Carmel

CJ Mai 1897

La santé de Thérèse

Au mois de mai 1897, Thérèse tousse beaucoup. On lui donne du sirop contre la toux. Elle a de nouveau des accès de fièvre. On la traite toujours avec des vésicatoires ainsi qu'avec des séances de pointes de feu.

Elle est déchargée de tout emploi, ne va plus à l'office au choeur, et cesse sa charge auprès des novices.

Le 1er mai

1

Ce n'est pas «la mort» qui viendra me chercher, c'est le bon Dieu. La mort, ce n'est pas un fantôme, un spectre horrible, comme on la représente sur les images. Il est dit dans le catéchisme que «la mort c'est la séparation de l'âme et du corps», ce n'est que cela !

2

J'ai eu le coeur tout rempli d'une paix céleste aujourd'hui. J'avais tant prié la Sainte Vierge hier soir, en pensant que son beau mois aller commencer !

Vous n'étiez pas à la récréation ce soir. Notre Mère nous a dit qu'un des missionnaires embarqués avec le P. Roulland était mort avant son arrivée dans sa mission. Ce jeune missionnaire avait communié sur le vaisseau avec les hosties du Carmel données au P. Roulland... Et maintenant il est mort... sans avoir fait aucun apostolat, sans s'être donné aucune peine, comme d'apprendre le chinois. Le bon Dieu lui a donné la palme du désir ; mais voyez comme il n'a besoin de personne.

Je ne savais pas alors que Mère Marie de Gonzague lui avait donné le P.Roulland comme second frère spirituel. Les paroles que je viens de rapporter lui étaient écrites à elle-même par le P.R. mais ayant défense de Notre Mère de me le confier, elle ne me parlait que sur ce qu'elle avait entendu à la récréation.

Ce fut un grand sacrifice pour elle que ce silence de près de 2 ans sur ses rapports avec le Missionnaire en question...

Notre Mère lui avait demandé de peindre pour lui une image sur parchemin. Comme j'étais sa première d'emploi pour la peinture, elle aurait pu profiter de la circonstance pour me demander un conseil et par là me faire tout deviner. Mais au contraire, elle se cachait de moi le mieux qu'elle pouvait, venant chercher à la dérobée - je l'ai su plus tard - le brunissoir pour faire briller l'or et que je gardais sur notre table. Elle le rapportait quand j'étais absente.

Ce ne fut que trois mois avant sa mort que Notre Mère lui dit d'elle-même de me parler librement sur ce sujet comme sur tout autre.

Le 7 mai

1

7 heures du matin.

C'est licence aujourd'hui, j'ai chanté «ma Joie» en m'habillant.

2

Notre famille ne restera pas longtemps sur la terre... Quand je serai au Ciel, je vous appellerai bien vite... Oh ! que nous serons heureuses ! Nous sommes toutes nées couronnées...

3

Je tousse ! Je tousse ! Ça fait comme la locomotive d'un chemin de fer quand elle arrive à la gare. J'arrive aussi à une gare ; c'est celle du Ciel, et je l'annonce !

Le 9 mai

1

Nous pouvons bien dire, sans nous vanter, que nous avons reçu des grâces et des lumières bien particulières. Nous sommes dans la vérité ; nous voyons les choses sous leur vrai jour.

2

A propos des sentiments dont on ne peut se défendre quelquefois, lorsqu'après avoir rendu un service on ne reçoit aucun témoignage de reconnaissance.

Moi aussi, je vous assure, j'éprouve le sentiment dont vous me parlez ; mais je ne suis jamais attrapée, car je n'attends sur la terre aucune rétribution : je fais tout pour le bon Dieu, comme cela je ne puis rien perdre et je suis toujours très bien payée du mal que je me donne à servir le prochain.

3

Si, par impossible, le bon Dieu lui-même ne voyait pas mes bonnes actions, je n'en serais nullement affligée. Je l'aime tant, que je voudrais pouvoir lui faire plaisir sans même qu'il sache que c'est moi. Le sachant et le voyant, il est comme obligé «de m'en rendre», je ne voudrais pas lui donner cette peine là...

