Carmel

02 juillet 1890 – Saintes

 

Ma Révérende et Très Honorée Mère,

Amour et soumission à l'adorable volonté de Dieu.

Un mois à peine s'était écoulé depuis la pieuse mort de notre regrettée soeur Saint-Joseph, quand il a plu à N.-S. d'appuyer de nouveau sa croix sur nos coeurs résignés en enlevant à notre religieuse affection notre chère soeur Louise de Jésus, tourière agrégée, âgée de 45 ans, 3 mois et quelques jours et de religion 13 ans.

Cette bonne soeur avait contracté ses premiers engagements au Carmel d'Albi, d'où elle nous fut envoyée il y a 11 ans.

Il nous est doux de lui rendre aujourd'hui ce témoignage que, depuis cette époque, elle s'est toujours dévouée à notre communauté avec un zèle et une affection que nous savions apprécier. Elle s'est fait remarquer par une constante exactitude à tous ses devoirs et un grand amour du travail ne perdant pas un instant. Son adresse, jointe à son bon vouloir, lui fournissait le moyen de nous rendre une foule de petits services pour les travaux de toutes sortes que nous aimions à lui confier. Elle nous aidait, non seulement pour les ouvrages de couture, mais elle faisait aussi de jolies broderies pour la Sacristie, qui gardera longtemps ces souvenirs de sa piété et de son coeur dévoué à l'ornementation des Saints autels.

 

C'est dans ces saintes occupations, ma Révérende Mère, que la mort est venue frapper notre regrettée soeur qui formait d'édifiants projets d'une vie encore plus parfaite, ainsi qu'elle nous le disait et nous l'écrivait peu d'heures avant de tomber comme foudroyée par la terrible maladie qui nous l'a enlevée.

Son état, si grave qu'il fût, nous permit pourtant d'avoir par instants quelques lueurs d'espérance. Elle profitait alors de ces moments de trêve à ses grandes douleurs pour adresser d'affectueuses paroles et aussi d'utiles avis, à ses chères compagnes du Tour, cons­ternées à la pensée d'une si prochaine séparation.

Elles unissaient leurs forces et leurs voeux pour la soulager et la sauver, si telle eût été la volonté de Dieu, mais il en avait décidé autrement et la péritonite aiguë, dont elle avait été subitement atteinte, nous l'a enlevée le 27 juin, à 5 heures du soir, après trois jours de maladie. Elle est décédée paisiblement après avoir reçu les derniers Sacrements dans des dispositions très consolantes, fortifiée et encouragée par les pieuses exhortations de notre digne et si dévoué Père aumô­nier, qui lui a procuré toutes les grâces attachées à son saint ministère, et a reçu son dernier soupir. Nous avons eu seulement à regretter que ses fréquents vomissements l'aient privée de recevoir la sainte Communion.

 

Malgré l'intime confiance que nous avons du bonheur éternel de notre chère soeur Louise de Jésus, nous la recommandons instamment à vos ferventes prières, ma Révérende Mère, et à celles de toute votre communauté en vous priant de faire offrir, pour le repos de son âme, le saint sacrifice de la Messe et l'application des indulgences que votre charité vous inspirera. Elle vous en sera très reconnaissante ainsi que nous, qui avons la grâce de nous dire, avec le plus profond et affectueux respect,

Ma Très Révérende Mère,

 

Votre très humble servante et Soeur en N. S.,

Sr MARIE DE JÉSUS HOSTIE,

r. c. ind.

P.-S. — Nous sommes très fidèles à faire acquitter les Messes pour les soeurs Tourières décédées. Nous osons prier tous nos chers Carmels de nous faire la même charité.

De notre Monastère de l'Immaculée Conception, de notre Père St-Joseph et de Ste-Colombe des Carmélites de Saintes, le 2 Juillet 1890.

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