Mère, de vouloir bien lui faire rendre au plus tôt les suffrages de notre saint Ordre ; par grâce, une Communion de votre fervente Communauté, l'Indulgence des six pater et quelques invo­cations à Marie-Immaculée, à Notre Père Saint-Joseph, à notre sainte Mère Thérèse, à notre Père Saint-Jean de la Croix et à Saint-Antoine de Padoue, objets de sa tendre dévotion. Elle vous en sera très reconnaissante, ainsi que nous qui avons l'honneur de nous dire, dans les Sacrés Coeurs de Jésus et de Marie,

Ma Révérende et très Honorée Mère,

 

Votre très humble soeur et servante

Soeur Marie-Rose de la Passion.

Rel. carm. ind.

De notre monastère du Saint-Coeur de Marie, sous la protection de notre Père Saint-Joseph, de notre Sainte Mère Térèse et de Saint-Antoine de Padoue des Carmélites d'Aurillac,

le 12 novembre 1802.

 

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