Le 15 mai

1

Je suis très contente de m'en aller bientôt au Ciel, mais quand je pense à cette parole du bon Dieu : « Je porte ma récompense avec moi pour rendre à chacun selon ses oeuvres »,Erreur ! Source du renvoi introuvable. je me dis que, pour moi, il sera bien embarrassé. Je n'ai pas d'oeuvres ! il ne pourra donc pas me rendre «selon mes oeuvres»... Eh bien ! il me rendra «selon ses oeuvres à Lui...»

2

Je me fais une si haute idée du Ciel, que, parfois, je me demande comment, à ma mort, le bon Dieu fera pour me surprendre. Mon espérance est si grande, elle m'est un tel sujet de joie, non par le sentiment, mais par la foi, qu'il me faudra quelque chose au dessus de toutes pensées, pour me satisfaire pleinement. Plutôt que d'être déçue, j'aimerais mieux garder un espoir éternel.

Enfin je pense déjà que, si je ne suis pas assez surprise, je ferai semblant de l'être, pour faire plaisir au bon Dieu. Il n'y aura pas de danger que je lui laisse voir ma déception ; je saurai bien m'y prendre pour qu'il ne s'en aperçoive pas. D'ailleurs je m'arrangerai toujours de manière à être heureuse. Pour y arriver, j'ai mes petites rubriques que vous connaissez et qui son infaillibles... Puis, rien que de voir le bon Dieu heureux, cela suffira pleinement à mon bonheur.

3

Je lui avait parlé de certaines pratiques de dévotion et de perfection conseillées par les saints et qui me décourageaient.

Pour moi, je ne trouve plus rien dans les livres, si ce n'est dans l'Evangile. Ce livre-là me suffit. J'écoute avec délices cette parole de Jésus qui me dit tout ce que j'ai à faire : «Apprenez de moi que je suis doux et humble de coeur» ; alors j'ai la paix, selon sa douce promesse : ... «et vous trouverez le repos de vos âmes.»

«...Et vous trouverez le repos de vos petites âmes...»

4

Pas l'ombre ! Pas plus que si c'était celle d'un chinois, là-bas à 2.000 lieues de nous.

5

Je jette à droite, à gauche, à mes petits oiseaux les bonnes graines que le bon Dieu met dans ma petite main. Et puis, ça fait comme ça veut ! Je ne m'en occupe plus. Quelquefois, c'est comme si je n'avais rien jeté ; à d'autres moments, cela fait du bien ; mais le bon Dieu me dit : Erreur ! Source du renvoi introuvable.

6

Je voudrais bien aller à Hanoï, pour souffrir beaucoup pour le bon Dieu. Je voudrais y aller pour être toute seule, pour n'avoir aucune consolation sur la terre. Quant à la pensée de me rendre utile là bas, elle ne me traverse même pas l'esprit, je sais très bien que je ne ferais rien du tout.

7

Après tout, cela m'est égal de vivre ou de mourir. Je ne vois pas bien ce que j'aurais de plus après la mort que je n'aie déjà en cette vie. Je verrai le bon Dieu, c'est vrai ! mais pour être avec lui, j'y suis déjà tout à fait sur la terre.

Le 18 mai

1

On m'a déchargée de tout emploi ; j'ai pensé que ma mort ne causerait pas le moindre dérangement dans la Communauté.
Oh ! pour cela, c'est le moindre de mes soucis, ça m'est bien égal !

2

Je vous en prie, ne m'empêchez pas de dire mes «petits» offices des Morts. C'est tout ce que je peux faire pour les soeurs qui sont en purgatoire, et cela ne me fatigue pas du tout. Quelquefois, à la fin d'un silence, j'ai un petit moment ; cela me délasse plutôt.

3

J'ai toujours besoin d'avoir de l'ouvrage de préparé ; comme cela je ne suis pas préoccupée et je ne perds jamais mon temps.

4

J'avais demandé au bon Dieu de suivre les exercices de communauté jusqu'à ma mort ; mais il ne veut pas !
Je pourrais bien, j'en suis sûre, aller à tous les offices, je n'en mourrais pas une minute plus tôt. Il me semble parfois que si je n'avais rien dit, on ne me trouverait pas malade.

Le 19 mai

Pourquoi donc êtes-vous si gaie aujourd'hui ?

Parce que, ce matin, j'ai eu deux «petites» peines. Oh ! bien sensibles !... Rien ne me donne de «petites» joies, comme les «petites» peines...

