Carmel

06 Février 1893 – Marseille

 

Ma Révérende et Tués Honorée Mère,

Paix el très-humble salut en Notre-Seigneur, qui, au lendemain de sa Présentation au Temple, a voulu nous faire partager le sacrifice qu'il venait offrir de Lui-même à son Divin Père, en enlevant à notre religieuse affection notre bien-aimée Soeur Angèle-Thérèse-Marie du Mont-Carmel, de notre Père Saint Joseph, de notre Père Saint Jean de la Croix et de Sainte Madeleine ; professe de notre Communauté, âgée de 67 ans, trois mois, 22 jours, et de religion 28 ans 9 mois ; le Divin Maître se plaisant ainsi à nous faire dire, dès le début de notre priorat, ce fiat mystérieux dont l'acceptation généreuse peut seule faire trouver la consolation dans la Croix.

Notre-Seigneur, qui, dès le berceau, fit de cette soeur son enfant privilégiée, semblait lui avoir adressé plus qu'à tout autre ces touchantes paroles : « Apprenez de moi que je suis doux et humble de coeur. » Aussi tel est le suave parfum qu'exhalera, du berceau à la tombe, sa vie pleine d'édification et de mérites.

Née d'une famille respectable des plus considérées de notre ville, notre petite Angèle partageait avec un frère chéri et une soeur bien-aimée les jeux de l'enfance, et c'est dans une de ces récréations enfantines qu'elle nous montrera déjà cet esprit de foi qui l'a toujours caractérisée. Un jouet se trouvant un jour brisé en plusieurs mor­ceaux et les petits coupables ne répondant aux interrogations qui leur étaient faites que par ces mots : « C'est An­gèle, c'est Angèle ! » la pauvre enfant, à bout d'arguments, finit par s'écrier : Eh bien ! on le verra au jour du jugement ! Voilà bien toute sa vie : s'en rapporter toujours à Dieu et tout attendre de Lui.

Placée dans un des meilleurs pensionnats de Marseille, Angèle se disposa par l'innocence de sa vie à sa première communion, qu!elle fit avec la ferveur et le sérieux qui était le fonds de son caractère. Que se passa-t-il en ce moment entre le bien-aimé de son coeur et cette âme si pure ? Dieu seul le sait, car cette chère Soeur, d'une humilité profonde, cachait avec soin les grâces qui déjà lui étaient départies.

Les excellents principes qu'elle avait déjà puisés dans sa vertueuse famille fructifièrent de plus en plus auprès de ses dignes Maîtresses. En même temps se perfectionnait cette vertu solide et sérieuse qui l'a rendue, toute sa vie, l'édification de ceux qui l'ont connue et lui a gagné l'estime de toute notre communauté, durant les vingt-neuf ans que nous avons eu le bonheur de la posséder.

Angèle grandit donc appliquée, soumise et respectueuse. Puis, ses études achevées, elle partagea son temps entre ses devoirs de famille, la prière et les bonnes oeuvres: La lecture faisait ses délices; elle choisissait de pré­férence les oeuvres de Saint Augustin, de Massillon et de Bourdaloue, comme concordant mieux avec la gravité de son esprit. Aussi était-ce sur sa prédilection marquée pour ces auteurs distingués que nos jeunes Soeurs, à la récréation, aimaient à la faire revenir. Dans ces derniers temps, ses facultés mentales, déjà affaiblies, semblaient retrouver à ces souvenirs une vie nouvelle.

L'amour de la sainte Pauvreté, qui était en elle déjà dans le monde, et qui nous a tant édifiées en cette chère Soeur dans le cloître, la caractérisait. Elle n'aimait pas les choses neuves et se servait de préférence de tout ce qu'elle avait de plus usé. Par suite de ce même esprit et afin de donner plus de temps au travail manuel, elle ne sortait ordinairement que vers la fin du jour. On avait même remarqué que lorsqu'elle suivait une retraite, elle profitait de ces sorties pour faire des commissions ou achats qu'il aurait semblé plus naturel de remettre dans un autre temps.

