Marie Guérin à Céline Pottier + Jésus J.M.J.T. 30 Nov. 99 Ma petite Céline chérie, Quelle joie m'a causée ta longue lettre ! Je l'ai lue et relue et j'ai remercié le bon Dieu. J'ai remercié aussi petite Thérèse qui du haut du ciel, veille sur sa chère petie amie d'enfance, ce sont de ses coups de grâce, ce qui t'est arrivé. J'avais pensé bien des fois pendant ta maladie , ce que tu as pensé depuis, c'est qu'elle t'était envoyée peut-être pour que tu trouves un guide éclairé pour ton âme. Je ne m'étais pas trompée, tu sais, quand le bon Dieu veut du bien à une âme Il remuerait plutôt ciel et terre que de ne pas acomplir sa volonté. Profite des avis de ce saint prêtre, moi dont la vocation est pour les prêtres, je prierai tout spécialement pour lui afin qu'il soit éclairé à ton sujet. Petite Soeur chérie, ne crois pas que le bon Dieu ne t'accorde pas aussi bien des petits miracles, (car ce que je t'ai raconté, n'en est pas un) mais de ces petites délicatesses qui touchent le coeur. Ce n'est pas parce que je suis sainte qu'Il m'en envoie, c'est justement parce que je suis faible, je te dirai comme petite Thérèse, c'est parce que je suis au contraire une toute petite âme. Aux touts petits enfants on donne des bonbons, de même aux petites âmes, le bon Dieu envoie des douceurs. Tu me parles que ton mari est l'objet de mépris, de calomnies, oh ! chère petie Soeur cela afflige ton coeur, ta nature, et moi aussi, mais notre âme combien elle devrait être heureuse d'avoir ainsi une riche moisson à récolter. Notre doux Jésus n'a-t-il pas souffert plus que la calomnie puisqu'il a été accusé et condamné injustement. Et pour qui acceptait-il tout cela ? Pour sa petie Céline, Il la voyait, l'aimait et pour elle seule Il a donné tout son sang. Et toi ne veux-tu pas souffrir q.q. chose pour lui ? Voilà le moyen qui se présente à toi. Oh ! je sais ce que sont ces genres de souffrances. Autrefois, lors du Journal, crois-tu que nous n'avons pas eu à souffrir des injures lancées contre Papa. Mais nous acceptions tout cela pour le bien de la religion, pour la conversion de ces âmes qui l'attaquaient. Petite Soeur chérie, fais de même, tu es entre le mains du bon Dieu, Il saura un jour faire éclater l'innocence de ton mari. Et quand même Il ne le ferait pas sur la terre, combien au jour du jugement ne vous couvrira-t-il pas de gloire, à la honte des malheureux qui ont commis l'injustice. Mais, vois-tu, prie, prie beaucoup pour ces gens injustes afin qu'ils se convertissent. J'ai envie de t'envoyer d'ici q.q. temps une photog. de ma Sr Thérèse de l'Enf. Jésus, je suis sûre que cela te fera plaisir. Prie-la beaucoup, si tu savais comme elle est aimée et le bien qu'elle fait partout. Elle réalise, cette parole qu'elle avait dite, un jour : « Je veux passer mon ciel à faire du bien sur la terre ». Vivons d'amour toutes les deux afin de lui ressembler, acceptons toutes nos épreuves, avec esprit de foi, ne voyant pas les créatures, mais la main du bon Dieu qui nous les envoie, et nous serons heureuses. Ce que tu me dis au sujet de ma tante ne m'étonne pas, ne te tracasse pas d'avoir dit ce que tu m'as dit, tu sais dans quel coeur tu as mis ce secret. Et combien je l'ai compris. Quand même cela n'aurait pas été vrai, crois-tu que le bon Dieu n'a pas voulu t'envoyer cette petite épreuve ; supposons, Il voulait, Il te faisait voir, Il permettait que tu crois voir des choses qui n'étaient pas, mais tu en avais le mérite. Oh ! combien je connais ces remords dont tu me parles. Que de fois depuis que je suis au Carmel, je les ai éprouvés au sujet des miens. Mais ce sont des remords qui n'ont pas lieu d'exister, servons-nous-en pour donner au bon Dieu, pour souffrir pour lui. Adieu petite Soeur, mille baisers bien tendres, ainsi qu'aux bébés. Mon souvenir à ton mari. [non signé]