Le 20 mai

On me dit que j'aurai peur de la mort. Cela se peut bien. Il n'y en pas une ici plus défiante que moi des ses sentiments. Je ne m'appuie jamais sur mes propres pensées ; je sais combien je suis faible ; mais je veux jouir du sentiment que le bon Dieu me donne maintenant. Il sera toujours temps de souffrir du contraire.

2

Je lui montrais sa photographie :

Oui, mais... c'est l'enveloppe ; quand est-ce qu'on verra la lettre ? Oh ! que je voudrais bien voir la lettre !...

Du 21 au 26 mai

1

Théophane Vénard me plaît encore mieux que St Louis de Gonzague, parce que la vie de St Louis de Gonzague est extraordinaire et la sienne tout ordinaire. Puis c'est lui qui parle, tandis que pour le saint, c'est un autre qui raconte et qui le fait parler ; alors on ne sait presque rien de sa «petite» âme !

Théophane Vénard aimait beaucoup sa famille ; et, moi aussi, j'aime beaucoup ma «petite» famille.

Je ne comprends pas les saints qui n'aiment pas leur famille... Ma petite famille de maintenant, oh ! je l'aime beaucoup ! J'aime beaucoup, beaucoup, ma petite Mère.

2

Je vais bientôt mourir ; mais quand ? Oh ! quand ?... Cela ne vient pas ! Je suis comme un petit enfant à qui l'on promet toujours un gâteau : on le lui montre de loin ; puis, quand il s'approche pour le prendre, la main se retire... Mais, au fond, je suis bien abandonnée pour vivre, pour mourir, pour guérir, et pour aller en Cochinchine, si le bon Dieu le veut.

3

Après ma mort, il ne faudra pas m'entourer de couronnes comme Mère Geneviève. Aux personnes qui voudraient en donner, vous direz que je préfère qu'elles mettent cet argent à racheter des petits nègres. C'est cela qui me ferait plaisir.

4

Il y a quelque temps, j'avais beaucoup de peine de prendre des remèdes chers ; mais à présent cela ne me fait rien du tout, au contraire. C'est depuis que j'ai lu dans la vie de Ste Gertrude qu'elle s'en réjouissait pour elle-même, se disant que tout serait à l'avantage de ceux qui nous font du bien. Elle s'appuyait sur la parole de Notre-Seigneur : «Ce que vous ferez au plus petit d'entre les miens, c'est à moi-même que vous le ferez.»

5

Je suis convaincue de l'inutilité des remèdes pour me guérir ; mais je me suis arrangée avec le bon Dieu, afin qu'il en fasse profiter de pauvres missionnaires malades, qui n'ont ni le temps, ni les moyens de se soigner. Je lui demande de les guérir en place de moi par les médicaments et le repos qu'on m'oblige à prendre.

6

On m' a tant répété que j'ai du courage, et c'est si peu vrai, que je me suis dit : Mais, enfin, il ne faut pas faire mentir tout le monde ! Et je me suis mise, avec l'aide de la grâce, à acquérir ce courage. J'ai fait comme un guerrier qui, s'entendant féliciter de sa bravoure, tout en sachant très bien qu'il n'est qu'un lâche, finirait par avoir honte des compliments et voudrait les mériter.

7

Quand je serai au Ciel, que de grâces je demanderai pour vous ! Oh ! je tourmenterai tant le bon Dieu que, s'il voulait d'abord me refuser, mon importunité le forcerait à combler mes désirs. Cette histoire est dans l'Evangile...

8

... Si les saints me témoignent moins d'affection que mes petites soeurs, cela me paraîtra bien dur... et j'irai pleurer dans un petit coin...

9

Les saints Innocents ne seront pas de petits enfant au Ciel ; ils auront seulement les charmes indéfinissables de l'enfance. On se les représente «enfants», parce que nous avons besoin d'images pour comprendre les choses spirituelles.

... Oui, j'espère me joindre à eux ! S'ils veulent, je serai leur petit page, je tiendrai leurs petites queues...

10

Si je n'avais pas cette épreuve d'âme qu'il est impossible de comprendre, je crois bien que je mourrais de joie à la pensée de quitter bientôt la terre.