Un petit trait, ma Révérende Mère, vous montrera une fois encore combien cette chère Soeur était affermie dans l'abandon à la Providence: chargée de remettre à quelqu'un, pour une bonne oeuvre, une somme assez importante, quelle ne fut pas sa surprise, en arrivant à la porte du destinataire, de ne plus trouver cet argent sur elle. Aussitôt, sans se troubler, elle retourne sur ses pas, en demandant à Dieu qu'il lui plaise de faire que cette somme ne soit pas perdue. Chose étonnante ! quoique dans une des rues les plus fréquentées de notre ville, elle aperçoit bientôt devant elle ce précieux dépôt, tombé par mégarde: aucune main ne l'avait encore ramassé.

Angèle s'était enrôlée dans l'association du catéchisme de persévérance, elle l'édifia longtemps par son exacti­tude et sa piété. Mais cette vie si régulière et si saintement remplie ne suffisait pas à son amour pour Dieu; elle voulait être à Lui sans partage; aussi refusa-t-elle sans hésiter les partis honorables qui lui furent proposés. Les soins à donner à sa mère et à une tante âgée étaient les seuls liens capables de la retenir dans le monde. Tout en se dévouant à ces êtres chéris, elle nourrissait au fond de son coeur la douce confiance qu'à l'heure fixée par Lui de toute éternité, Dieu lui ouvrirait enfin les portes du Carmel, objet de tous ses voeux. Ce ne fut que vers l'âge de trente-huit ans, après la mort de sa bonne Mère, qu'elle put s'envoler dans l'arche sainte. Les rapports qu'elle entretint durant ces années d'intervalle avec notre bien-aimée Mère Saint Hilarion, de pieuse et vénérée mémoire, la fortifiaient dans cette attente, en même temps qu'ils faisaient apprécier à cette digne Mère les qualités de sa future fille. Nous citons volontiers à ce sujet la satisfaction qu'elle en témoigna plus tard. Trois ans après la fondation de notre communauté, celte vénérée Mère étant retournée, en 1862, au Carmel de Longchamp (transféré depuis au boulevard Guigou) nous eûmes la consolation de recevoir sa précieuse visite pendant le noviciat de notre bonne Soeur Marie du Mont-Carmel. La Mère Maîtresse des novices entendit alors de notre chère Mère fondatrice, au sortir d'un entretien avec cette bonne Soeur, ces consolantes paroles : Oh ! quelle sainte âme vous avez là !

En effet, on ne tarda pas à découvrir, sous une profonde humilité, les précieuses qualités qui devaient faire de notre chère Soeur une vraie fille de notre sainte Mère Thérèse. Désireuse de connaître ses nouveaux devoirs et de les pratiquer parfaitement, elle fit de nos saintes règles, constitutions et usages, son étude assidue. Silencieuse et recueillie, le travail et la prière faisaient tout son bonheur. Plus qu'une autre cependant, la chère novice eut quelques difficultés à se former à nos saints usages, pourtant si facilement retenus par ses jeunes compagnes qu'égayait parfois, à son insu, la manière un peu singulière dont elle s'acquittait de ses petites fonctions du no­viciat. Si elle venait à s'apercevoir de leur hilarité, loin de s'en formaliser, cette bonne Soeur riait avec les autres et ne mettait que plus de zèle à mieux faire une autre fois. Aussi sa bonne volonté sut triompher de tout et elle fut admise au temps ordinaire à la vêture et à la profession, à la satisfaction de toute la communauté.

Chargée tout à la fois de la lingerie et de la provisoirerie, son amour pour la sainte Pauvreté se satisfit large­ment dans ces deux offices; tout ce qu'il y avait de pire, tant pour la nourriture que pour le vêtement, était l'objet de son choix ; ses portions étaient souvent composées de trois ou quatre restes différents. Très ménagère de son temps, elle avait le secret de faire plusieurs choses à la fois et n'épargnait ni ses moments, ni sa peine pour subvenir à propos aux besoins de chacune de ses Soeurs. On admirai! aussi son esprit de mort, sa condescendance, son assiduité au travail de la lingerie dont elle a été chargée presque toute sa vie.

La Mère Dépositaire lui rend ce témoignage qu'elle ne lui a jamais fait acheter du fil pour cet office, y suppléant par toutes les deffilures qu'elle pouvait se procurer. Bonne et charitable pour toutes ses Soeurs, celles qui lui furent données pour compagnes dans ces divers offices n'ont jamais eu qu'à se louer de ses procédés à leur égard : elle avait même quelquefois des industries charmantes pour leur rendre agréable l'accomplissement de leurs devoirs communs. Outre ces diverses occupations, elle trouvait encore le temps de faire des fleurs pour nos ermitages. Grâce aux bontés de sa pieuse famille, nous en avons un fort gracieux dans notre jardin, dédié à Notre-Dame du Mont-Carmel. La tendre dévotion que notre bonne soeur eut toute sa vie pour la Très-Sainte Vierge la rendait heureuse d'orner son autel. Elle si amie de la pauvreté pour tout ce qui lui était personnel, ne trouvait rien d'assez beau lorsqu'il s'agissait de cet ermitage; aussi était-ce un vrai bonheur pour elle chaque fois qu'un nouveau cadeau venait en embellir la décoration. D'autres dons généreux, soit pour notre Chapelle, soit en provi­sions de ménage, augmentent notre reconnaissance pour cette respectable famille.

Sainte Marie-Madeleine était aussi pour notre excellente Soeur l'objet d'une dévotion spéciale. Elle se transpor­tait en esprit dans la solitude de l'amante bien-aimée de Jésus et s'y nourrissait avec elle de la contemplation des choses célestes. Son goût délicat nous ménageait toujours quelques gracieuses surprises, quand le 22 juillet ramenait tous les ans la communauté auprès de la sainte grotte dont elle avait le soin.

Notre chère Soeur du Mont-Carmel, étant douée d'une bonne constitution, eut le bonheur de garder nos saintes observances pendant un grand nombre d'années; son amour de la mortification lui faisait même y ajouter des pénitences de surplus. Elle s'y était déjà exercée dans sa famille, où l'on s'était aperçu qu'elle portait habituelle­ment la laine. On pouvait toujours compter sur elle quand il s'agissait de passer la nuit auprès d'une Soeur défunte à l'infirmerie.

Quoique d'un caractère un peu original, ainsi que vous avez pu le comprendre, ma Révérende Mère, notre bien-aimée Soeur se prêtait toujours volontiers à tout ce que l'on demandait d'elle : on la voyait se dérider dans nos petites fêtes de famille et remplir de bonne grâce, bien qu'avec un cachet particulier, le rôle qui lui était assigné.

Ame vraiment intérieure et mortifiée, ma Soeur du Mont-Carmel parlait peu, ne s'occupait que de son devoir et laissait passer sans y faire attention ce qui ne la regardait pas. Nous avons souvent remarqué avec édification que lorsqu'on apportait quelque objet en récréation pour le faire voir à la communauté, elle évitait de le regarder, à moins qu'on ne l'y invitât. Un jour, une de nos soeurs voulut connaître son sentiment sur une action quelque peu défectueuse dont elle avait été témoin. « Je n'ai jamais jugé personne », répondit-elle simplement. Cette réponse, de la part d'une Soeur dont nous connaissons toute la droiture et la sincérité, nous donne l'intime confiance que, selon la parole du Divin Maître, elle aura reçu du souverain Juge un favorable accueil.

Nous pouvons attribuer à cet esprit de mortification qui l'accompagnait partout le soin qu'elle avait de tout ce qui était à son usage, au point que les officières étaient surprises qu'elle usât si peu .ses vêtements. Les petits meubles de sa cellule, après plus de vingt ans de service, étaient presque aussi propres que pendant son no­viciat.

Depuis quelques années, un affaiblissement progressif se manifestait dans l'organisme et les facultés mentales de notre bien-aimée Soeur. Sa mémoire était surtout gravement atteinte. Nous eûmes lieu d'admirer alors combien l'habitude de la vertu était puissante dans cette âme si religieuse. Il était vraiment édifiant, sinon quelque peu plaisant, de la voir au choeur, le livre du haut en bas, psalmodier avec sa gravité ordinaire l'office divin don elle savait bien des parties par coeur; ou bien, dans son empressement pour s'y rendre, elle arrivait toute joyeuse sans même se douter qu'elle portait sa corbeille à ouvrage pour bréviaire, ou sa couverture pour manteau. Ces petits incidents, qui divertissaient fort nos jeunes Soeurs, n'étaient pour elle qu'une occasion de montrer une fois de plus son excellent caractère, car elle riait de ces aventures peut-être plus encore que celles qui l'en faisaient apercevoir. À la récréation, elle, autrefois si sérieuse, se laissait aller pour la moindre chose à une gaîté subite, tout en conservant ses manières polies et respectueuses, qui la distinguèrent toujours.