[Voir Paroles Retrouvées

Du 21 au 26 mai

11*

J'étais un peu triste ce soir, me demandant si le bon Dieu était vraiment content de moi. Je pensais à ce que chacune des soeurs dirait de moi, si elle était interrogée. Telle dirait : «C'est une bonne petite âme, elle peut devenir une sainte.» - Une autre : «Elle est bien douce, bien pieuse, mais ceci... mais cela...» - D'autres auraient encore des pensées différentes ; plusieurs me trouveraient bien imparfaite, ce qui est vrai... Pour ma petite Mère, elle m'aime tant, cela l'aveugle, alors, je ne puis la croire. Oh ! ce que le bon Dieu pense, qui me le dira ? J'étais dans ces réflexions, quand votre petit mot m'est arrivé. Vous me disiez que tout en moi vous plaisait, que j'étais chérie particulièrement du bon Dieu, qu'il ne m'avait pas fait monter comme les autres le rude escalier de la perfection, mais qu'il m'avait mise dans un ascenseur pour que je sois plus vite rendue à Lui. Déjà, j'étais touchée, mais toujours la pensée que votre amour vous faisait voir ce qui n'est pas, m'empêchait de jouir pleinement ; alors, j'ai pris mon petit Evangile, demandant au bon Dieu de me consoler, de me répondre lui-même... et voilà que je suis tombée sur ce passage que je n'avais jamais remarqué : «Celui que Dieu a envoyé dit les mêmes choses que Dieu, parce qu'il ne lui a pas communiqué son Esprit avec mesure.» Oh ! alors, j'ai versé des larmes de joie, et ce matin, en me réveillant, j'étais encore tout embaumée. C'est vous, ma petite Mère, que Dieu a envoyée pour moi, c'est vous qui m'avez élevée, qui m'avez fait entrer au Carmel ; toutes les grandes grâces de ma vie, je les aies reçues par vous ; aussi, vous dites les mêmes choses que Dieu, et maintenant, je crois que le bon Dieu est très content de moi, puisque vous me le dites.]

Le 26 mai

1

Veille de l'Ascension

Ce matin pendant la procession, j'étais à l'ermitage de St Joseph et je regardais de loin par la fenêtre la Communauté dans le jardin. C'était idéal, cette procession de religieuses en manteaux blancs ; cela me faisait penser au cortège des vierges dans le Ciel. Au détour de l'allée des marronniers, je vous voyais toutes cachées à moitié par les grandes herbes et les boutons d'or du pré. C'était de plus en plus délicieux. Mais voilà que parmi ces religieuses, j'en vois une, des plus gentilles, qui regarde de mon côté, qui se penche en souriant pour me faire un signe de connaissance. C'était ma petite Mère ! Aussitôt je me suis rappelé mon rêve : le sourire, les caresses de la Mère Anne de Jésus et la même impression de douceur m'envahit. Je me disais : c'est donc ainsi que les saints me connaissent, qu'ils m'aiment, qu'ils me sourient d'en haut et m'invitent à les rejoindre !

Alors les larmes sont venues... Il y a bien des années que je n'avais autant pleuré. Ah ! c'étaient de douces larmes.

Le 27 mai

1

Ascension

Je veux bien une «circulaire», parce que j'ai toujours pensé que je devais payer l'office des morts que chacune des carmélites dira pour moi. Je ne comprends pas trop pourquoi il y en a qui ne veulent pas de circulaire ; c'est si doux de se connaître, de savoir un peu avec qui nous vivrons éternellement.

2

Je n'ai nullement peur des derniers combats, ni des souffrances, si grandes qu'elles soient, de la maladie. Le bon Dieu m'a toujours secourue ; il m'a aidée et conduite par la main dès ma plus tendre enfance... je compte sur lui. Je suis assurée qu'il me continuera son secours jusqu'à la fin. Je pourrai bien n'en plus pouvoir, mais je n'en aurai jamais trop, j'en suis sûre.

3

Je ne sais pas quand je mourrai, mais je crois que ce sera bientôt ; j'ai beaucoup de raisons pour m'y attendre.

4

Je ne désire pas plus mourir que vivre ; c'est-à-dire que, si j'avais à choisir, j'aimerais mieux mourir ; mais, puisque c'est le bon Dieu qui choisit pour moi, j'aime mieux ce qu'il veut. C'est ce qu'il fait que j'aime.