L'hiver dernier, vers la fin de décembre, une fausse attaque surprit notre chère Soeur du Mont-Carmel pendant la messe. Grâce aux soins qui lui furent immédiatement prodigués, elle revînt bientôt à son état ordinaire; mais un second accident, plus grave que celui-ci, faillit nous enlever cette bien-aimée Soeur le 6 janvier suivant. Se trouvant seule au réfectoire pendant que la Communauté achevait les Heures, le froid la saisit ; elle tomba sous la table. Par un effet de la divine Providence, une de nos Soeurs du voile blanc, qui vînt à passer par là, l'aperçut dans cette situation ; elle s'empressa de lui porter secours et d'avertir la Révérende Mère qui était alors en charge. La croyant morte, ou à ses derniers moments, nous fîmes entrer aussitôt Monsieur notre aumônier pour lui donner la sainte absolution. Elle fut ensuite transportée à l'infirmerie où peu à peu elle reprit ses sens. Notre dévoué docteur, appelé en même temps, ne nous dissimula pas la gravité de son état; deux jours après, sur la proposition qui fut faîte à notre chère malade de recevoir les derniers sacrements, elle témoigna la satisfaction qu'elle en éprouverait. En effet, le mieux s'étant de plus en plus accentué, ce fut une joie pour nous toutes de voir combien cette pieuse cérémonie consola son âme. Sa bonne constitution reprit peu à peu le dessus ; nous eûmes le bonheur de revoir bientôt notre bonne Soeur à la récréation, et l'été se passa assez bien ; il lui devenait cependant de plus en plus difficile de rendre sa pensée. Quel sujet de mérites pour cette pauvre infirme de ne pouvoir ni faire connaître ce qu'elle éprouvait intérieurement, ni demander les soulagements que réclamait son état ! Cette épreuve par laquelle Dieu purifiait de plus en plus son âme, aura sans doute beaucoup abrégé pour elle les peines de l'autre vie, car elle n'avait pas même la consolation de pouvoir s'expliquer davantage avec ses confesseurs. Sa faiblesse morale, anticipant sur les années, et le reste de paralysie qu'elle conservait dans presque tous ses membres nous faisaient toujours redouter quelque crise funeste. Elle résista pourtant aux froids rigoureux que nous avons eus au mois de décembre et dans la première quinzaine de janvier.

En toute occasion, et surtout dans nos récréations, notre bien-aimée Soeur nous donnait, sans s'en douter, de nombreux sujets d'édification. Elle avait beaucoup de difficulté à se mouvoir par suite de la raideur de ses membres, mais lorsqu'il était nécessaire qu'elle se prêtât à faire quelques mouvements pour changer de situation, il suffisait que sa charitable infirmière lui rappelât la pensée de l'obéissance pour que notre vertueuse infirme se rendît à tout ce qu'on désirait d'elle.

Le mercredi 18 janvier, quelques symptômes alarmants se manifestèrent. Craignant une surprise, nous voulû­mes procurer de nouveau à notre bien-aimée Soeur la grâce de l'absolution, bien qu'elle se fût confessée peu de jours auparavant. Notre digne aumônier, si dévoué à notre communauté, vînt l'administrer pour la seconde fois et lui appliqua les indulgences de notre saint ordre; bien qu'elle ne pût s'exprimer, elle nous fît comprendre combien elle goûtait les paroles de cet excellent prêtre. Veuillez, ma révérende Mère, vous unir à nous pour le recommander à Dieu dans vos bonnes prières.

Après quelques jours d'une légère amélioration, pendant lesquels nous pûmes admirer l'héroïque patience et la parfaite résignation de notre chère malade, elle qui pendant toute sa vie avait tant redouté le moment de la mort, le vit approcher sans témoigner aucune frayeur et conserva jusqu'à la fin le calme le plus complet; nous en avions l'intime confiance, bien qu'elle ne pût exprimer ce qui se passait en elle. Chaque fois qu'on lui suggérait de pieuses aspirations, sa physionomie témoignait combien elle s'y unissait. Une chose vraiment digne de remar­que et que nous attribuons à la maternelle protection de Marie, c'est que, chaque fois que ses charitables infir­mières murmuraient à son oreille : ô Marie conçue sans péché ! elle retrouvait la parole pour achever l'invocation, et cela, jusqu'au dernier jour. La grâce de l'absolution lui fut renouvelée deux fois dans cette dernière semaine: Notre Révérend Père confesseur, religieux Dominicain, ajouta à cette grâce l'application des indulgences si pré­cieuses du Saint Rosaire.

Dès le commencement de cette nouvelle crise, nous avions fait appeler notre excellent docteur, qui jugea comme nous notre pauvre malade aux portes du tombeau. Permettez-nous, ma révérende Mère, de solliciter pour ce véritable ami de notre Carmel le secours de vos saintes oraisons, témoignage de notre reconnaissance auquel sa piété le rend bien sensible.

Le Jeudi 2 février, notre bien-aimée Soeur baissa sensiblement ; l'illusion n'était plus possible, l'agonie allait commencer: elle fut longue et douloureuse, mais paisible; à chaque bonne parole que nous lui adressions, lui demandant de nous faire un signe pour connaître si elle nous entendait, bien que ses yeux fussent à demi-fermés, le mouvement qu'elle leur donnait alors nous faisait comprendre qu'elle avait encore quelque connaissance. Vers midi nous nous réunîmes auprès de notre chère agonisante pour réciter les prières du manuel ; un peu plus tard, nous les réitérâmes devant le Très Saint-Sacrement exposé à l'oratoire. Son même état se prolongea jusqu'à neuf heures ; le râle se manifesta alors d'une manière qui annonçait la proximité de la mort. Nous l'assistions de nos prières ; la paix de son âme n'avait cessé de se refléter sur son visage, ce qui était pour nous le sujet d'une grande consolation. La vie de cette bonne Soeur avait toujours été si douce, si unie, que sa mort ne pouvait en être que l'écho. En effet, ce fut ainsi qu'elle rendit sa belle âme à son Créateur, au moment où la communauté, sortant de Matines accourait à l'infirmerie pour recevoir, avec nous son dernier soupir.

Privées de la consolation de conserver nos bonnes Soeurs défuntes dans la clôture, les nombreux témoignages de sympathie que nous avons reçus en cette occasion ont été pour nous un précieux dédommagement à cette peine. La confrérie des pénitents Carmelins, qui nous montre toujours dans ces tristes circonstances son fraternel dévouement, a député un certain nombre de ses membres pour chanter la Messe de Requiem et assister aux ob­sèques de notre bien-aimée Soeur.

Notre vénéré Père Supérieur, malgré la délicatesse de sa santé, a daigné y officier et accompagner la chère défunte à sa dernière demeure. Que votre charité, ma Révérende Mère, se joigne à nous pour obtenir la grâce de conserver longtemps ce digne Père dont les bontés incessantes nous pénètrent de la plus profonde reconnaissance. Plusieurs autres membres distingués du clergé de Marseille, amis de notre Carmel, ont bien voulu également honorer de leur présence la cérémonie funèbre. Qu'ils nous permettent de leur offrir ici le témoignage de notre religieuse gratitude-

Bien que la vie si pure et la mort si sainte de notre chère Soeur nous semblent un gage assuré de son bonheur éternel, comme les jugements de Dieu nous sont cachés, s'il lui restait encore quelque tache à expier, nous vous prions, ma Révérende Mère, de vouloir bien lui faire rendre au plus tôt les suffrages de notre saint ordre : par grâce, une communion de votre fervente communauté, une journée de bonnes oeuvres, l'indulgence des six Pater, celles du Via Cris et quelques invocations à la Sainte Vierge et à Sainte Madeleine, objets de sa tendre dévotion ; elle en sera très reconnaissante ainsi que nous, qui avons la grâce de nous dire, avec le plus religieux respect, en union de vos saintes prières.

Ma révérende et très honorée Mère,

 

Votre humble Soeur et servante :

Sr MARIE-BÉATRIX DE SAINT JOSEPH,

"          r. c. i.

De notre monastère du Très-Saint-Coeur de Marie des Carmélites de Marseille, rue Reinard, 72, le 6 février 1893.

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