5

Qu'on ne croie pas que, si je guéris, cela me déroutera et détruira mes petits plans. Point du tout ! L'âge n'est rien aux yeux du bon Dieu, et je m'arrangerai bien à rester petite enfant, même en vivant très longtemps.

6

Je vois toujours le bon côté des choses. Il y en a qui prennent tout de manière à se faire le plus de peine. Pour moi, c'est le contraire. Si je n'ai que la pure souffrance, si le ciel est tellement noir que je ne voie aucune éclaircie, eh bien ! j'en fais ma joie... J'en fais... jabot ! comme des épreuves de papa qui me rendent plus glorieuse qu'une reine.

7

Avez-vous remarqué, à la lecture du réfectoire, cette lettre adressée à la mère de St Louis de Gonzague, où il est dit de lui qu'il n'aurait pu apprendre davantage ni être plus saint, même s'il avait atteint l'âge de Noé ?

8

A propos de sa mort :

Je suis comme une personne qui ayant un billet de loterie, court la chance de gagner, plus qu'une autre qui n'en aurait pas ; mais pourtant, elle n'est pas sûre encore d'avoir un lot. Enfin, j'ai un billet, c'est ma maladie, et je puis garder bon espoir !

9

Je me rappelle qu'une petite voisine des Buissonnets, âgée de 3 ans, s'entendant appeler par d'autres enfant, disait à sa mère : «Maman! y veulent de moi! laisse-moi m'en aller, je t'en prie... y veulent de moi!...»

Eh bien, il me semble qu'aujourd'hui les petits anges m'appellent, et moi je vous dis comme la petite fille : «Laissez-moi donc partir, y veulent de moi!»

Je ne les entends pas, mais je les sens.

10

Au moment où mon départ pour le Tonkin était projeté, vers le mois de novembre, vous rappelez-vous que pour avoir un signe de la volonté du bon Dieu, on commença une neuvaine à Théophane Vénard ? A ce moment, je retournais à tous les exercices de communauté, même à Matines. Eh bien ! juste pendant la neuvaine, je me suis remise à tousser, et depuis je ne vais que de pire en pire. C'est lui qui m'appelle. Oh ! je voudrais bien avoir son portrait ; c'est une âme qui me plaît. St Louis de Gonzague était sérieux, même en récréation, mais Théophane Vénard, il était gai toujours.

A ce moment, on lisait au réfectoire la vie de St L. de Gonzague.

Le 29 mai

Pointes de feu pour la seconde fois. Le soir j'étais triste et j'ouvris devant elle l'Evangile pour me consoler. Je tombai sur ces paroles que je lui lus : »Il est ressuscité, il n'est plus ici, voyez le lieu où on l'avait mis. »

Oui, c'est bien cela ! Je ne suis plus, en effet, comme dans mon enfance, accessible à toute douleur ; je suis comme ressuscitée, je ne suis plus au lieu où l'on me croit... Oh ! ne vous faites pas de peine pour moi, j'en suis venue à ne plus pouvoir souffrir, parce que toute souffrance m'est douce.

Le 30 mai

1

Ce jour-là, il lui fut permis de me confier son crachement de sang du Vendredi Saint 1896. Comme je lui témoignais une grande peine de n'avoir pas été prévenue aussitôt, elle me consola de son mieux et m'écrivit le soir ce billet :

«N'ayez pas de peine, ma petite Mère chérie que votre petite fille ait semblé vous cacher quelque chose, car vous le savez bien, si elle a caché un petit coin de l'enveloppe, elle ne vous a jamais caché une seule ligne de la lettre. Et qui donc la connaît mieux que vous cette petite lettre que vous aimez tant ? Aux autres, on peut bien montrer l'enveloppe de tous les côtés, puisqu'elles ne peuvent voir que cela ; mais à vous ! ! !... Oh ! petite Mère, vous savez maintenant que c'est le Vendredi Saint que Jésus a commencé de déchirer un peu l'enveloppe de votre petite lettre ; n'êtes vous pas contente qu'il s'apprête à la lire cette lettre que vous écrivez depuis 24 ans ? Ah ! si vous saviez comme elle saura bien lui dire votre amour pendant toute l'éternité ! »

2

Vous souffrirez peut être beaucoup avant de mourir !..

Oh ! n'ayez pas de peine, j'en ai un si grand désir !

3

Je ne sais pas comment je ferai au Ciel pour me passer de vous !

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